15ème législature

Question N° 26789
de M. Jean-Marc Zulesi (La République en Marche - Bouches-du-Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > sang et organes humains

Titre > Don du sang rémunéré

Question publiée au JO le : 18/02/2020 page : 1181
Réponse publiée au JO le : 01/12/2020 page : 8794
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. Jean-Marc Zulesi interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'avenir de la gratuité du don de sang. En effet, dans un récent rapport, la Cour des comptes a avancé plusieurs recommandations pour résoudre la diminution des dons de sang et pallier les difficultés auxquelles l'Établissement français du sang (EFS) est confronté. Parmi ces recommandations figure une indemnisation systématique des donneurs, de plasma notamment. Si l'idée peut séduire au vu des enjeux présents, en ce qu'elle incitera les citoyens à participer davantage aux collectes, plusieurs questionnements subsistent. En outre, une « indemnisation » ou « rémunération » des donneurs de sang pourrait requalifier l'action de « don » en « vente » en ce que le sang ou le plasma serait cédé par le donneur à l'EFS en contrepartie d'une somme d'argent. Or la marchandisation du corps est contraire au principe d'indisponibilité du corps humain et à l'article 16-6 du code civil qui dispose qu' « aucune rémunération ne peut être allouée à celui qui se prête au prélèvement d'éléments de son corps ou à la collecte de produits de celui-ci. ». La législation consacre ici l'importance du don gratuit. Le fait de monnayer les dons a des répercussions sociales importantes dont l'affaiblissement de la sécurité des donneurs et des malades et l'accroissement des inégalités. En effet, les personnes moins favorisées seraient plus enclines à donner leur sang car motivées par la somme allouée. Selon l'ESF « le donneur de sang rémunéré peut lui, avoir besoin d'argent et être doublement tenté. Tenté, d'abord de dissimuler au médecin qui décide de son aptitude au don son véritable état de santé, dans l'unique but d'être payé ». La surreprésentation de personnes économiquement vulnérables et éloignées des systèmes de soins accroît les risques en termes de santé. Fort de ces constats, de nombreux organismes tels que l'Organisation mondiale de la santé, l'EFS, le Conseil de l'Europe, la Croix-Rouge, le Croissant-Rouge et les associations pour le don du sang bénévole, militent pour la préservation et la généralisation du don volontaire et gratuit. Aussi, il souhaiterait savoir quelle est la position du Gouvernement sur le futur de la gratuité des dons de sang et les mesures qu'il entend prendre pour prévenir tout type de dérives.

Texte de la réponse

La Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2019 sur la filière du sang en France, préconise l'indemnisation systématique du don de plasma par aphérèse et le relèvement du plafond d'indemnisation des donneurs. La gratuité du don d'éléments et produits du corps humain relève des grands principes qui structurent le cadre bioéthique français, elle est inscrite à l'article 16-6 du code civil, qui dispose « qu'aucune rémunération ne peut être allouée à celui qui se prête à une expérimentation sur sa personne, au prélèvement d'éléments de son corps ou à la collecte des produits de celui-ci ». Le principe de non patrimonialité du corps humain, allant de pair avec celui de la dignité humaine a été réaffirmé à maintes reprises par la jurisprudence. Le ministère des solidarités et de la santé est très attaché au maintien de l'éthique du don, à savoir le volontariat, l'anonymat et l'absence de profit. Ces principes sont très fortement ancrés chez les donneurs bénévoles, et fondent leur engagement individuel au profit de la communauté. La préservation de ce modèle éthique conduit à écarter la possibilité visant à rémunérer le donneur de produit ou élément du corps humain. Par ailleurs, le principe de gratuité du don, en garantissant le désintérêt du don, participe à la sécurité des donneurs et des malades puisque le donneur n'a aucun intérêt à cacher son aptitude au don au médecin. En revanche, il existe d'ores et déjà un dédommagement des donneurs pour les éventuels frais exposés pour le trajet ou le temps passé, notamment dans le cadre de la procédure d'aphérèse. C'est ce modèle éthique qui sera défendu par les autorités françaises devant la Commission européenne qui conduit actuellement une évaluation des directives européennes sur le sang. Par ailleurs, afin de garantir l'autosuffisance en produits sanguins labiles, des campagnes de promotion du don sont organisées par l'Etablissement français du sang pour inciter au don civique. Il existe également une journée mondiale des donneurs de sang, le 14 juin, permettant de sensibiliser la population au don du sang et qui mobilise beaucoup de donneurs.