15ème législature

Question N° 27339
de M. Dominique Potier (Socialistes et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie, finances et relance

Rubrique > industrie

Titre > Protection des actifs économiques et risques d'atteintes à la souveraineté

Question publiée au JO le : 10/03/2020 page : 1811
Réponse publiée au JO le : 08/09/2020 page : 5988
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de renouvellement: 28/07/2020

Texte de la question

Dans le contexte d'une possible ouverture du capital de Pont-à-Mousson SA à des investisseurs étrangers, M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la protection des actifs économiques qui concourent à la souveraineté française et européenne. Depuis dix ans, les rachats d'infrastructures et d'entreprises européennes stratégiques par des opérateurs chinois, en appui pour partie sur des fonds publics, ont mis en évidence une stratégie étatique globale de maîtrise des technologies émergentes au moyen notamment de prises de contrôles sur les « pépites » européennes. Dans les faits, on observe sur cette période que la part chinoise dans les entreprises européennes sous contrôle étranger a triplé, passant de 2,5 % à 9,5 % et que le nombre d'entreprises européennes contrôlées par la Chine (incluant Hong-Kong et Macao) est passé de 5 000 à 28 000. Dans ce contexte d'une compétition dont les acteurs étrangers sont parfois fortement soutenus par leurs gouvernements, l'adaptation de la politique de la concurrence et le renforcement des dispositifs de contrôle des investissements étrangers sont désormais indispensables sur les segments stratégiques en terme de souveraineté tels que la défense, la santé, le transport de l'eau, les terres agricoles, l'énergie, la mobilité ou encore les communications. Sur le plan concurrentiel, il s'agit de renforcer la position commerciale et donc, à terme, la valeur des entreprises françaises et européennes en valorisant leur niveau élevé de normes dans les domaines du travail, de la sécurité des consommateurs et de l'environnement. À titre d'exemple, dans le cas précis de Pont-à-Mousson SA, la mise en place d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières de l'Union européenne permettrait de repositionner favorablement sur le marché intérieur les offres de l'industriel français. Il serait également souhaitable que soient diffusées auprès des acheteurs publics les orientations de la Commission européenne en matière de réciprocité des échanges avec les pays tiers, leur permettant d'apprécier les conditions d'une concurrence équitable. Sur le plan des prises de contrôle, le renforcement acquis en 2019 du dispositif des investissements étrangers en France ainsi que la déclinaison à venir en 2020 dans les États-membres du dispositif de filtrage mis en place par l'Union européenne contribueront à sécuriser les actifs stratégiques nationaux et européens. La doctrine d'intervention de la BEI pourrait également être révisée afin qu'elle accompagne les entreprises stratégiques dans une logique de capitalisme du « temps long ». Cependant, ces évolutions, effectives ou à venir, restent, selon M. le député, lacunaires. En effet, à l'observation du cas de Pont-à-Mousson SA, le risque de la prise de contrôle par un tiers extra-européen ne tient que partiellement à l'acquisition de technologies émergentes ayant trait à l'adduction d'eau, à l'industrie nucléaire ou à la prise de parts de marchés publics : s'agissant du premier fournisseur de solutions de transport d'eau potable sur le territoire européen, une cession de capital entraînant une perte de contrôle au profit d'un acteur économique fortement adossé à un État-tiers constituerait une atteinte majeure à la souveraineté par l'insécurité générée en matière d'approvisionnement en fourniture des opérateurs publics et par la perte de connaissance sur les brevets et les architectures de réseau. Cette question, rendue particulièrement sensible par les tensions sur l'approvisionnement de l'Europe en produits pharmaceutiques que fait peser la menace d'une pandémie due au Covid-19, interroge sur la capacité même de l'Union européenne à être ou non une puissance effective dans la mondialisation au XXIe siècle. En conséquence, il l'interroge sur l'adéquation des dispositifs de protection des actifs économiques aux risques d'atteinte à la souveraineté nationale et européenne et, partant, sur les extensions ou renforcements à envisager à court terme.

Texte de la réponse

Dans le contexte d'une possible ouverture du capital de Pont-à-Mousson SA à des investisseurs étrangers, M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la protection des actifs économiques qui concourent à la souveraineté française et européenne. Depuis dix ans, les rachats d'infrastructures et d'entreprises européennes stratégiques par des opérateurs chinois, en appui pour partie sur des fonds publics, ont mis en évidence une stratégie étatique globale de maîtrise des technologies émergentes au moyen notamment de prises de contrôles sur les « pépites » européennes. Dans les faits, on observe sur cette période que la part chinoise dans les entreprises européennes sous contrôle étranger a triplé, passant de 2,5 % à 9,5 % et que le nombre d'entreprises européennes contrôlées par la Chine (incluant Hong-Kong et Macao) est passé de 5 000 à 28 000. Dans ce contexte d'une compétition dont les acteurs étrangers sont parfois fortement soutenus par leurs gouvernements, l'adaptation de la politique de la concurrence et le renforcement des dispositifs de contrôle des investissements étrangers sont désormais indispensables sur les segments stratégiques en terme de souveraineté tels que la défense, la santé, le transport de l'eau, les terres agricoles, l'énergie, la mobilité ou encore les communications. Sur le plan concurrentiel, il s'agit de renforcer la position commerciale et donc, à terme, la valeur des entreprises françaises et européennes en valorisant leur niveau élevé de normes dans les domaines du travail, de la sécurité des consommateurs et de l'environnement. À titre d'exemple, dans le cas précis de Pont-à-Mousson SA, la mise en place d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières de l'Union européenne permettrait de repositionner favorablement sur le marché intérieur les offres de l'industriel français. Il serait également souhaitable que soient diffusées auprès des acheteurs publics les orientations de la Commission européenne en matière de réciprocité des échanges avec les pays tiers, leur permettant d'apprécier les conditions d'une concurrence équitable. Sur le plan des prises de contrôle, le renforcement acquis en 2019 du dispositif des investissements étrangers en France ainsi que la déclinaison à venir en 2020 dans les États-membres du dispositif de filtrage mis en place par l'Union européenne contribueront à sécuriser les actifs stratégiques nationaux et européens. La doctrine d'intervention de la BEI pourrait également être révisée afin qu'elle accompagne les entreprises stratégiques dans une logique de capitalisme du « temps long ». Cependant, ces évolutions, effectives ou à venir, restent, selon M. le député, lacunaires. En effet, à l'observation du cas de Pont-à-Mousson SA, le risque de la prise de contrôle par un tiers extra-européen ne tient que partiellement à l'acquisition de technologies émergentes ayant trait à l'adduction d'eau, à l'industrie nucléaire ou à la prise de parts de marchés publics : s'agissant du premier fournisseur de solutions de transport d'eau potable sur le territoire européen, une cession de capital entraînant une perte de contrôle au profit d'un acteur économique fortement adossé à un État-tiers constituerait une atteinte majeure à la souveraineté par l'insécurité générée en matière d'approvisionnement en fourniture des opérateurs publics et par la perte de connaissance sur les brevets et les architectures de réseau. Cette question, rendue particulièrement sensible par les tensions sur l'approvisionnement de l'Europe en produits pharmaceutiques que fait peser la menace d'une pandémie due au Covid-19, interroge sur la capacité même de l'Union européenne à être ou non une puissance effective dans la mondialisation au XXIe siècle. En conséquence, il l'interroge sur l'adéquation des dispositifs de protection des actifs économiques aux risques d'atteinte à la souveraineté nationale et européenne et, partant, sur les extensions ou renforcements à envisager à court terme.