15ème législature

Question N° 28110
de Mme Mathilde Panot (La France insoumise - Val-de-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Ville et logement
Ministère attributaire > Logement

Rubrique > logement

Titre > Personnes sans-abri et mal-logées en période d'épidémie liée au coronavirus

Question publiée au JO le : 07/04/2020 page : 2623
Réponse publiée au JO le : 30/11/2021 page : 8588
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de signalement: 16/06/2020

Texte de la question

Mme Mathilde Panot appelle l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur la question des personnes sans-abri et mal-logées en cette période d'épidémie liée au coronavirus. Le confinement prononcé par le Gouvernement met en exergue les graves inégalités liées au logement parmi les citoyens, à l'heure où quatre millions de personnes sont mal-logées, selon le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre. Des milliers de familles résident dans des logements insalubres et surpeuplés : l'humidité et l'isolation thermique défaillante augmentent le risque de pathologies respiratoires, de troubles du sommeil et d'anxiété. Le développement des plus jeunes enfants est particulièrement touché. Par conséquent, ces familles sont plus vulnérables au virus et plus exposées aux risques de complication en cas de contamination. De plus, ces familles précaires, majoritairement locataires, éprouvent des difficultés à régler l'ensemble de leurs dépenses courantes. Elles doivent assumer le surcoût alimentaire de la présence des enfants au domicile, autrefois pris en charge par les cantines des écoles. S'agissant des personnes sans-abri, et ce malgré les mesures d'urgence prises par le ministère du logement, les associations alertent sur le nombre insuffisant de solutions d'hébergement. Les centres d'hébergement sont déjà saturés, avec pour conséquence une forte promiscuité et un risque accru de contamination. Elles évoquent également la difficulté à assurer la continuité de l'aide alimentaire aux plus précaires, puisque de nombreux bénévoles doivent être tenus au confinement. Mme la députée soutient les demandes des associations quant à la prise de mesures exceptionnelles à la hauteur de la gravité de la situation : la réquisition immédiate des logements vacants de propriétaires, de logements AirBnb, la suspension des loyers et le renforcement des APL, la suspension des factures d'énergie, d'eau, de télécommunications pour les locataires de logements sociaux et l'arrêt des expulsions illicites. Ces mesures permettraient de résorber les inégalités face au confinement dont les plus précaires sont les premières victimes. Elle souhaite connaître les mesures pérennes qu'il envisage pour répondre aux besoins des personnes mal-logées et sans-abri en cette période de crise sanitaire.

