15ème législature

Question N° 25109
de Mme Justine Benin (Mouvement Démocrate et apparentés - Guadeloupe )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > outre-mer

Titre > Aides à l'agroforesterie en outre-mer

Question publiée au JO le : 10/12/2019 page : 10662
Réponse publiée au JO le : 13/10/2020 page : 7042
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

Mme Justine Benin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les aides européennes relatives à l'agroforesterie. Le café et le cacao sont pour la Guadeloupe et, plus singulièrement, la Côte sous le Vent, des cultures dites patrimoniales. Ainsi, à la fin du 17ème siècle, près de 6 000 tonnes de café étaient exportées vers la France hexagonale. La culture du cacao a, quant à elle, connu une expansion considérable au début du 20e siècle, atteignant jusqu'à 2 000 tonnes pour l'ensemble du territoire guadeloupéen. Aujourd'hui, ces plantations ont cédé leur place à d'autres cultures, pendant longtemps considérées comme plus rémunératrices : la banane et la canne à sucre ; filières qui rencontrent aujourd'hui des difficultés à se maintenir face à la concurrence internationale et à l'étroitesse du marché insulaire. Cette situation conduit la Guadeloupe à repenser la structuration de ses filières agricoles en tenant compte des différents facteurs structurels spécifiques à son territoire : pollution des sols, réduction du foncier disponible, limitation des intrants et de l'irrigation, concurrence internationale, et, surtout, exigence de tendre vers l'autosuffisance alimentaire. De ce constat est né dans la commune de Bouillante le projet de revaloriser les cultures ancestrales que sont le cacao, le café mais également la vanille, à travers l'implantation d'un parc agroforestier et agrotouristique. Un tel projet, portant principalement sur une production agricole en sous-bois, permettrait de répondre aux différentes problématiques du territoire. En effet, le développement de ces cultures, sans concurrencer celles existant aujourd'hui, initierait une diversification agricole, tout en intégrant la notion de l'agro-écologie. Elle s'accorderait en outre avec la nécessaire reconversion des périmètres bananiers, qui se heurte aujourd'hui à la pollution du chlordécone excluant toute culture maraîchère sur ces sols. Ce sont par ailleurs des dizaines d'emplois qui ont vocation à être créés dans le cadre de ces exploitations non mécanisées, exigeant par conséquent le recours à des salariés agricoles. Cela fait désormais 6 ans qu'un tel projet est en construction, en lien avec la municipalité de Bouillante, le Conseil régional de Guadeloupe et la Direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Guadeloupe (DAAF). Malheureusement, les nouvelles normes nationales considérant désormais les activités en agroforesterie comme relevant de la foresterie et non plus de l'agriculture, c'est une baisse de plus de 50 % des financements initialement prévus dans le cadre du FEADER qui est annoncée suite à la modification de la réglementation. Aussi, elle souhaite savoir quelles orientations il compte prendre quant aux aides à l'agroforesterie en outre-mer.

Texte de la réponse

Les services de l'État partagent le constat d'une réelle opportunité de développement des filières agroforestières en Guadeloupe, et en particulier en Côte sous le Vent. Ces productions de niche à forte valeur ajoutée, cultivées de façon agro-écologique, sont encouragées à travers plusieurs dispositifs d'aide du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), mais ce soutien s'est également traduit par un appui de la direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DAAF) à la création du syndicat des planteurs de café, cacao et vanille et le financement d'un groupement d'intérêt économique et environnemental travaillant sur ces thématiques en Côte sous le Vent. En premier lieu, il convient de rappeler que l'agroforesterie intra-parcellaire ne fait pas partie des productions agricoles définies dans le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ce qui limite la possibilité d'intervention dans le cadre des mesures « investissements en agriculture » (mesure 4) du FEADER. Cette situation explique également pourquoi l'aide à l'agroforesterie intra-parcellaire (mise en place et entretien), que la Guadeloupe est l'une des régions à avoir ouverte, est inscrite dans la mesure 8 (Forêt), et non pas dans les mesures agro-environnementales. Il ne s'agit donc pas de « nouvelles normes gouvernementales », mais d'une situation découlant des traités européens, qui n'ont pas évolué depuis le début de la programmation. La sous-mesure 8.2 (agroforesterie), qui traite de l'agroforesterie intra-parcellaire, se décline en deux parties qui peuvent être souscrites indépendamment. La première partie est une mesure d'aide à l'investissement qui subventionne l'implantation des nouveaux systèmes (à hauteur de 75 % des dépenses éligibles). La seconde partie est une aide à l'entretien qui concerne donc les systèmes déjà opérationnels. Elle se demande lors de la déclaration de surfaces annuelle et fonctionne sur le même principe qu'une mesure agro-environnementale et climatique (diagnostic préalable, engagement de cinq ans à confirmer chaque année). Son montant unitaire est de 2 734 euros par hectare et par an. Plus directement au sujet du projet de parc agro-touristique de la Source, situé sur la commune de Bouillante, ce dossier a été déposé [cinq dossiers simultanés, un fonds européen de développement régional (FEDER) et 4 FEADER en juin 2018 et a fait l'objet de nombreux échanges entre la DAAF (service d'économie agricole et service des territoires agricoles, ruraux et forestiers), l'autorité de gestion et les porteurs de projet], afin de trouver des solutions de financement adaptées (récemment une réunion début octobre 2019 entre DAAF et assemblée générale). Le projet dans la globalité ne pouvait être financé sur du FEADER, mais la DAAF et la région travaillent depuis plusieurs mois afin de scinder le projet en unités finançables sur les différents instruments. Ce projet est très important (plus de 2 M€ au total) et comporte plusieurs volets distincts : - une partie « plantation agroforestière » (finançable en partie sur la sous-mesure 8.2 du FEADER, dont le plafond pour l'achat de matériel va être relevé de 2 000 € à 25 000 € pour permettre notamment à ce dossier d'en bénéficier au titre de cette mesure et non pas de la sous-mesure 4.1.1) ; - une partie bâtiments (restaurant, locaux techniques) et cheminements piétonniers en forêt non-finançables sur les mesures investissements du FEADER (le porteur de projet va être réorienté vers LEADER pour les bâtiments, et vers le FEDER pour les cheminements) ; - une partie serres/pépinières qui est éligible à la sous-mesure 4.1.1 du FEADER. Enfin, l'agroforesterie bénéficie au niveau national d'un plan de développement, coordonné par le ministère chargé de l'agriculture, qui comporte un volet « outre-mer » ayant généré, depuis sa création en 2015, de nombreuses actions d'envergure régionale, y compris en Guadeloupe. La reconduction de ce plan pour la période 2020-2025 est en cours de réflexion, et devrait donner lieu à de nouvelles propositions démontrant l'importance de la prise en considération de ce sujet, qui s'inscrit dans la politique nationale en faveur de la transition agro-écologique.