15ème législature

Question N° 27590
de M. Jean-Luc Lagleize (Mouvement Démocrate et apparentés - Haute-Garonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > sécurité des biens et des personnes

Titre > Numéro d'appel d'urgence unique en France

Question publiée au JO le : 17/03/2020 page : 2087
Réponse publiée au JO le : 08/09/2020 page : 6109
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de renouvellement: 23/06/2020

Texte de la question

M. Jean-Luc Lagleize interroge M. le ministre de l'intérieur sur la mise en place d'un numéro d'appel d'urgence unique en France. Les numéros d'appel d'urgence permettent de joindre gratuitement les secours 24h sur 24. Toutefois, les différents services d'urgence font face à deux défis majeurs. D'une part, trop d'abus ou d'appels mal orientés surchargent encore inutilement les lignes téléphoniques. À titre d'exemple, chaque année, près de 4 300 000 interventions sont réalisées par les sapeurs-pompiers, soit 11 700 interventions par jour. Quant au Service d'aide médicale urgente (SAMU), il reçoit près de 2 500 appels par jour. Ce nombre d'appels reçus ne correspond cependant pas forcément à des situations d'urgence, puisque dans plus de 30 % des cas, la réponse apportée consiste seulement en une information ou un conseil médical. D'autre part, de nombreux citoyens sont mal informés sur ces numéros d'appel d'urgence en raison de leur multiplicité. Or, un citoyen mieux informé aide les secours à intervenir dans de meilleures conditions et le plus rapidement possible. En France, outre les numéros spécifiques qui peuvent être mis à la disposition de la population par les pouvoirs publics en cas de crise pour obtenir des informations comportementales personnalisées sur la crise en cours, il n'existe pas moins de 13 numéros d'appel d'urgence. Le 112 est le numéro d'appel d'urgence européen unique, disponible gratuitement partout dans l'Union européenne. Le Danemark, la Finlande, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède et la Roumanie ont choisi le 112 comme principal numéro d'urgence national. Le 112 existe également dans certains pays en dehors de l'Union européenne (comme la Suisse et l'Afrique du Sud) et il est disponible dans le monde entier sur les réseaux mobiles de GSM. Le 15 permet de contacter le Service d'aide médicale urgente (SAMU) pour obtenir l'intervention d'une équipe médicale lors d'une situation de détresse vitale (besoin médical urgent, malaise, coma, hémorragie, douleur thoracique, difficultés respiratoires, intoxication, etc.) ainsi que pour être redirigé vers un organisme de permanence de soins (médecine générale, transport ambulancier, etc.). Le 17 permet de joindre la police nationale ou la gendarmerie nationale en cas de danger (violences, agression, vol, cambriolage, etc.), qui peuvent envoyer sur place la patrouille la plus proche et adaptée à l'urgence. Le 18 permet de joindre les sapeurs-pompiers pour signaler une situation de péril ou un accident concernant des biens ou des personnes (incendie, fuite de gaz, risque d'effondrement, ensevelissement, brûlures, électrocution, accident de la route, etc.) et obtenir leur intervention rapide. Le 196 permet de joindre les secours en mer, afin d'être mis directement en relation avec le Centre opérationnel de surveillance et de sauvetage en mer (CROSS), seul organisme d'État compétent pour coordonner des moyens d'intervention pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (détresse ou urgence en mer, etc.). Le 191 permet de joindre l'urgence aéronautique, utilisable par tout usager en situation de détresse, par tout témoin direct d'un accident d'aéronef, ou par toute personne inquiète de la disparition d'un aéronef et de ses occupants. Il est destiné exclusivement au traitement des appels d'urgence aéronautique et permet aux centres de coordination de sauvetage aéronautiques de métropole et d'outre-mer de déclencher les opérations de recherche et de sauvetage des occupants des aéronefs en détresse ou présumés comme tels. Le 114 est le numéro d'urgence pour les personnes sourdes et malentendantes. Ce numéro d'urgence national unique est accessible, dans un premier temps, par fax ou SMS. Il ne reçoit pas les appels vocaux téléphoniques. Les fax et SMS émis vers le 114 arrivent au centre relais national implanté au Centre hospitalier universitaire de Grenoble. Les professionnels sourds et entendants spécifiquement formés traitent ensuite ces messages et contactent les services d'urgence compétents, si la situation nécessite leur intervention. Toute personne sourde ou malentendante, victime ou témoin d'une situation d'urgence qui nécessite l'intervention des services de secours, peut ainsi composer le 114. Les autres numéros d'appel d'urgence les plus courants sont le 115 (urgences sociales), le 116 000 (enfants disparus), le 116 111 (enfance en danger), le 116 117 (permanence des soins ambulatoires), le 119 (enfance maltraitée) et le 197 (alerte attentat-alerte enlèvement). Face à cette prolifération de numéros d'appel d'urgence, il semblerait plus efficace et efficient de mettre en place un numéro d'appel d'urgence unique en France. Cela permettrait de faciliter l'accès aux secours, le traitement des appels d'urgence et la mobilisation des services pour sauver des vies. Ainsi, il l'interroge sur les intentions du Gouvernement concernant la mise en place d'un numéro d'appel d'urgence unique en France.

