15ème législature

Question N° 27964
de Mme Barbara Bessot Ballot (La République en Marche - Haute-Saône )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Covid-19 : situation des producteurs AOP

Question publiée au JO le : 07/04/2020 page : 2533
Réponse publiée au JO le : 09/06/2020 page : 4012

Texte de la question

Mme Barbara Bessot Ballot alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation des filières sous appellation d'origine protégée (AOP), particulièrement fragilisées par la crise du covid-19. Avec le coronavirus, les consommateurs se tournent majoritairement vers des produits de première nécessité. Ce changement brutal de mode de consommation impacte directement les entreprises et producteurs qui, en capacité de produire, ne peuvent plus écouler leurs produits, faute de débouchés commerciaux. Aussi, après la fermeture de la restauration hors domicile le 15 mars 2020, les grandes surfaces ont aussi fortement réduit, voire-même fermé les rayons à la coupe (par manque de personnel ou par mesures d'hygiène). L'annonce de la réouverture d'un quart des marchés est une bonne nouvelle pour les filières AOP, notamment pour les producteurs de fromages AOP et les producteurs fermiers. En effet, les commerces spécialisés et les commerces de proximité (dont les marchés) ont une place centrale pour l'achat de produits sous signe de qualité. Toutefois, les acteurs du secteur, notamment le Conseil national des appellations d'origine laitières (CNAOL) et les Fromagers de France, restent inquiets : il convient en effet de signaler qu'à la fin du mois de mars 2020, toutes les AOP et IGP sont fragilisées, avec des baisses en moyenne de 60 % des commandes en AOP et IGP. Les produits AOP, notamment les AOP laitières, font partie intégrante du patrimoine national. Avec leurs spécificités, leurs valeurs et leurs savoir-faire reconnus, ces produits, fabriqués par des opérateurs qui font vivre les territoires, contribuent au rayonnement de l'excellence agricole française, en France et dans le monde. Mais aujourd'hui, ces filières sont particulièrement menacées. Ainsi, face à cette crise sanitaire et économique exceptionnelle, elle l'interroge sur les mesures de soutien envisagées afin d'accompagner et répondre aux difficultés et aux spécificités rencontrées par les acteurs du secteur, notamment concernant leurs stocks, l'écoulement des surplus et la régulation des volumes.

Texte de la réponse

La crise sanitaire actuelle a des impacts importants pour de nombreuses filières agricoles et agroalimentaires. Les filières sous appellations d'origine protégée (AOP), dont l'activité est si importante pour le patrimoine et l'économie des territoires, sont particulièrement fragilisées par la crise du covid-19. Ces filières font face à des difficultés liées à des pertes de débouchés, compte tenu de la fermeture d'une majorité du secteur de la restauration hors domicile, de celle d'un nombre important de marchés, et de l'orientation des achats alimentaires vers des produits de première nécessité et moins d'achats festifs par les consommateurs. En outre, la période de forte production laitière (du fait du pic de collecte annuel) aggrave la problématique notamment pour les AOP laitières. Au niveau national, le ministère chargé de l'agriculture a travaillé avec les services de l'institut national de l'origine et de la qualité pour mettre en place une procédure rapide pour permettre à toutes les productions sous signes officiels de la qualité (AOP, indication géographique protégée, spécialité traditionnelle garantie et label rouge) qui le souhaitent d'adapter temporairement leur cahier des charges pour faire face à la crise actuelle. Il s'agit pour eux de pouvoir continuer à bénéficier de leur appellation, malgré les évolutions des conditions de production compte tenu de la crise actuelle (en permettant la congélation d'une partie des volumes sous forme de caillé ou de fromages en blanc par exemple), tout en veillant à préserver ce qui fait la typicité de ces productions. Les produits sous indication géographique (IG) maillent l'ensemble du territoire, avec une production souvent issue de très petites entreprises (TPE) et de petites et moyennes entreprises (PME), dont certaines qui apparaissent durement touchées par la crise. C'est bien pour préserver ce type d'entreprise que le Gouvernement a annoncé des mesures immédiates de soutien aux entreprises, dont peuvent bénéficier les exploitations agricoles et en priorité les TPE et PME. Concernant la filière laitière, au niveau local, des réorganisations de collecte du lait et de leurs débouchés ont été mises en place pour optimiser les capacités de valorisation du lait, avec notamment la mobilisation de certaines grandes entreprises, en particulier coopératives. Il convient de saluer la solidarité exemplaire qui s'exerce dans la filière laitière et permet d'atténuer les difficultés rencontrées par les plus petites entreprises pour lesquelles les alternatives sont réduites. De plus, des efforts sont entrepris par les enseignes de grande distribution pour maintenir ouverts les rayons coupe et préserver la diversité des produits proposés aux consommateurs. En outre, le ministre chargé de l'agriculture a porté au plan européen la nécessité d'activer des mesures de gestion des marchés. Il était indispensable que la Commission européenne active sans plus attendre ces outils et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a mobilisé l'ensemble des partenaires européens pour porter conjointement cette demande. Concernant la filière laitière et fromagère, il s'agissait en particulier d'activer rapidement une aide financière au stockage privé. Pour le secteur laitier, la Commission européenne a apporté des réponses en proposant fin avril des mesures de stockages privés pour la poudre de lait écrémé, le beurre et l'ensemble des fromages, sous IG ou non. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation travaille également avec le conseil national des appellations d'origine laitières sur l'évolution des dispositifs de régulation de l'offre de fromages sous IG déjà présents chez huit des fromages sous IG ou à la mise en place de telles règles pour de nouveaux fromages pour permettre une meilleure maîtrise de l'offre pour ces fromages. Les règles de régulation de l'offre pour les appellations fromagères qui le souhaitent pourront par exemple prévoir une application saisonnière temporaire avec l'établissement de références mensuelles ou trimestrielles. Les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation assureront une gestion rapide des dossiers qui seront déposés, en lien avec ceux du ministère de l'économie et des finances. Avec la crise, la situation des populations les plus précaires se détériore et les besoins de soutien augmentent, en particulier en ce qui concerne les besoins alimentaires. Afin de faire face aux besoins, le Gouvernement a annoncé le lancement d'un plan d'urgence pour soutenir l'aide alimentaire. Doté de 39 millions d'euros (M€), ce plan comprendra deux volets : 25 M€ de soutien financier aux associations d'aide alimentaire pour acheter des denrées alimentaires et 14 M€ destinés à certains foyers dans des territoires particulièrement impactés par la crise économique. Les producteurs et les entreprises de la filière laitière font régulièrement preuve de solidarité en donnant une partie de leurs productions pour les personnes les plus démunies. Ces dons, qui peuvent être effectués par les producteurs ou par les entreprises de transformation, bénéficient d'une défiscalisation à hauteur de 60 % ou 75 % du don, en fonction des conditions réglementaires prévues par le code général des impôts. L'ensemble du Gouvernement, dont le ministère de l'agriculture, reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation pour l'ensemble des filières agricoles et apporter les solutions appropriées le plus rapidement possible. La propagation mondiale du covid-19 place le monde entier dans une situation inédite avec un double défi, sanitaire et économique auquel il convient de faire face collectivement.