Réhabilitation de la masse d'eau de l'étang de Berre
Question de :
M. Pierre Dharréville
Bouches-du-Rhône (13e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Pierre Dharréville appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire sur la réhabilitation de l'étang de Berre. Cette exigence largement partagée est, aujourd'hui, renforcée par la démarche pour le classement de l'étang de Berre au patrimoine de l'Unesco engagée par le maire de Martigues et soutenue par de nombreux élus et personnalités. Depuis les années 2000, le groupement d'intérêt public pour la réhabilitation de l'étang de Berre (GIPREB) qui associe les collectivités riveraines de l'étang de Berre, réalise un travail important de valorisation : études scientifiques, études sur les possibilités techniques d'aménagements, actions en faveur de l'épuration des effluents, concertation avec le tissu associatif... Il a ainsi contribué à la prise de conscience des enjeux par l'opinion publique comme par les pouvoirs publics et les industriels ainsi qu'à la recherche de solutions et à la mise en œuvre d'actions. Les différents plans de réduction des rejets erratiques de la Durance ont montré la capacité de résilience des milieux naturels. L'étang a retrouvé un seuil de décence minimum mais l'on ne saurait s'en satisfaire. De plus, la perspective d'une privatisation des centrales hydroélectriques menace le fragile équilibre de la gestion des cours d'eau. Or l'engagement de l'État est incontournable pour atteindre l'objectif fixé : répondre aux besoins du territoire tout en soignant l'éco-système. Depuis des décennies, la réouverture du tunnel du Rove est évoquée pour faciliter la circulation d'eau entre la mer et l'étang. Il a par ailleurs été établi que la réalisation d'une dérivation des eaux de Durance après Salon-de-Provence aurait quant à elle des effets considérables. Cela permettrait de surcroît d'utiliser pleinement le potentiel de la chaîne hydroélectrique Durance-Verdon, d'optimiser l'approvisionnement en eau brute de qualité pour les villes et industries de la basse Provence et de libérer le potentiel nature et tourisme de proximité de l'étang de Berre lui-même. La mise en œuvre de cette solution demande un investissement financier de la part de l'aménageur historique, EDF, le tout dans un contexte de renchérissement du prix de vente du Kw/h et de taux d'emprunt historiquement bas. Il souhaite connaître les intentions du Gouvernement, en faveur de la promotion et de la valorisation de l'étang de Berre, dont la situation appelle réparation. Il lui demande d'initier une concertation afin d'agir dans les meilleurs délais. Il sollicite enfin son engagement en faveur du classement au patrimoine classé par l'UNESCO.
Réponse publiée le 17 avril 2018
La Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel de 1972 vise à identifier et protéger les sites comme étant de « valeur universelle exceptionnelle », c'est-à-dire d'une importance culturelle ou naturelle tellement exceptionnelle qu'elle transcende les frontières nationales et qu'elle présente le même caractère inestimable pour les générations actuelles et futures de l'ensemble de l'humanité. La Convention n'est donc pas conçue pour assurer la protection de tout le patrimoine culturel et naturel, mais seulement des éléments les plus remarquables dans une approche globale et universelle. À ce jour, la France compte 43 biens inscrits sur la Liste du patrimoine mondial, dont 39 culturels, 3 naturels et 1 mixte. Le nombre de candidatures déposées est désormais limité à 1 par pays par an. La procédure d'inscription sur la liste du patrimoine mondial est une démarche longue (en moyenne entre 7 et 10 ans de préparation) et exigeante. Les candidatures font l'objet d'une procédure d'évaluation nationale avant leur dépôt auprès du Centre du patrimoine mondial de l'UNESCO. Une étape préalable consiste en l'inscription sur la « liste indicative » nationale, qui comporte aujourd'hui pas moins de 38 sites. L'UNESCO a aujourd'hui un très haut niveau d'exigence, tant dans la qualité de l'argumentation concernant la valeur universelle exceptionnelle (VUE) du futur bien, que dans la qualité de celui-ci, sa gouvernance et sa gestion. Les sites fortement modifiés par les activités économiques présentent des difficultés spécifiques, en particulier pour les candidatures de biens naturels ou mixtes, ou les paysages culturels. En son temps, le classement du Val de Loire a été différé pour approfondir la question des centrales nucléaires et savoir s'il convenait de les placer dans ou hors périmètre, et leurs effets sur la VUE. Certaines activités comme l'exploitation de carrières, les projets de prospection et d'exploitation minières, pétrolières ou gazières, sont jugées incompatibles avec l'inscription sur la Liste du patrimoine mondial naturel. Ces questions seront à approfondir pour l'étang de Berre, préalablement au lancement d'une démarche de candidature. Les services du ministère sont à disposition pour contribuer à ces réflexions sur l'opportunité et la faisabilité d'une candidature au patrimoine mondial ou de tout autre type de reconnaissance pour le territoire. Par ailleurs, s'agissant de la déviation de la Durance, dont la centrale hydroélectrique de Saint-Chamas constitue la partie terminale, elle joue des rôles multiples dont le transfert d'eau pour l'agriculture et l'alimentation en eau potable pour toute la Provence. L'éventualité d'une évolution de cette situation à l'issue de la concession fin 2051, ou avant, pose des questions délicates de répercussions notamment financières sur l'ensemble des usagers et sur l'équilibre économique qui avaient déjà fait l'objet d'un contentieux lors de la modification des conditions de turbinage pour limiter les apports d'eau douce dans l'étang de Berre. Les modifications apportées au fonctionnement de la dérivation (bassin de délimonage, réduction importante des volumes turbinés) ont contribué à une amélioration lente de la situation de l'Étang, de même que les efforts importants de traitement des eaux industrielles et urbaines. Les rejets de temps de pluie ont encore des effets très négatifs et doivent être réduits. En tout état de cause, le Conseil scientifique du Comité de bassin Rhône-Méditerranéen est très dubitatif sur le fait qu'un arrêt des apports d'eau douce serait décisif dans la restauration de l'étang. La mise en place d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) pourrait être l'occasion d'une approche globale préparant l'après concession.
Auteur : M. Pierre Dharréville
Type de question : Question écrite
Rubrique : Cours d'eau, étangs et lacs
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Dates :
Question publiée le 7 novembre 2017
Réponse publiée le 17 avril 2018