Situation de l'apprentissage de la lecture en Martinique
Question de :
Mme Manuéla Kéclard-Mondésir
Martinique (2e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Mme Manuéla Kéclard-Mondésir alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la situation catastrophique de l'apprentissage de la lecture dans l'académie de Martinique. Les derniers résultats publiés en août 2019 par la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) indiquent que 34 % des jeunes sont en difficulté de lecture, contre une moyenne nationale de 15,5 %. Pire, seuls 52,4 % des jeunes ayant participé à la journée Défense et citoyenneté (JDC) en 2018 sont des lecteurs efficaces, c'est-à-dire comprenant leur lecture, quand la moyenne nationale frise les 80 %. Près de la moitié des élèves arrive en sixième en ne sachant pas lire, d'où la difficulté pour les équipes pédagogiques des collèges à faire passer leurs enseignements, l'usage de la lecture étant indispensable à l'apprentissage de toute autre matière. Ce déficit chronique dans la maîtrise de la lecture est un élément contributif de nombreuses situations négatives, parmi lesquelles le décrochage scolaire, les problèmes de comportement en classe, la violence scolaire, entre autres. Elle lui demande en conséquence instamment s'il ne serait pas judicieux de mettre en place un plan d'action « LECTURE + », immédiat et à grande échelle (de la maternelle à la cinquième) pour une remise à niveau significative dans la maîtrise de la lecture au profit de l'ensemble des élèves touchés par ce problème.
Réponse publiée le 7 juillet 2020
Les résultats des jeunes élèves en matière d'apprentissage de la lecture, dans l'académie de Martinique comme ailleurs, font l'objet d'une attention particulière de la part du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse. Un ensemble d'actions sont mises en place dans l'académie de la Martinique, de l'école élémentaire au collège, où elles commencent à produire des résultats satisfaisants : le taux de lecteurs efficaces est de 52,4 % en 2018, alors qu'il était de 44,7 % en 2016, soit 8 points de gain de réussite en deux ans. Malgré les difficultés rencontrées par les élèves à l'entrée à l'école élémentaire, la maîtrise du français est désormais satisfaisante à l'entrée en 6ème, pour 66,9 % des élèves et elle se rapproche du niveau national (71,2 %). Il convient de rappeler que la Martinique, comme toutes les autres académies, s'inscrit dans un cadre national volontariste en matière d'apprentissage de la lecture. L'école maternelle, dont le rôle est renforcé par l'abaissement de l'instruction obligatoire à 3 ans à la rentrée scolaire 2019, est déjà orientée vers l'acquisition du langage. A l'école élémentaire, l'apprentissage de la lecture est une priorité réaffirmée. Il repose notamment sur les évaluations des élèves de CP et de CE1, en français et en mathématique, dans toutes les écoles nationales : grâce à ces évaluations, les enseignants peuvent adapter leur enseignement aux besoins de leurs élèves. De plus, des actions sont menées afin de transmettre aux élèves l'envie de lire : distribution d'un recueil des « Fables » de La Fontaine aux élèves de CM2 ; mise en œuvre d'un plan d'équipement pluriannuel, en partenariat avec les communes, afin de constituer des fonds de bibliothèques à partir de projets élaborés par les équipes pédagogiques (au niveau national, 2,5 M€ en 2018 et 2 M€ supplémentaires en 2019). La lecture demeure prise en compte au collège, dont l'un des objectifs prioritaires est de favoriser la consolidation de l'acquisition des savoirs fondamentaux. Les réformes engagées inscrivent le collège dans la continuité avec l'école (organisation en cycles pédagogiques de 3 ans ; outils mis à la disposition des enseignants : livret scolaire, pour un suivi effectif de la progression des élèves ; conseil école-collège, pour la continuité pédagogique entre le premier et le second degré ; évaluations des élèves à l'entrée en sixième) et la maitrise de la langue française demeure