Question écrite n° 24238 :
Financement des chambres de métiers et de l'artisanat d'outre-mer

15e Législature

Question de : M. Jean-Philippe Nilor
Martinique (4e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Philippe Nilor attire l'attention de M. le Premier ministre sur la situation des chambres de métiers et de l'artisanat en outre-mer dont le financement est gravement menacé. Les chambres de métiers et de l'artisanat jouent un rôle essentiel puisqu'il leur appartient de mettre en œuvre des missions d'accompagnement couvrant toutes les étapes de la vie de l'entreprise artisanale, de la détection d'un projet à la transmission d'entreprise afin d'en assurer le développement et la pérennité. Ces chambres ont aussi vocation à former les artisans d'aujourd'hui et de demain via l'apprentissage. D'ailleurs, en Martinique, 70 % des apprentis sont accueillis par des entreprises artisanales, l'artisanat représentant la première entreprise d'outre-mer! Le rôle des chambres de métiers et de l'artisanat est donc d'autant plus important dans les collectivité d'outre-mer où elles contribuent aussi à réduire le chômage qui y est particulièrement élevé. Pourtant, aujourd'hui, le budget des chambres de métiers et de l'artisanat jusqu'alors notablement abondé par la cotisation foncière des entreprises (CFE) risque d'être sérieusement impacté par une perte importante de recettes. En effet, l'article 97 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 prévoit l'exonération de CFE minimum en faveur des redevables réalisant un chiffre d'affaires ou de recettes inférieur ou égal à 5 000 euros. Certes, cette mesure a le mérite d'alléger les charges pesant sur les plus petites entreprises. Néanmoins, elle ampute corrélativement les chambres de métiers et de l'artisanat d'une part substantielle de leur budget. Compte tenu du tissu économique des collectivités d'outre-mer composé essentiellement de très petites entreprises, l'impact de cette mesure y est donc plus préjudiciable qu'en France continentale (où la perte estimée n'est que de 8 % environ). Si une compensation est envisagée pour remédier à la perte en résultant pour les communes et EPCI à fiscalité propre, rien n'a été jusqu'à ce jour prévu pour éviter l'effondrement des ressources des chambres de métiers et de l'artisanat qui risquent à terme de ne plus être en mesure de mener à bien leurs missions. Or, pour les chambres d'outre-mer, la perte liée à l'application de cette exonération est estimée à plus de 1,2 millions d'euros sur un budget global de 7 millions d'euros (- 24 % en Martinique, 27 % en Guadeloupe et 39 % en Guyane). Face à cet inacceptable danger, les chambres de métiers et de l'artisanat de Martinique, Guadeloupe, Guyane, Réunion et Mayotte se sont unies pour une mobilisation commune inédite ayant abouti à la signature d'une motion réclamant à l'État, l'application de mesures de compensation, à l'instar de celles prévues en faveur des collectivités territoriales. Le Gouvernement adepte de l'égalité réelle et du droit à la différenciation, resté sourd jusqu'à ce jour, ne saurait légitimer ce nouveau cas flagrant de discrimination. En conséquence, il lui demande quelles dispositions il entend prendre pour garantir la stabilité budgétaire des chambres de métiers et de l'artisanat, particulièrement en outre-mer où l'application d'une telle exonération mériterait une étude d'impact précise compte tenu des spécificités et réalités de ces territoires. Au-delà, cette situation doit également alerter sur la précarité des entreprises ultramarines qu'il convient d'accompagner afin qu'elles envisagent un développement créateur d'emplois et de richesses pour les territoires. (A titre d'exemple, en Martinique plus de 1 700 entreprises artisanales ont un chiffre d'affaire inférieur à 5 000 euros). Pour cela, l'État doit aussi s'impliquer en partenariat avec les collectivités concernées et les chambres de métiers et d'artisanat. Il lui demande ses intentions à ce sujet.

Réponse publiée le 14 janvier 2020

Les services du ministère de l'économie et des finances, en liaison avec le ministère de l'action et des comptes publics et CMA France, ont réalisé une évaluation de l'impact de l'exonération de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et, par voie de conséquence, de la taxe additionnelle versée aux chambres de métiers et de l'artisanat. Les travaux réalisés par la Direction générale des finances publiques (DGFiP) projettent pour les chambres d'outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion) une baisse moyenne de 17 % (15 % en Martinique) par rapport au plafond prévu pour l'année 2019, c'est-à-dire le montant maximum qui pouvait être escompté par les chambres. Le ministère des outre-mer attire toutefois l'attention de M. le député sur le fait que l'impact de cette mesure est à rapporter à l'ensemble des ressources de ces chambres. En 2017, le produit de TFCM ne représentait en moyenne que 14 % de leurs ressources. En effet, si le chiffre de 1,2 million d'euros paraît une estimation réaliste de la baisse de TFCM à percevoir par les CMA d'outre-mer au titre de 2019, il est à rapporter à l'ensemble de leurs revenus, qui en 2017 se montaient à près de 46 millions d'euros. La baisse du produit de la TFCM estimée pour 2019 représente donc une baisse des ressources des chambres ultra-marines de 2,4 % en moyenne et de 2,6 % pour la chambre de Martinique. Par ailleurs, ainsi que le souligne M. le député, cette exonération est une mesure de baisse de pression fiscale qui bénéficie aux entreprises à très faible chiffre d'affaires et contribue donc au développement du tissu économique local. Le réseau des CMA, coordonné par CMA France, a été invité à organiser une solidarité financière entre les chambres en s'appuyant sur les outils déjà à sa disposition : le fonds de financement et d'accompagnement prévu aux articles 5-8, 6° et 5-8-1 du code de l'artisanat, ainsi que le fonds de péréquation à destination des chambres à faible effectif.

Données clés

Auteur : M. Jean-Philippe Nilor

Type de question : Question écrite

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Outre-mer

Dates :
Question publiée le 5 novembre 2019
Réponse publiée le 14 janvier 2020

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