15ème législature

Question N° 27287
de M. Christophe Blanchet (La République en Marche - Calvados )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie, finances et relance

Rubrique > commerce et artisanat

Titre > Mesure des pertes fiscales dues à la contrefaçon en 2019

Question publiée au JO le : 10/03/2020 page : 1809
Réponse publiée au JO le : 29/09/2020 page : 6676
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de renouvellement: 16/06/2020
Date de renouvellement: 22/09/2020

Texte de la question

M. Christophe Blanchet alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la contrefaçon en France et sur les effets économiques de ce phénomène. La Cour des comptes a récemment publié un rapport sur les contrefaçons, faisant de nombreux constats et portant plusieurs propositions. Parmi ces constats, la Cour souligne l'absence d'études sur le sujet, alors que de nombreux facteurs mondiaux favorisent pourtant le développement de la contrefaçon. Souvent considérée à tort comme une fraude sans victime, ses multiples effets dommageables et son ampleur font généralement l'état de peu de recherches et sont souvent sous-estimés. Une meilleure mesure du phénomène et de ses impacts apparaît donc comme un préalable nécessaire pour agir efficacement et mieux sensibiliser l'ensemble des acteurs concernés. Il lui demande si le Gouvernement compte établir des statistiques annuelles qui permettraient d'estimer l'ampleur du phénomène et à combien le Gouvernement estime les pertes fiscales dues à la contrefaçon pour l'État français sur l'année 2019.

Texte de la réponse

Dans son rapport de février 2020, « La lutte contre les contrefaçons : une organisation et des outils pour mieux protéger les consommateurs et les droits de propriété industrielle », la Cour des comptes dresse la liste des risques auxquels les contrefaçons exposent les consommateurs, les entreprises et les États et émet une série de recommandations afin d'améliorer et renforcer cette lutte. L'auteur de la question appelle en particulier l'attention du Gouvernement sur le manque, relevé par la Cour, de vision partagée des acteurs à partir des données relatives à l'ampleur et à l'évolution de la contrefaçon. L'administration des douanes, dont la lutte contre les contrefaçons constitue l'une des missions prioritaires, est en première ligne sur ce sujet puisqu'elle réalise environ 80 % des interceptions de contrefaçons réalisées par l'ensemble des administrations répressives sur le territoire national, tant à l'importation que sur le marché intérieur. En premier lieu, les saisies de contrefaçons constituent un élément central du rapport annuel de performance de la douane aux côtés des saisies de tabac et de stupéfiants. Pour ce faire, des indicateurs de performance dédiés ont été mis en place afin de mesurer le nombre de retenues effectuées tant sur la base du règlement communautaire que du code national de la propriété intellectuelle. Ces chiffres font l'objet d'une communication dans le cadre du rapport annuel d'activité douanier. Ils nourrissent également les analyses de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) qui diffuse ces informations auprès de l'ensemble des services douaniers de contrôles et d'enquêtes afin de mutualiser les constatations. En second lieu, ces chiffres servent à alimenter les bilans européens en matière de lutte contre les contrefaçons au sein desquels les rapports de la douane française occupent une place majeure. Sur la base de ces données communiquées chaque année par la France, la Commission européenne (DG TAXUD) et l'Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle dépendant de l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) disposent d'une vision globale du phénomène à l'échelle européenne. Cette connaissance a permis de publier en 2019 un rapport commun de l'Observatoire et de l'OCDE sur les tendances en matière de commercialisation de contrefaçons (modes de transports, de distribution, de production, etc) et, tout dernièrement en mars 2020, une étude sectorielle sur les contrefaçons de produits pharmaceutiques. L'administration des douanes française contribue ainsi activement à la fiabilisation et au partage de données afin que les instances communautaires, en premier lieu l'observatoire des atteintes à la propriété intellectuelle de l'EUIPO, ou internationales (OCDE) puissent produire leurs études et rapports. À cet égard, il convient de signaler que la Commission (DG TAXUD) devrait produire en 2020 un rapport coordonné avec l'Observatoire agrégeant pour la première fois les statistiques collectées par les services douaniers des États membres et les interceptions réalisées par les autorités en charge du contrôle du marché intérieur. Concernant les pertes fiscales dues à la contrefaçon pour l'État français sur l'année 2019, il est très difficile de mesurer l'impact de l'importation de contrefaçons sur les recettes fiscales de l'État. À la différence d'autres produits, comme la drogue par exemple qui empruntent des flux d'importation sans déclaration et une mise sur le marché hors des circuits licites, les produits contrefaisants font le plus souvent l'objet d'un processus déclaratif à l'importation dans le cadre du dédouanement par des sociétés régulièrement enregistrées. Ces opérateurs contribuent aux recettes fiscales de l'Union ou de l'État : droits de douanes, TICPE et TVA… Ces produits sont ensuite introduits dans les circuits de vente au détail par des commerçants légalement établis (hors vente à la sauvette), utilisant le commerce licite en couverture de leur activité d'écoulement de produits contrefaisants. A titre d'illustration, selon une enquête de l'Ifop réalisée en mai 2018 pour l'UNIFAB, parmi les 29 % des Français qui se sont déjà procurés de faux produits, près de quatre sur dix (37 %) ont acquis un produit de contrefaçon sur un réseau licite d'achats. Par ailleurs, les consommateurs qui achètent délibérément des produits contrefaisants hors des circuits légaux ne constituent pas une clientèle pour les marques. Ces produits, de mauvaise qualité et d'un prix très inférieur au produit réel, ne se substituent pas à l'offre de ces marques, même s'ils nuisent à leur image. Dès lors, cette catégorie de contrefaçon ne peut être incluse dans les prévisions de recettes fiscales inscrites dans les projets de lois de finances et reste hors champ de la fiscalité puisqu'elles sont introduites sur le marché français sans déclaration douanière, voire en contrebande.