15ème législature

Question N° 26742
de M. Christophe Blanchet (La République en Marche - Calvados )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Armées

Rubrique > marchés publics

Titre > Conséquences du Brexit sur les contrats conclus avec les acheteurs publics

Question publiée au JO le : 18/02/2020 page : 1147
Réponse publiée au JO le : 11/08/2020 page : 5429
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de renouvellement: 16/06/2020

Texte de la question

M. Christophe Blanchet alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences du « Brexit » sur les marchés publics, et plus particulièrement les marchés publics de défense passés par les acheteurs publics avec des entreprises britanniques. Les articles L. 2353-1, R. 2342-7 et R. 2342-8 du code de la commande publique instaurent un principe de préférence européenne. Or, avec l'effectivité du « Brexit », de nombreuses sociétés britanniques se retrouvent fournir les institutions nationales et européennes, y compris en matériels et services de défense, alors même qu'elles ont perdu la qualité d'opérateur économique ressortissant de l'Union européenne (UE) ou de l'Espace économique européen (EEE). Dans ces conditions, l'acheteur public se trouve de fait contractuellement lié à un fournisseur sur lequel il ne dispose plus des leviers de contrôle et de sanction résultant du droit européen. Il lui demande si le Gouvernement envisage de communiquer sur cet état de fait auprès des acheteurs publics nationaux et européens, voire auprès des fournisseurs français.

Texte de la réponse

Il convient de distinguer plusieurs cas de figure s'agissant du processus de retrait britannique. Depuis l'adoption de l'accord de retrait, la situation des co-contractants britanniques du ministère des armées est inchangée tant que dure la période transitoire. En effet, l'accord de retrait avalisé par la partie britannique et l'Union européenne (UE) a été adopté ; les négociations devraient se poursuivre jusqu'au 31 décembre 2020, le temps de régler les conditions définitives du Brexit et d'organiser les relations commerciales futures. Pendant cette période de transition, l'UE traite le Royaume-Uni comme s'il s'agissait d'un État membre. Le Royaume-Uni conserve tous ses droits d'accès au marché unique européen et continue d'appliquer l'ensemble du droit européen, y compris les nouvelles règles adoptées par l'UE. Il ne pourrait donc pas signer d'accord de libre-échange avec des Etats tiers. En cas d'accord des deux parties, cette période de transition pourrait être prolongée une fois, pour une durée maximum de deux ans, comme l'ont décidé les négociateurs du Brexit le 22 novembre 2018 à Bruxelles, soit au plus tard jusqu'au 31 décembre 2022. En revanche, en cas de Brexit sans accord, le Royaume-Uni deviendra un Etat tiers à l'Union. Cependant, il convient de souligner que la perte par les entreprises britanniques de leur qualité de ressortissantes de l'Union européenne serait en tout état de cause sans incidence sur les marchés de défense et de sécurité (MPDS) en cours d'exécution. En transposant la directive 2009/81/CE qui encadre la procédure de passation des marchés publics de défense et de sécurité, la France a fait usage de la faculté ouverte par ce texte aux Etats membres d'introduire un principe de préférence européenne, qui repose aujourd'hui notamment sur les dispositions de l'article L.2353-1 du code de la commande publique. Le ministère des armées limite ainsi systématiquement l'ouverture des procédures de passation de ses marchés aux entreprises ressortissantes d'un Etat membre de l'UE ou de l'espace économique européen, à la seule exception du cas où aucune entreprise européenne ne dispose du savoir-faire nécessaire pour répondre au besoin qui fait l'objet du marché. Ces marchés sont conclus en vertu du droit français, dont le code de la commande publique transpose le droit de l'Union européenne dans son volet particulier relatif aux MPDS. Dès lors en vertu du droit interne français, les acheteurs publics français disposent de tous les recours de droit commun devant le juge français contre leurs co-contractants britanniques en cas de manquement de ces derniers à leurs obligations contractuelles. La circonstance que le Royaume-Uni dans lequel se situe leur siège social ne soit plus, à court ou moyenne échéance, selon l'échelonnement du retrait associé aux hypothèses d'un Brexit avec ou sans accord, membre de l'UE est indifférente et ne saurait valablement autoriser une entreprise britannique à méconnaître ses obligations contractuelles. La validité juridique des contrats de droit interne français ne sera pas affectée par le retrait britannique de l'Union européenne. Enfin, en l'état du droit applicable, il n'est aujourd'hui pas possible d'écarter une offre britannique au seul motif de la perspective du Brexit. Il s'agirait d'une décision contraire aux principes de la commande publique, passible d'annulation par le juge de la passation des contrats MPDS. De nombreuses réunions interministérielles ont été organisées afin de permettre à tous les acteurs économiques de se préparer au Brexit. Le ministère chargé des finances a, à cet effet, diffusé des fiches techniques à l'attention des entreprises commerçant avec le Royaume-Uni afin de leur permettre de se préparer à cette échéance. Une information en ligne très complète et des propositions d'autodiagnostic sont proposées. Les difficultés générées par la sortie effective des britanniques seront traitées au cas par cas et avec souplesse, si nécessaire via des avenants. Cela vise notamment à éviter toute perturbation du déroulement des opérations d'armement, nécessaires à la remontée en puissance de nos armées, voulue par le Président de la République et prévue dans la loi de programmation militaire 2019-2025.