15ème législature

Question N° 24028
de M. Charles de la Verpillière (Les Républicains - Ain )
Question écrite
Ministère interrogé > Ville et logement
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > copropriété

Titre > Répartition des charges - Modification

Question publiée au JO le : 29/10/2019 page : 9566
Réponse publiée au JO le : 02/06/2020 page : 3856
Date de changement d'attribution: 12/11/2019

Texte de la question

M. Charles de la Verpillière appelle l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur les règles relatives à la modification de la répartition des charges prévues par les articles 11 et 12 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Ces articles exigent soit une adoption à l'unanimité, sauf le cas de la modification concomitante à des travaux ou des actes d'acquisition ou de disposition décidés par l'assemblée générale, soit une résolution judiciaire de la difficulté. L'action judiciaire en révision de la répartition des charges nécessite que le demandeur apporte la preuve que la part correspondant à son lot est supérieure de plus d'un quart, ou que la part correspondant à celle d'un autre copropriétaire est inférieure de plus d'un quart, et se prescrit par cinq ans à compter de la publication du règlement de copropriété au fichier immobilier et par deux ans à compter de la première mutation à titre onéreux d'un lot après ladite publication du règlement de copropriété. Ces deux procédures de modification, amiable et judiciaire, manquent de souplesse, et dans la pratique, interdisent souvent toute évolution. Aussi, il lui demande si le Gouvernement entend assouplir la règle de majorité requise pour modifier la répartition des charges, à l'occasion des ordonnances devant être prises en application de l'article 215 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018.

Texte de la réponse

La répartition des charges est directement liée à la répartition de l'immeuble par lots et elle est fixée dans le règlement de copropriété, qui constitue la charte commune de l'immeuble, à laquelle les copropriétaires ont adhéré préalablement à l'acquisition de leur lot. Afin d'éviter une remise en cause permanente des règles conventionnelles de répartition et de paiement des charges, génératrice d'insécurité juridique, d'instabilité et de conflits entre copropriétaires, l'article 11 de la loi du 10 juillet 1965 pose le principe d'ordre public selon lequel la répartition des charges telles qu'elle résulte du règlement de copropriété ne peut être modifiée que par l'assemblée générale statuant à l'unanimité des voix de tous les copropriétaires. Par exception, le même article 11 prévoit en son alinéa 2 une dérogation importante à l'intangibilité de la répartition des charges, dès lors qu'une modification de celle-ci est rendue nécessaire par des travaux, ou des actes d'acquisition ou de disposition, décidés par l'assemblée générale. La modification de la répartition des charges est alors décidée par l'assemblée générale à la même majorité que celle prévue par la loi pour le vote des travaux ou des actes eux-mêmes, ce qui facilite la prise de décision pour modifier cette répartition. Il en va de même en cas d'aliénation séparée d'une ou plusieurs fractions de lots ou de réunion de plusieurs lots en un seul (alinéa 1er de l'article 11). La décision ayant opéré une nouvelle répartition des charges peut être contestée par tout copropriétaire, en application du dernier alinéa de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965. A défaut de décision de l'assemblée générale modifiant les bases de répartition des charges dans les cas susmentionnés, tout copropriétaire peut également saisir le tribunal à l'effet de procéder à la nouvelle répartition rendue nécessaire en application du dernier alinéa de l'article 11. Par ailleurs, l'article 12 de la loi du 10 juillet 1965 institue une action en révision d'une répartition des charges lésionnaires dans le règlement de copropriété institué ab initio, lors de la mise en copropriété. La répartition initiale des charges peut ainsi être contestée dans un délai de cinq ans à compter de la publication du règlement ou dans un délai de deux ans à compter de la première mutation d'un lot, par le propriétaire d'origine, depuis cette publication.  Afin de limiter les demandes en révision pour lésion, la loi n'ouvre cette action que dans deux hypothèses, dès lors que : - soit la quote-part de charges correspondant au lot du demandeur est supérieure de plus d'un quart à celle qui résulterait d'une répartition conforme à celle prévue à l'article 10, - soit la quote-part d'un autre copropriétaire est inférieure de plus d'un quart à celle qui résulterait d'une répartition conforme à celle prévue à l'article 10. Cette action, qui tend à discuter le quantum de la quote-part fixé par le règlement de copropriété, et non les clés de répartition, est donc strictement encadrée en termes de délai et de préjudice.  Ces restrictions se justifient également par le fait que le montant de la part de charges supporté par chaque lot, attaché à la chose (Civ. 3ème, 12 décembre 2001, n° 00-13824), constitue une caractéristique essentielle du bien, dont tout acquéreur doit être préalablement informé, en application de l'article L. 721-2 du Code de la construction et de l'habitation et du dernier alinéa de l'article 5 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967. Or, si la répartition des charges, telle que prévue au règlement de copropriété, pouvait être aisément modifiée, cela serait de nature à entrainer une remise en cause de la quote-part de charges communes générales imputable à chaque copropriétaire. Faciliter davantage l'exercice de l'action prévue à l'article 12 pourrait donc conduire à des modifications récurrentes d'un élément fondamental, qui participe du consentement éclairé de l'acquéreur et de l'économie générale du contrat (Civ. 3ème, 11 février 2009, n° 07-20237). Enfin, tout copropriétaire peut solliciter, à tout moment, l'établissement d'une répartition des charges conforme aux critères impératifs de répartition des charges posés à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965. Les clauses relatives à la répartition des charges contraires aux dispositions des articles 10 et 10-1 sont réputées non écrites, en application de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1965. L'action en annulation d'une clause du règlement réputée non écrite obéit à un régime spécifique et ne peut aboutir que si l'un des critères légaux de répartition entre les charges, prévu à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 (utilité objective ou valeur relative des parties privatives comprises dans chaque lot), n'a pas été respecté. Au total, ce dispositif assure un équilibre satisfaisant entre stabilité et sécurité juridique, d'une part, et nécessité d'éviter à certains copropriétaires d'être victimes d'une répartition des charges lésionnaire ou injuste, d'autre part. Il n'est donc pas envisagé, en l'état, de le modifier.