15ème législature

Question N° 23198
de M. Patrick Hetzel (Les Républicains - Bas-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > copropriété

Titre > Conséquences article 16 « loi Pacte » - Copropriétés

Question publiée au JO le : 01/10/2019 page : 8401
Réponse publiée au JO le : 12/11/2019 page : 9982
Date de changement d'attribution: 08/10/2019

Texte de la question

M. Patrick Hetzel attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences de l'article 16 de la « loi Pacte ». Cet article autorise le Gouvernement à prendre une ordonnance visant à réformer le droit des sûretés et des privilèges spéciaux. Cette disposition a été adoptée en dehors de toute concertation avec les copropriétaires. La suppression de la garantie offerte par le privilège consenti au syndicat des copropriétaires, pénaliserait gravement le bon fonctionnement des copropriétés, surtout les plus fragiles. Cela dissuaderait les copropriétaires des syndicats qui ont subi des impayés de charges, d'entreprendre les travaux d'entretien nécessaires des immeubles et amènerait une dégradation rapide du parc immobilier, et ne faciliterait pas la rénovation énergétique pourtant si urgente. Selon les informations diffusées par des associations de copropriétaires ou de consommateurs, et le registre des immatriculations des copropriétés, le nombre des copropriétés serait actuellement proche de 700 000, et le pourcentage actuel des copropriétés en grande difficulté se situerait aux environs de 19 % de l'ensemble du parc d'immeubles en copropriété. La suppression de cet outil de protection que constitue le privilège prévu à l'article 2374 du code civil et 19 de la loi du 10 juillet 1965 instituant ce privilège aggraverait la situation de toutes les copropriétés et surtout les plus fragiles ou celles déjà en difficulté. Les petites copropriétés, qui sont les plus nombreuses, seront le plus touchées. Supporter la défaillance d'un copropriétaire est plus pénalisant dans une copropriété de 3 à 5 lots, que dans une copropriété de 20 ou plus de lots principaux, L'impact de la mise en œuvre du privilège sur les droits des autres créanciers disposant d'une hypothèque ou également d'un privilège, est négligeable par rapport au montant du prix de vente, du ou des lots concernés, et représente des dépenses nécessaires pour la préservation et valorisation du ou des lots. Elle est profitable à tous les créanciers, notamment à ceux qui disposent des créances les plus importantes. Aussi, il souhaiterait savoir si les dispositions qui seront prises par voie d'ordonnance dans le cadre de l'autorisation donnée par la loi Pacte ne conduiront pas à la suppression de ce privilège.

Texte de la réponse

L'article 60 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance aux fins de réformer le droit des sûretés. Parmi les mesures envisagées par le Gouvernement pour mener cette réforme, figure le remplacement des privilèges immobiliers spéciaux soumis à publicité par des hypothèques légales. L'article 2374 du Code civil énumère neuf privilèges spéciaux immobiliers parmi lesquels figurent le privilège du vendeur, celui du prêteur de denier, des cohéritiers sur un immeuble dépendant de la succession pour garantie des partages faits entre eux et des soultes ou retours de lots, ou encore celui du syndicat des copropriétaires. Les privilèges spéciaux immobiliers, à l'exception de celui dont bénéficie le syndicat des copropriétaires, sont soumis au formalisme de la publicité foncière. Leur inscription au fichier immobilier leur permet de prendre rang de manière rétroactive au jour de l'évènement qui leur a donné naissance, à la différence des hypothèques légales qui ne prennent rang qu'au jour de leur inscription. Cette prise de rang rétroactive, qui est la seule différence entre les privilèges spéciaux immobiliers et les hypothèques légales, a pour effet de les rendre occultes aux autres créanciers qui ne peuvent les anticiper et se trompent sur la priorité de leur propre créance. Ce caractère occulte des privilèges spéciaux immobiliers ne sécurise donc pas le marché des transactions immobilières et leur financement. Le Gouvernement envisage, par conséquent, de supprimer la rétroactivité des privilèges spéciaux immobiliers dès lors qu'ils sont soumis à publicité afin d'améliorer la prévisibilité des garanties financières. Toutefois, ce projet de réforme ne concerne pas le privilège spécial immobilier qui bénéficie au syndicat des copropriétaires, celui-ci n'étant pas soumis à publicité. Il est, par conséquent, expressément exclu du domaine de l'habilitation. Les craintes évoquées dans la question ne sont donc pas fondées.