15ème législature

Question N° 23912
de Mme Danièle Obono (La France insoumise - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > outre-mer

Titre > Rupture d'égalité subie par les agents pénitentiaires originaires d'outre-mer

Question publiée au JO le : 22/10/2019 page : 9335
Réponse publiée au JO le : 21/01/2020 page : 450

Texte de la question

Mme Danièle Obono interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la rupture d'égalité subie par les agents pénitentiaires originaires d'outre-mer. Plusieurs directeurs pénitentiaires originaires des outre-mer se sont vu refuser par le directeur de l'administration pénitentiaire une affectation dans leur collectivité d'origine, soit parce qu'ils avaient déjà été affectés dans une autre collectivité d'outre-mer (interdiction du double séjour en outre-mer), soit sous prétexte de risques d'intérêts familiaux qui les empêcheraient de remplir au mieux leur mission de service public. Si l'interdiction d'une double affectation en outre-mer semble déjà problématique en ce qu'elle contredit la nécessité de tenir compte du centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) dans la mobilité, comme indiqué dans la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer, l'impossibilité d'être affecté dans sa collectivité d'outre-mer d'origine au prétexte de conflits d'intérêts familiaux n'est mentionnée explicitement dans aucune note de l'administration pénitentiaire tant elle relèverait d'une rupture manifeste d'égalité et constituerait un cas flagrant de discrimination liée à l'origine, puisque ce principe n'est appliqué dans aucun autre département français. Pourtant, et malgré les nombreuses interpellations des agents concernés, la pratique demeure et, du moins, rien n'est fait pour s'assurer que ce ne soit pas le cas. Elle lui demande donc quels barèmes permettent aujourd'hui d'évaluer la prise en compte effective des CIMM dans l'affectation des agents pénitentiaires, quels moyens elle compte mettre en œuvre, et avec quel calendrier, pour évaluer la diffusion de la pratique citée plus haut, qui déshonorerait le principe d'égalité de la République, afin d'y mettre un terme au plus vite.

Texte de la réponse

Le centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) des directeurs des services pénitentiaires (DSP) est pris en compte, dans le cadre de leurs demandes de mutations, parmi les autres critères légaux et dans le respect par ailleurs des obligations statutaires propres à ce corps d'encadrement supérieur sous statut spécial. En particulier, les postes de directeurs des services pénitentiaires en établissement sont des postes à profil : l'intérêt du service commande que le profil le mieux adapté soit affecté dans ces établissements dont plusieurs, au demeurant, sont particulièrement lourds et complexes à diriger comme dans la zone Antilles-Guyane. L'article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 prévoit du reste que les fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie sont affectés de manière prioritaire dans ces territoires « dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service ». A ce titre, l'administration examine les demandes de mobilité des directeurs dans le respect des dispositions du décret n° 2007-930 du 15 mai 2007 portant statut particulier du corps des directeurs des services pénitentiaires, qui prévoit notamment une durée maximale d'affectation sur un même emploi fixée à quatre ans, que l'administration peut prolonger dans la limite de deux années. Les affectations successives outre-mer et, a fortiori, les promotions sur place ne sont pas encouragées dans une gestion responsable des cadres supérieurs de l'Etat : ces règles de gestion n'ont rien de problématique et sont parfaitement connues des directeurs et de leurs organisations représentatives. Enfin, l'impossibilité d'être affecté dans sa collectivité d'outre-mer d'origine n'a pas été opposée comme une règle aux directeurs concernés ; la situation est d'ailleurs fort rare et n'a par conséquent pas fait l'objet de nombreuses interpellations. Au final, les affectations des directeurs des services pénitentiaires sont décidées au regard de critères de gestion, tels que l'expérience pénitentiaire, et notamment du commandement, l'ancienneté dans le corps et dans l'affectation, la qualification demandée sur le poste, mais aussi le contexte local, les compétences existantes au sein de l'équipe de direction, la qualité des autres candidatures, etc, de manière à concilier l'application des dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984, celles du statut spécial des DSP et l'intérêt du service.