15ème législature

Question N° 25824
de M. Hubert Wulfranc (Gauche démocrate et républicaine - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Personnes handicapées
Ministère attributaire > Personnes handicapées

Rubrique > personnes handicapées

Titre > Amélioration indispensable de la prise en charge de l'autisme en France

Question publiée au JO le : 14/01/2020 page : 166
Réponse publiée au JO le : 16/03/2021 page : 2368
Date de changement d'attribution: 26/01/2021
Date de signalement: 24/03/2020

Texte de la question

M. Hubert Wulfranc alerte Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur les carences du niveau de prise en charge de l'autisme en France. Alors que l'autisme touche en moyenne 650 000 personnes en France 75 000 personnes seulement sont actuellement diagnostiquées. Ces personnes ainsi que leurs familles ont besoin, à des degrés différents, de prise en charge et d'accompagnement de la part des services publics. Actuellement 80 % des enfants atteints d'autisme ne sont pas scolarisés. Les structures éducatives spécialisées sont trop rares ainsi que les personnels qualifiés pour accompagner les autistes en milieu scolaire. Les parents se retrouvent démunis et seuls, la plupart du temps, avec le sentiment légitime d'être abandonnés par les pouvoirs publics. Le problème peut être encore plus préoccupant lorsque les parents disparaissent et que la personne autiste se retrouve isolée ou ne peut pas accéder à un foyer si besoin. La France a plusieurs décennies de retard sur certains pays. L'État a été condamné à plusieurs reprises pour manquement à ses obligations légales en matière éducative, thérapeutique ou sociale vis-à-vis de ces personnes. S'il existe de lourdes carences en termes de diagnostic de l'autisme, les problèmes touchent également les centres ressources autisme qui sont totalement engorgés. Il faut compter, en moyenne, entre 300 jours et 1 000 jours pour bénéficier d'un diagnostic précis de troubles ou d'absence de trouble. Une fois l'autisme avéré, l'accompagnement n'est pas constant ou nettement insuffisant. Ainsi, environ 45 % des adolescents et adultes autistes ont connu des ruptures lors de leur accompagnement. De plus, les familles doivent débourser 3 000 euros en moyenne par an pour faire face aux soins de leurs proches souffrant de troubles autistiques, entre les dépenses de transports, les soins d'ergothérapie, de psychomotricité, d'orthophonie non pris en charge par la solidarité nationale, les dépassements d'honoraires en secteur libéral, ou encore, pour acquérir du matériel pédagogique. De fait, la prise en charge des enfants autistes se fait donc en fonction des moyens financiers des parents. À mi-parcours du quatrième plan autisme, il lui demande quelles mesures entend prendre le Gouvernement, à moyen et à long terme, pour combler les carences béantes auxquelles sont confrontées les familles concernées en matière de prise en charge et d'accompagnement de l'autisme.