Texte de la réponse

Aujourd'hui, pas moins de treize numéros d'urgence sont accessibles en France, bien que le 112 soit mis en œuvre depuis l'an 2000 sur le territoire. Il est renvoyé dans 80 % des cas vers les services départementaux d'incendie et de secours et 20 % vers les services d'aide médicale urgente. Les citoyens se retrouvent donc face à une situation peu lisible, à l'origine de nombreuses confusions. La France n'a effectivement pas encore utilisé le levier du 112 pour moderniser la gestion des appels d'urgence, à l'inverse d'un grand nombre de pays européens notamment. Le Président de la République a affirmé sa volonté de simplifier et moderniser ce système lors de son discours du 6 octobre 2017. Pour parvenir à un modèle aussi lisible que celui des Etats-Unis où le 911 est le numéro unique pour joindre les urgences, modèle cité en exemple par le Président de la République, il apparaît nécessaire de créer des plateformes communes de gestion des appels d'urgence. La modernisation permettra d'apporter des réponses aux enjeux opérationnels (maillage du territoire, gestion du quotidien et de la crise), techniques (avancées technologiques) et financiers (recherche d'économie) auxquels font face les acteurs de la sécurité, de la santé et des secours. In fine, il s'agit de mettre en place une organisation lisible et efficace pour le citoyen dans un souci d'une allocation juste des moyens. A la demande du cabinet du Premier ministre, des travaux ont été engagés par la mission interministérielle de modernisation des appels d'urgence pilotée par deux personnalités qualifiées désignées par le ministre des solidarités et de la santé et le ministre de l'intérieur. La vocation du programme MARCUS (modernisation de l'accessibilité et de la réception des communications d'urgence pour la sécurité, la santé et les secours) initiée au mois de juillet 2019 est d'apporter une réponse à la décision présidentielle supra. Avant de recourir au 112 comme numéro unique d'appel d'urgence, il convient de réaliser, au préalable, un inventaire précis des questions organisationnelles, opérationnelles, techniques et juridiques que pose cette mise en commun. L'unification des plates-formes de réception des appels d'urgence constitue en effet un enjeu structurant, qui sous-tend un examen des évolutions techniques nécessaires, des interrogations concernant l'organisation future de l'ensemble des services de secours, des problématiques de partage de responsabilité et des questionnements relatifs à la rencontre de cultures professionnelles différentes. L'équipe intégrée MARCUS, associant l'ensemble des acteurs concernés, a procédé à l'étude de ces questions nécessitant aujourd'hui d'être confirmée par une phase d'expérimentation. Indépendamment du modus operandi restant à arbitrer par le Gouvernement, des dénominateurs communs pour répondre à l'amélioration du traitement des communications d'urgence ont été recommandés. Ainsi, les travaux MARCUS ont objectivé la nécessité d'instaurer un premier niveau de décroché des appels afin de répondre à l'impératif d'accessibilité de la population dans des délais compatibles avec l'urgence. Les objectifs opérationnels sont d'assurer un décroché de l'appel conforme aux objectifs de performance, un filtrage et une orientation priorisée vers un deuxième niveau constitué des forces de sécurité ou de secours dans un délai moyen de traitement de 30 secondes pour les appels justifiant d'une instruction. Le traitement bi-niveau est en effet un facteur d'amélioration de la performance. Il prouve particulièrement son efficacité dans les situations nécessitant le traitement de gros volumes d'appels. Il est cependant nécessaire de souligner que la performance d'un tel dispositif est conditionnée à la fluidité du premier niveau qu'il convient de piloter à l'échelle supra-départementale. Ce modèle est respectueux des plateformes actuelles 15-18 ainsi que des reconcentrations en projet. Pour être précisé, il devrait faire l'objet d'une expérimentation en raison des profonds impacts qu'il suppose en termes de gouvernance, de territorialité, de doctrine, de processus métiers, de systèmes d'information, etc., qui concerneront tous les services concourant à la gestion des appels d'urgence et leurs interlocuteurs (citoyens, élus, représentants de l'Etat, etc.). En conséquence, il est désormais souhaitable que des expérimentations soient menées sur un ou deux territoires. Elles permettront de préciser le modèle d'organisation qui sera définitivement retenu grâce à une confrontation aux réalités opérationnelles. Cette phase expérimentale permettra de mesurer les améliorations et les gains observés aussi bien en termes de qualité de service, de réponse à l'urgence que de coordination inter-services, particulièrement avec ceux du ministère des solidarités et de la santé. Le découpage territorial de la réception des appels est un point de vigilance particulier de l'expérimentation, afin qu'elle s'adapte aux contingences du terrain. Des échanges interministériels sont en cours, notamment avec le ministère des solidarités et de la santé, pour préciser les modalités de mise en oeuvre du numéro unique 112 et déterminer les contours de sa mise en oeuvre via l'expérimentation. La mise en place du numéro unique permettra de mobiliser les différents acteurs de l'urgence au travers d'une organisation de tous les maillons qui soit la plus efficiente possible dans l'intérêt du citoyen. Cette organisation n'est bien sûr pas exclusive d'un numéro pour l'accès aux soins non urgents (SAS), comme le 116 117 testé sur quelques territoires actuellement.