une priorité (clarification des programmes du collège, afin de permettre aux élèves d'approfondir leur compréhension du français ; temps collectifs de lecture au cycle 4, pour tous les élèves). Une action résolue est menée par ailleurs en faveur des territoires et des élèves en difficulté. En grande section de maternelle, dans les réseaux d'éducation prioritaire, le programme « PARLER » - « parler apprendre réfléchir lire ensemble pour réussir », mis en place en Martinique en 2011, est centré sur le développement des compétences lexicales et phonologiques nécessaires à l'acquisition de la lecture, afin de prévenir les difficultés de lecture des élèves. A l'école primaire, les élèves de CP et CE1 scolarisés dans les réseaux d'éducation prioritaire bénéficient du dédoublement des classes : cette réduction des effectifs d'élèves (12 à 13 élèves par classe) leur permet de bénéficier d'un environnement de travail favorable à l'apprentissage des savoirs fondamentaux. Au sein de l'académie de Martinique, ce dispositif est engagé dans toutes les écoles des réseaux d'éducation prioritaire. Il bénéficie à 151 classes de CP et 143 classes de CE1 en REP et REP+, soit 1 676 élèves de CP (49 % de l'effectif des élèves de CP l'académie) et 1 743 élèves de CE1 (46 % de l'effectif de l'académie). De plus, conformément aux mesures présidentielles annoncées, le dédoublement est déployé dans 9 écoles maternelles, dans leurs classes de grande section. Les élèves rencontrant des difficultés peuvent s'inscrire à des stages de réussite pendant les vacances scolaires et, à tout moment de la scolarité, bénéficier d'un programme personnalisé de réussite éducative. Tous les collégiens volontaires peuvent bénéficier d'une aide aux devoirs. Par ailleurs, la souplesse accrue de l'organisation de la scolarité au collège permet désormais aux équipes pédagogiques de proposer aux élèves qui en ont le plus besoin au moins 2 heures par semaine d'accompagnement personnalisé. En complément de ces mesures déployées au collège, un soutien scolaire, sur le modèle du dispositif « Devoirs faits au collège », est proposé dès l'école primaire, après la classe, aux élèves scolarisés en éducation prioritaire et uniquement dans les départements et régions d'outre-mer. En Martinique, le dispositif est déployé dans 50 écoles, au bénéfice de plus de 1 300 élèves. Enfin, l'académie de Martinique déploie la stratégie « Fondamentaux + », qui s'apparente au plan « Lecture + » : en effet, ce plan d'action permet de mener une action systémique en faveur de la lecture, tout au long du parcours des élèves, en favorisant le renouveau pédagogique : visites de toutes les classes dédoublées par des inspecteurs, recours à des grilles d'observation en vue de la réalisation de synthèses associées aux visites, formations accrues de tous les acteurs (formateurs, directeurs, professeurs des écoles, enseignants spécialisés, etc.), exploitation fine des résultats des évaluations nationales afin d'apporter une aide adaptée aux besoins des élèves en difficulté, poursuite de l'appropriation des ressources nationales et académiques, généralisation du quart d'heure de lecture de la maternelle au collège, instauration d'un cahier de suivi " Fondamentaux +" pour structurer les apprentissages réalisés. Cette stratégie mobilise tous les acteurs concernés, qui veillent à la conduire en synergie avec les dispositifs déjà engagés, au niveau national décrit précédemment, mais également au niveau académique (Parcours Anglais +, Expression orale libre, etc.). En définitive, la question du déploiement d'un plan « Lecture + » est d'ores et déjà au cœur de la politique éducative et pédagogique menée par le rectorat de Martinique, dans le sillage des orientations et politiques nationales.
Auteur : Mme Manuéla Kéclard-Mondésir
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Éducation nationale et jeunesse
Ministère répondant : Éducation nationale et jeunesse
Dates :
Question publiée le 17 septembre 2019
Réponse publiée le 7 juillet 2020