Texte de la réponse

La stratégie nationale pour l'autisme au sein des troubles du neuro-développement, présentée par le Premier ministre le 6 avril 2018, a permis d'affirmer clairement l'enjeu majeur de santé publique que constituent l'autisme et les troubles du neuro-développement. Le cadre de travail s'est inscrit dans l'application des recommandations de bonnes pratiques telles qu'elles ont été établies par la Haute autorité de santé. La stratégie nationale pour l'autisme au sein des troubles du neuro-développement porte sur 5 engagements majeurs, afin d'améliorer le quotidien des personnes autistes et de leurs familles : - Remettre la science au cœur de la politique publique de l'autisme en dotant la France d'une recherche d'excellence ; - Intervenir précocement auprès des enfants présentant des différences de développement, afin de limiter le sur-handicap ; - Rattraper notre retard en matière de scolarisation ; - Soutenir la pleine citoyenneté des adultes ; - Soutenir les familles et reconnaitre leur expertise. Des mesures spécifiques ont été annoncées dans la stratégie pour répondre aux défis soulevés et permettre ainsi de combler les carences en matière de prise en charge et d'accompagnement de l'autisme. Ainsi, la première ambition de la stratégie nationale a été intitulée « construire une société inclusive pour toutes les personnes autistes à tous les âges de leurs vie ». La stratégie nationale prévoit des mesures concrètes pour renforcer le diagnostic et les interventions précoces à destination des enfants et améliorer le diagnostic des adultes autistes. Pour ce qui concerne les enfants, un parcours de bilan et d'intervention précoce pour les enfants de 0 à 7 ans, présentant des troubles du neuro-développement (TND) a été mis en place dès 2019 à travers la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. L'objectif est d'accélérer l'accès à un diagnostic, favoriser des interventions précoces et ainsi répondre aux problèmes d'errance diagnostique et de sur-handicaps. Le parcours se structure autour de « plateformes d'intervention précoce » qui remplissent des missions d'orientation des familles et de coordination des acteurs. Elles proposent aux enfants des bilans et des interventions précoces, sans attendre le diagnostic, notamment, en orientant vers des professionnels libéraux (ergothérapeutes, psychomoteurs et psychologues) avec lesquels elles ont passé une convention. Le premier rendez-vous avec un professionnel contribuant au diagnostic est d'au plus 3 mois, après validation de la prescription médicale initiale par un médecin de la plateforme. Ces libéraux sont financés par l'assurance maladie pour supprimer le reste à charge pour les familles. Le parcours peut ainsi inclure les prestations suivantes : - Pour les ergothérapeutes : une évaluation pour déterminer les besoins des enfants dans la réalisation des activités de la vie quotidienne en lien avec leur développement sensori-moteur, sensoriel et cognitif et, si nécessaire, des interventions pour répondre aux besoins ainsi constatés et agir sur l'environnement des enfants ; - Pour les psychomotriciens : un bilan psychomoteur comportant, notamment, un examen du développement sensorimoteur et neuro-moteur, et, si nécessaire, des interventions relatives aux perturbations constatées ; - Pour les psychologues : d'une part une évaluation qualitative et quantitative des compétences développementales de l'enfant et, si nécessaire, des tests neuropsychologiques complémentaires ciblant des secteurs spécifiques du développement cognitif et socio-communicationnel, d'autre part, pour les psychologues qui détiennent une expertise spécifique définie par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, des interventions précoces en lien avec l'ensemble des évaluations fonctionnelles disponibles. Des forfaits ont été déterminés pour la rétribution de ces prestations qui sont prises en charge pendant le parcours, d'une durée maximale d'un an voire un an et demi, jusqu'à la date des décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Fin 2020, plus de 50 plateformes ont été créées, couvrant quasiment l'ensemble des régions. Près de 100 plateformes couvriront la totalité du territoire national à la fin 2021. En outre, une extension du forfait d'intervention précoce aux enfants âgés de 7 à 12 ans, annoncée par le président de la République à l'occasion de la conférence nationale du handicap (CNH) du 11 février 2020, est en cours de réalisation. Ces mesures complètent ainsi l'action de repérage, de diagnostic et de prise en charge précoce des enfants en situation de handicap d'autres structures et, notamment, des centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP). Par ailleurs, d'autres mesures prévues par la stratégie nationale autisme sont destinées à permettre l'amélioration de l'accompagnement proposé aux enfants et à leur garantir un parcours scolaire fluide et adapté à leurs besoins. Différentes modalités de scolarisation des enfants autistes sont en effet développées en coopération entre l'école et le secteur médico-social. En particulier seront créées 180 unités d'enseignement autisme en école maternelle (UEMA), 45 unités d'enseignement autisme en école élémentaire (UEEA) d'ici à 2022, ainsi que des unités locales pour l'inclusion scolaire (ULIS) en collèges et lycées appuyées par des services médico-sociaux. La conférence nationale du handicap du 11 février 2020 a été l'occasion d'annoncer un renforcement de cette coopération et l'ouverture supplémentaire d'UEEA et de dispositifs d'autorégulation. Le comité national de suivi de l'école inclusive de juin 2020 a été l'occasion de rappeler l'importance que les recteurs et directeurs généraux d'ARS organisent une programmation conjointe d'ouverture des unités d'enseignements et classes prévus par la stratégie, permettant de répondre aux besoins identifiés et d'utiliser efficacement les moyens médico-sociaux mobilisés pour accompagner la scolarisation en école ordinaire. Pour la rentrée 2020, l'objectif initial d'ouvertures de nouveaux dispositifs a été dépassé de plusieurs unités. Pour ce qui concerne les adultes, il a été demandé aux agences régionales de santé (ARS) d'engager, en lien avec les centres ressource autisme (CRA), un plan de repérage et de diagnostic des adultes, en particulier au sein des établissements et des services médico-sociaux (ESMS) et des établissements publics de santé mentale (EPSM). Au regard des enjeux de repositionnement stratégique et d'amélioration du fonctionnement interne des CRA, la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) a mené en 2019 une mission d'appui ciblée sur l'identification des causes et leviers d'actions susceptibles de réduire les délais d'accès à un diagnostic dans les CRA. Le rapport de la DITP identifie des mesures visant à la fois l'optimisation interne de l'organisation des CRA, leur concours au maillage territorial des compétences et la mise en place d'un plan de résorption des demandes de diagnostic dans les CRA. Les plans d'actions présentés par les CRA pour la réduction des listes d'attente, ciblés sur l'année 2020, sont financés à hauteur de 8,32 M€. Il s'agit ensuite d'accompagner l'autonomie des adultes autistes. Des mesures ont été prises afin de diversifier les solutions de logement inclusif. Ainsi, la loi ELAN définit la notion d'habitat inclusif et crée un forfait pour l'habitat inclusif, généralise la possibilité de colocation dans le parc social, qui peut, notamment, profiter aux personnes autistes. Au total, sur l'ensemble de la stratégie, 6 M€ sont prévus pour le développement de l'habitat inclusif pour les personnes autistes, dont 2 M€ en 2019. Les Agences régionales de santé sont chargées de structurer le maillage territorial, en fonction des besoins et des ressources locales. Les collectivités territoriales sont des partenaires essentiels dans la réussite de cette stratégie. Il est, notamment, demandé aux ARS de se coordonner avec les conseils départementaux pour accroître l'offre de services d'accompagnement médico-social d'adultes handicapés (SAMSAH) et pour les inciter à créer des places additionnelles en service d'accompagnement à la vie sociale (SAVS). Pour cela, le Gouvernement a déployé une enveloppe de 40 millions d'euros. La stratégie nationale prévoit également le renforcement de l'insertion des personnes autistes en milieu professionnel. Les crédits de l'emploi accompagné ont été doublés depuis le début de la stratégie et le développement des dispositifs « d'ESAT hors les murs » a été renforcé pour soutenir la mise en situation professionnelle en milieu ordinaire et l'accès à l'emploi des personnes. La stratégie nationale pour l'autisme au sein des troubles du neuro-développement poursuit, ainsi, sa mise en œuvre en faveur du diagnostic et du repérage dès le plus jeune âge et de la qualité des soins et des accompagnements donnés aux personnes autistes dans l'ensemble des aspects de leur vie.