15ème législature

Question N° 27074
de M. Jacques Cattin (Les Républicains - Haut-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > bois et forêts

Titre > Bûcheronnage débardage : retraite anticipée

Question publiée au JO le : 03/03/2020 page : 1596
Réponse publiée au JO le : 15/12/2020 page : 9186
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de renouvellement: 21/07/2020
Date de renouvellement: 03/11/2020

Texte de la question

M. Jacques Cattin appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la reconnaissance des spécificités du métier de bûcheron. Les bûcherons sylviculteurs et débardeurs, qu'ils soient collaborateurs de l'Office national des forêts, salariés communaux d'un syndicat intercommunal à vocation unique, ou employés d'une entreprise de travaux forestiers, représentent un total de 10 000 personnes, soit environ 2 % de l'ensemble des salariés agricoles. Cette masse salariale correspond pourtant à 12 % des accidents mortels constatés dans le salariat agricole, ce qui laisse entrevoir la statistique glaçante d'un bûcheron sylviculteur sur vingt décédé au travail, avant d'atteindre la retraite. Outre le fait qu'il s'agisse d'un métier à très haut risque, le bûcheronnage débardage est également très pénible et s'exerce dans des conditions extrêmement rudes (contraintes posturales et articulaires, terrains difficiles, usage de matériels lourds, vibrants et bruyants, risques infectieux liés aux tiques, etc.). L'usure à la tâche explique le fait que l'inaptitude au travail en forêt se constate en moyenne dès l'âge de 52,5 ans et que l'espérance de vie pour la profession est de 62,5 ans. Au vu de ces chiffres éloquents, et considérant le rôle majeur joué par cette profession dans la gestion des forêts (pour une transition écologique réussie), dans les cas où la mécanisation ne peut lui être substituée, il lui demande si le Gouvernement entend intégrer le bûcheronnage débardage dans la liste des exceptions au projet de loi instituant un système universel de retraite ou, pour le moins, envisage de prévoir une cessation anticipée d'activité pour ce métier, au pro rata des années d'exercice.

Texte de la réponse

L'amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs en forêt, qu'ils soient salariés ou indépendants, constitue une préoccupation essentielle du ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Si l'accidentologie sur les chantiers forestiers ou sylvicoles a considérablement baissé au cours de ces vingt dernières années en raison notamment des progrès de la mécanisation de l'abattage et de la sécurisation des machines forestières, la sylviculture et l'exploitation forestière restent deux activités parmi les plus dangereuses du monde du travail. Les accidents mortels les plus fréquents surviennent en activité de bûcheronnage manuel (avec une scie à chaîne ou tronçonneuse). Ces dernières années le nombre de décès suite à un accident du travail survenu en forêt a été compris entre 10 et 20 par an. Ainsi en 2019, 18 accidents mortels (hors accidents de trajet) ont été recensés dont ont été victimes respectivement 12 salariés (dont un mineur) et 6 travailleurs indépendants. C'est la raison pour laquelle la réglementation sur la sécurité des travaux forestiers a été récemment renforcée. La loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système des retraites a mis en place un compte personnel de prévention de la pénibilité, devenu compte professionnel de prévention (C2P) en application de l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017. Le C2P permet à tout salarié relevant du régime général ou du régime agricole et exposé à des facteurs de pénibilité dans le cadre de son activité professionnelle, d'accumuler des points qui pourront être convertis en périodes de formation, en temps partiel avec maintien de la rémunération ou en majoration de la durée d'assurance permettant de partir plus tôt à la retraite. Le financement du C2P relève de la branche accident du travail-maladies professionnelles (ATMP), au moyen d'une majoration du taux de cotisation ATMP des entreprises. Les bûcherons ayant le statut de salarié bénéficient donc de ce dispositif. En revanche, ce dispositif ne s'applique pas aux personnes qui relèvent du régime des non-salariés agricoles. S'agissant de la prise en compte de la pénibilité en matière de retraite, la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 a prévu un dispositif de compensation de la pénibilité qui ouvre un droit à retraite anticipée pour les personnes justifiant d'un taux d'incapacité permanente reconnue au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle. En application de ce dispositif, peuvent notamment bénéficier d'une retraite à taux plein dès l'âge de soixante ans, les salariés et les non-salariés agricoles justifiant d'un taux d'incapacité permanente au moins égal à 20 % ainsi que, après avis d'une commission pluridisciplinaire et sous réserve d'une certaine durée d'exposition, ceux d'entre eux qui justifient d'un taux d'incapacité permanente compris entre 10 et 20 %. L'ordonnance du 22 septembre 2017 précitée a aménagé ce dispositif de retraite anticipée au titre de la pénibilité. Ont été ainsi supprimés la condition de durée minimale d'exposition ainsi que l'avis de la commission pluridisciplinaire pour les personnes qui justifient, sous certaines conditions, d'un taux d'incapacité permanente dont le taux est au moins égal à 10 % et inférieur à 20 %, au titre d'une maladie professionnelle causée par des agents chimiques dangereux, des postures pénibles, des vibrations mécaniques et/ou la manutention manuelle de charges. Ces dispositions sont applicables aux salariés et aux non-salariés agricoles. En tout état de cause, depuis le début de cette mandature, le Gouvernement a engagé une réforme profonde des retraites. Cette réforme des retraites portée par le projet de loi instituant un système universel de retraite a été suspendue pendant la période d'urgence sanitaire. La réflexion globale qui a été initiée sur l'avenir des régimes de retraite sera l'occasion de définir, dans le cadre d'un système plus équitable, la place que l'on souhaite accorder aux dispositifs de compensation de la pénibilité dans la constitution des droits à retraite.