Texte de la réponse

La crise sanitaire a largement impacté les publics sans domicile, qu'ils vivent à la rue, en centres d'hébergement collectifs ou à l'hôtel ainsi que les publics vulnérables. Dès le mois de mars 2020, le Gouvernement a entrepris un travail considérable en matière de mise à l'abri et de protection des personnes. Au total, 43 000 places d'hébergement ont été ouvertes depuis le mois de mars 2020, dont 3 600 places en centres d'hébergement spécialisés (CHS) au plus fort de la crise, afin de prendre en charge et de soigner les personnes hébergées ou à la rue infectées par le COVID-19, ou dont l'infection est présumée mais dont l'état de santé ne nécessite pas d'hospitalisation. Des équipes mobiles sanitaires pluridisciplinaires ont été déployées dans l'ensemble du territoire afin de diagnostiquer, orienter et assurer le suivi sanitaire des personnes sans domicile ou en situation de grande précarité. Le Gouvernement s'est pleinement mobilisé et organisé avec les acteurs associatifs pour renforcer l'accès et le maintien dans le logement dans ce contexte difficile. Une attention particulière a été portée à la prévention des expulsions locatives et l'accompagnement des personnes menacées d'expulsion. En 2020, le nombre d'expulsions locatives avec concours de la force publique a marqué un recul historique sur l'ensemble du territoire. Le 16 novembre dernier, la ministre déléguée chargée du logement a installé l'observatoire des impayés de loyers et de charges pour disposer de données chiffrées sur les situations d'impayés de loyers pour mieux agir et protéger les personnes en situation de précarité. À ce jour, aucune hausse des impayés locatifs et des charges locatives du fait de la crise sanitaire n'a été constatée. Néanmoins, le Gouvernement reste vigilant sur l'impact à moyen terme des conséquences économiques de la crise sur la capacité de paiement des loyers. Il s'agit d'éviter toute hausse des impayés locatifs qui pourrait se matérialiser au cours de l'année et de prévenir l'augmentation des expulsions locatives qui pourrait en résulter. Un fonds national de 30 millions d'euros a par conséquent été mis en place afin de soutenir les ménages en difficultés de paiement de leur loyer du fait des conséquences économiques de la crise sanitaire. Ce fonds abonde la partie relative à l'apurement des dettes locatives des fonds de solidarité pour le logement (FSL) des collectivités territoriales qui disposent d'ores-et-déjà de l'expertise et de la logistique nécessaires à l'instruction des demandes ainsi qu'au versement des aides afférentes. Toute collectivité qui le souhaite peut bénéficier de l'aide du fonds national sous réserve d'adéquation préalable du règlement intérieur de son FSL aux caractéristiques socio-économiques des ménages fragilisés financièrement par la crise sanitaire. Ces ménages n'ont en effet pour la plupart jamais rencontré de difficulté de paiement de leur loyer et disposent de ressources financières et familiales dans lesquels ils puisent d'abord avant de cesser le paiement de leur loyer. Inconnus des dispositifs sociaux auxquels ils n'ont jamais eu besoin de recourir jusqu'à ce jour, ils sont pour la plupart exclus de leurs publics cibles. Au 30 avril 2021, le parc d'hébergement généraliste comptait 200 000 places qui ont permis d'apporter une réponse quantitative et qualitative aux situations de sans-abrisme en France. Le nombre de personnes sans abri a en effet nettement diminué dans tous les territoires et des personnes auparavant inconnues des services d'aide sociale ou qui refusaient d'y recourir ont pu être hébergées dans des conditions dignes. Cette stratégie a permis de renforcer la continuité de l'accueil et donc d'assurer des prestations d'accompagnement de meilleure qualité, qui aboutissent de plus en plus fréquemment à l'orientation vers des solutions plus pérennes, en premier lieu desquelles le logement. Alors que la trêve hivernale prolongée par le Gouvernement a pris fin le 31 mai 2021, la ministre déléguée chargée du logement a annoncé le maintien jusqu'à fin mars 2022 des 200 000 places d'hébergement actuellement ouvertes. Pour la première fois dans le secteur de l'hébergement d'urgence, aucune fermeture de place ne se fera à l'issue de la période hivernale. Les personnes hébergées le seront en hiver comme en été, ce qui permet la continuité de l'accompagnement social vers l'accès au droit, à la santé, au logement, à l'emploi. Pour finir, la crise sanitaire a montré la pertinence du plan pour le Logement d'abord lancé par le Président de la République en 2017 qui constitue le volet logement de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté. Depuis le 1er janvier 2021, le service public de la rue au logement a été lancé avec l'objectif d'accélérer l'ensemble de cette politique. 45 territoires sont aujourd'hui engagés et soutenus financièrement par l'État pour la mise en œuvre accélérée du Logement d'abord. Les efforts produits depuis quatre ans par l'ensemble des acteurs de cette stratégie – associations, bailleurs sociaux, collectivités territoriales, services de l'État – ont eu des résultats importants, avec notamment 235 000 personnes sans domicile qui ont accédé au logement entre 2018 et 2020. Afin de produire et de mobiliser des logements abordables et adaptés aux besoins des personnes sans domicile, la production de PLAI (logements financés en prêt locatif aidé d'intégration), c'est-à-dire des logements très sociaux qui permettent l'accès au logement des personnes les plus en difficulté, est fortement encouragé par l'État. En mars 2021, la ministre déléguée chargée du logement a signé un protocole commun d'engagement avec les principaux acteurs du logement social en France pour relever le défi de produire 250 000 logements sociaux sur deux ans. La mobilisation du parc privé à des fins sociales est également encouragée avec les dispositifs d'intermédiation locative, pour atteindre voire dépasser l'objectif des 43 000 places fixé dans le plan quinquennal. 27 400 places ont été ouvertes depuis 2018. Des solutions de logement adaptées aux besoins de chacun sont également soutenues avec la production de pensions de familles qui proposent des logements pérennes et assurent un environnement semi-collectif adapté aux personnes isolées. À ce titre, 5 000 places ont été ouvertes depuis 2017. Enfin, le programme « Un chez soi d'abord » vise à répondre à la situation des personnes sans-abri les plus vulnérables qui présentent des troubles psychiques sévères et des addictions et échappent aux dispositifs d'accompagnement classique. Il change radicalement la prise en charge en proposant un accès dans un logement ordinaire depuis la rue, moyennant un accompagnement soutenu et pluridisciplinaire au domicile. Une étude scientifique indépendante a confirmé en 2016 que le programme avait une réelle efficacité pour un moindre coût : amélioration de la qualité de vie et de l'état de santé des personnes, réduction significative des recours aux soins, optimisation des moyens alloués par la puissance publique. Fin 2021, ce dispositif aura été déployé sur 34 sites en France, dont 2 sites dédiés aux jeunes. L'ensemble de ces actions et le niveau inédit du programme 177 permettent de répondre de façon bien plus forte aux difficultés des personnes sans domicile fixe et de soutenir plus fermement l'ensemble des actions d'insertion dont ils peuvent bénéficier. Il convient également de saluer les efforts produits par l'ensemble des acteurs (associations, bailleurs sociaux, collectivités territoriales, services de l'État) qui contribuent à une réponse forte dans le cadre du service public de la rue au logement.