15ème législature

Question N° 25924
de Mme Émilie Cariou (La République en Marche - Meuse )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Dépenses de gestion - Déchets - Évaluation et provisionnement

Question publiée au JO le : 21/01/2020 page : 353
Réponse publiée au JO le : 04/02/2020 page : 915
Date de changement d'attribution: 28/01/2020

Texte de la question

Mme Émilie Cariou interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur l'évaluation et le provisionnement des dépenses de gestion de l'ensemble des déchets radioactifs. Le projet de Centre industriel de stockage géologique (CIGEO) est, comme le rappelle en juillet 2019 la Cour des comptes, le « principal poste des coûts futurs de gestion des déchets nucléaires » (Cour des comptes, Rapport public thématique sur l'aval du cycle du combustible nucléaire, juillet 2019). Il appelle donc une vigilance particulière du législateur sur l'évaluation financière de ce projet et sa réalisation le cas échéant : « le chiffrage d'un montant précis est nécessaire car il permet de fixer les montants financiers à provisionner par les exploitants nucléaires pour faire face à ces coûts futurs (charges et provisions, sécurisées par des actifs dédiés) ». Les exploitants nucléaires (principalement EDF) ont évalué le coût du projet à 19,2 milliards d'euros quand l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) l'estimait à 34,5 milliards d'euros (révisé par la suite à 30 milliards d'euros - 2012). En 2016, le coût du projet a finalement été fixé en 2016 à 25 milliards d'euros par arrêté. Toutefois le chiffrage d'un montant précis, actualisé et réaliste est primordial car il permet de fixer les montants financiers à provisionner par les exploitants nucléaires pour faire face à ces coûts futurs (charges et provisions, sécurisées par des actifs dédiés). En effet, l'augmentation de 1 milliard d'euros du devis de CIGEO aurait un impact de 300 millions d'euros sur les provisions et actifs dédiés d'EDF et d'environ 25 millions d'euros pour Orano. Comme le souligne la Cour des comptes, les exploitants sont soumis au contrôle a posteriori de l'autorité administrative formée conjointement par les ministres chargés de l'économie et de l'énergie. Ainsi, elle souhaite l'interroger sur les montants immobilisés par les exploitants, afin de savoir si ces montants ont été récemment actualisés et sont aujourd'hui immédiatement mobilisables.

Texte de la réponse

Le Code de l'environnement met à la charge des producteurs de déchets radioactifs (EDF, Orano et CEA), le financement du projet Cigéo, tandis que la maîtrise d'ouvrage en est confiée à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra). L'évaluation de coût relève d'un processus précis. Le Code de l'environnement prévoit ainsi que l'Andra propose au Ministre chargé de l'énergie une évaluation des coûts afférents à la mise en œuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs de haute et de moyenne activité à vie longue selon leur nature. Après avoir recueilli les observations des producteurs de déchets et l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, le Ministre chargé de l'énergie arrête l'évaluation de ces coûts et la rend publique. Conformément à ces dispositions, l'Andra a remis en octobre 2014 au ministère une évaluation des coûts du projet Cigéo. L'ASN et la Commission nationale d'évaluation (CNE) ont rendu leur avis sur le dossier d'évaluation de l'Andra. Les principaux producteurs de déchets radioactifs (Orano, le CEA et EDF) ont également émis des observations sur ce dossier. À l'issue de ce processus, qui a duré près de 3 ans, le ministère a fixé par arrêté un coût à 25 milliards d'euros pour la période 2016-2156 aux conditions économiques du 31 décembre 2011. Il s'agit d'un coût-objectif qui intègre des incertitudes intrinsèques compte-tenu notamment de la période d'exploitation extrêmement longue de Cigéo (140 ans). Ce coût a vocation à être réévalué aux grandes étapes du projet et prochainement au dépôt de la demande d'autorisation de création, envisagé par l'Andra courant 2020. Conformément aux dispositions de l'article L. 542-12 du code de l'environnement, cette évaluation fera l'objet d'un examen critique de la part des services du ministère et sera soumise pour avis aux présidents des commissions parlementaires compétentes en matière de finances, d'énergie et de développement durable. Après avoir recueilli les observations des producteurs de déchets et l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, le ministre chargé de l'énergie arrêtera l'évaluation de ce coût et la rendra publique. S'agissant des provisions et des actifs dédiés, conformément à l'article L. 594-1 du code de l'environnement, les exploitants doivent évaluer, de manière prudente, les charges de démantèlement de leurs installations, de gestion de leurs combustibles usés et déchets radioactifs et les charges de transport hors site. L'article L. 594-2 prévoit que les exploitants constituent les provisions correspondant à ces charges et affectent, à titre exclusif, les actifs nécessaires pour couvrir ces provisions (les « actifs dédiés »). Ces actifs dédiés sont inscrits au bilan de l'exploitant et gérés par lui (fonds internes), mais sont légalement séparés du reste du bilan (cantonnement légal) : ils ne peuvent être utilisés que pour le règlement des charges nucléaires de long terme, même en cas de difficultés financières de l'exploitant. De plus, les actifs dédiés doivent présenter : - des niveaux de sécurité, de liquidité et de diversification appropriés au regard de l'échéancier des dépenses et qui doivent en tout état de cause respecter les dispositions des articles 4 et 5 du décret n° 2007-243 du 23 février 2007 relatif à la sécurisation du financement des charges nucléaires ; - des rendements suffisants pour couvrir les charges de désactualisation des provisions. Au 30 juin 2019, le montant des provisions constituées par les exploitants s'élevaient à environ 54 milliards d'euros. La valeur des portefeuilles d'actifs dédiés constitués par les exploitants au 30 juin 2019 atteignait environ 55 milliards d'euros, mobilisables par les exploitants exclusivement pour le financement des charges nucléaires de long terme. Les exploitants actualisent leurs provisions tous les ans et l'autorité administrative en est informée annuellement par un rapport triennal ou une note d'actualisation, comme prévu par l'article L. 594-4. L'autorité administrative reçoit également un suivi trimestriel des portefeuilles d'actifs dédiés constitués par les différents exploitants. Les portefeuilles d'actifs dédiés constitués par les exploitants comprennent principalement des actions et des obligations et sont gérés avec un degré de sécurité et de liquidité suffisant. En particulier, ils respectent les exigences réglementaires susmentionnées.