Importation de soja brésilien
Question de :
Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe
Eure (3e circonscription) - La République en Marche
Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe interroge Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur l’importation de soja cultivé au Brésil. Le Président de la République affirmait lors de son allocution au journal télévisé de France 2 du 26 août 2019, en clôture du G7 de Biarritz, vouloir recréer la souveraineté protéinique de l'Europe. La France importe chaque année entre 3,5 et 4,2 millions de tonnes de soja, dont 61 % sont produits au Brésil où la production est passée de 26 millions à 115 millions de tonnes entre 1997 et 2017, conséquence de l'augmentation de la demande mondiale de soja. Un développement à grande vitesse dont les effets sont préoccupants pour la biodiversité, la monoculture entraînant une déforestation massive en Amazonie ou dans la savane du Cerrado. Par ailleurs, si la culture d'OGM est interdite en France depuis 2008, l'importation de soja génétiquement modifié est autorisée sous forme de tourteaux et de graines, destinés à nourrir les animaux d'élevages. Or 95 % du soja produit au Brésil est issu de la culture OGM. L'importation de ce soja transgénique, qui nourrit une partie des animaux d'élevages (porcs et volailles) français et contribue à la déforestation en Amérique du Sud, pose donc une vraie question éthique. Pour y répondre, le Gouvernement lançait en 2018 une Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI) affichant l'objectif de mettre fin dès 2030 à l'importation de produits forestiers ou agricoles non durables, contribuant à la déforestation. Les moyens d'actions détaillés dans sa feuille de route sont essentiellement basés sur des programmes de coopération avec les pays producteurs. Dans un contexte de tensions diplomatiques entre la France et le Brésil et alors que l'Institut national de recherche spatiale du Brésil (INPE) estime que près de 5 000 km2 de forêt ont été déboisés au Brésil depuis le mois de janvier 2019, elle souhaiterait connaître les moyens qu'elle envisage pour respecter les objectifs de la SNDI et redonner à la France la souveraineté protéinique appelée de ses vœux par le Président de la République.
Réponse publiée le 31 décembre 2019
L'objectif de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI) est de mettre fin à l'importation de produits agricoles qui contribuent le plus à la déforestation. Sont notamment pris en compte la déforestation, la dégradation des forêts, la conversion des écosystèmes naturels et les changements d'affectation des sols. Le comité de suivi de la SNDI, réuni pour la première fois le 7 mai 2019, a passé en revue l'engagement de la France, qui se décline autour des cinq orientations suivantes : 1 – Développer, partager et valoriser les connaissances : un état des lieux des travaux scientifiques sur la déforestation importée a été effectué et des pistes de recherche identifiées, dont l'une portant sur l'élaboration d'une "empreinte forêt". 2 – Soutenir les actions de lutte contre la déforestation importée dans le cadre de coopérations internationales, pour favoriser une offre durable : afin d'ouvrir le dialogue entre pays producteurs et pays consommateurs, des comités conjoints travaillent à l'élaboration d'une feuille de route par pays ou région exportateur. A titre d'exemple, la deuxième réunion du Comité bilatéral franco-malaisien s'est tenue en France les 14 et 15 octobre 2019. 3 – Intégrer la lutte contre la déforestation aux politiques publiques pour encourager une demande française de produits durables : au plan européen comme international, la France milite pour la mise en place d'actions ambitieuses contre la déforestation importée. Elle s'efforce d'inclure le respect de l'accord de Paris sur le climat dans les accords de libre-échange de l'Union européenne et a sollicité à plusieurs reprises l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur la dimension "déforestation importée". Cette stratégie d'influence se poursuit dans les enceintes internationales. L'une des finalités de l'Alliance pour les forêts tropicales, lancée par le Président de la République en septembre 2019, en marge de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, est justement de lutter contre la déforestation et la dégradation des écosystèmes forestiers via le développement de filières de production durables. 4 – Favoriser et coordonner l'engagement des acteurs : plusieurs actions de sensibilisation ont encouragé les entreprises à non seulement intégrer la lutte contre la déforestation dans leurs stratégies d'investissement (groupe de travail "Capital et entreprises" piloté par Finance for Tomorrow), mais aussi exclure des projets conduisant à la déforestation déjà réalisée pour certains labels de certification comme TEEC (Transition Energétique et Ecologique pour le Climat). Et, une plateforme nationale de lutte contre la déforestation vise à améliorer l'information de l'ensemble des acteurs. 5 – Garantir l'atteinte des objectifs de la SNDI : le dispositif pour le suivi de la SNDI est opérationnel. Dès la fin de l'année 2019, un bilan des travaux sera réalisé dans le cadre du Groupe national de travail sur les forêts tropicales (GNFT). Une mesure importante de lutte contre la déforestation importée, qui consiste dans la mise en place d'une stratégie sur la production de protéines au plan national, est en cours d'élaboration par le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, associant l'ensemble des parties prenantes. Un travail conséquent de concertation a aussi été conduit, dont un chantier "filières"ayant permis de faire émerger une vision commune entre les filières animales et végétales et d'identifier des moyens de faire évoluer les pratiques. En outre, un chantier"recherche" a posé les bases d'une feuille de route sur les protéines végétales et des concertations régionales ont mis en évidence la richesse des initiatives locales sur ces sujets, permettant d'identifier des propositions innovantes. La stratégie nationale sur les protéines sera finalisée sur la base de ces consultations avant la fin de l'année 2019.
Auteur : Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agroalimentaire
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères (M. le SE auprès du ministre)
Dates :
Question publiée le 3 septembre 2019
Réponse publiée le 31 décembre 2019