Question écrite n° 2513 :
Présomption d'absence de consentement du mineur victime d'actes sexuels

15e Législature

Question de : Mme Marie-Noëlle Battistel
Isère (4e circonscription) - Nouvelle Gauche

Mme Marie-Noëlle Battistel attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la présomption irréfragable d'absence de consentement du mineur victime d'actes sexuels. Une affaire concernant une enfant de 11 ans, victime de relations sexuelles infligées par un adulte, vient d'être qualifiée par le parquet non pas de viol mais d'« atteinte sexuelle sur une mineure de moins de quinze ans » et renvoyée devant le tribunal correctionnel sur la base de l'article 227-25 du code pénal. Le ministère public a estimé « que dans le cas d'espèce, il n'y avait eu ni violence, ni contrainte, ni menace, ni surprise ». Au-delà de cette situation particulière actuellement pendante devant la justice et qu'il convient de ne pas commenter, une émotion très forte s'est exprimée dans l'opinion publique concernant le manque dans la législation française d'une présomption irréfragable d'absence de consentement du mineur victime d'actes sexuels. Une telle présomption permettrait de poursuivre pour viol une personne ayant infligé un acte sexuel à des mineurs qui, manipulés et sidérés par l'événement, n'auraient pu exprimer leur opposition. L'absence d'une telle présomption qui existe pourtant dans un certain nombre de législation de pays voisins paraît aujourd'hui difficilement compréhensible. Elle lui demande sa position sur l'inscription à l'ordre du jour du Parlement d'un projet de loi qui clarifie et complète l'arsenal juridique dans la lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants.

Réponse publiée le 9 octobre 2018

La loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes est venue renforcer la protection des mineurs victimes d'infractions sexuelles, plus particulièrement lorsqu'ils sont âgés de moins de quinze ans. Ainsi, le dernier alinéa de l'article 222-22-1 du code pénal dispose désormais qu'en cas d'atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans, la contrainte morale ou la surprise, qui définissent le viol ou les agressions sexuelles, sont caractérisées par l'abus de la vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes. Dès lors, ainsi que le précise la circulaire du 3 septembre 2018 adressée à l'ensemble des juridictions par la ministre de la justice, le principal critère devant être pris en compte par les juridictions pour apprécier l'existence d'une contrainte morale ou d'une surprise lorsque les faits ont été commis sur un mineur de quinze ans est celui du discernement de la victime et de sa capacité à consentir ou non à une atteinte sexuelle. Dès lors, le fait qu'un mineur de quinze ans puisse avoir l'apparence physique ou le comportement d'un mineur plus âgé ou d'un adulte, ou encore qu'il puisse avoir été exposé préalablement à des images pornographiques sur des sites internet ne saurait conduire les juridictions à considérer que ce mineur peut valablement consentir à un acte sexuel, s'il ne dispose pas d'un discernement suffisant à cette fin. En pratique, du fait de cette référence à la notion de discernement nécessaire, les qualifications de viol ou d'agression sexuelle devraient désormais normalement être retenues à chaque fois que seront victimes d'atteintes sexuelles les mineurs les plus jeunes. Cette modification a paru préférable à la création d'une présomption de non consentement qui soulevait des difficultés tant constitutionnelles que pratiques. Elle présente par ailleurs un caractère interprétatif, qui fait qu'elle est immédiatement applicable aux procédures en cours, y compris celles portant sur des faits commis avant l'entrée en vigueur de la loi.

Données clés

Auteur : Mme Marie-Noëlle Battistel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 31 octobre 2017
Réponse publiée le 9 octobre 2018

partager