Question écrite n° 28130 :
Continuité de la mission de service public funéraire

15e Législature

Question de : Mme Sereine Mauborgne
Var (4e circonscription) - La République en Marche

Mme Sereine Mauborgne alerte Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la situation particulièrement complexe à laquelle sont confrontés les professionnels du secteur funéraire dans le cadre de la crise sanitaire qui frappe actuellement le pays. En effet, les opérateurs funéraires doivent organiser chaque jour des funérailles dans des conditions de plus en plus délicates, en devant prendre en charge des corps de défunts positifs probables ou avérés au covid-19. Or, n'étant pas comptés parmi les professionnels de santé mentionnés à l'article 7 de l'arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19, ceux-ci ne disposent pas des équipements de protection individuelle de nature à permettre l'exécution de leur mission en toute sécurité. Jusqu'à 90 % de leurs commandes de masques ayant été préemptées par l'État, les opérateurs fonctionnent avec leur peu de stock restant, notamment ceux souvent périmés constitués lors de la pandémie de H1N1 en 2009, voire se retrouvent démunis dans les régions en forte tension, comme c'est le cas dans le Grand Est. Ils ne disposent pas non plus de solution hydroalcoolique leur permettant d'effectuer les opérations de manipulation des corps sans compromettre leur état de santé. Le service des pompes funèbres constitue pourtant une mission de service public reconnue à l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, dont les opérateurs funéraires assurent la continuité. Leurs personnels sont en première ligne dans la gestion de cette crise, alors que le nombre de décès en hôpital de personnes touchées par le covid-19 est passé de plus de 1 300 à plus de 3 500 en cinq jours. En l'absence d'équipements de protection, une large démobilisation des personnels est à redouter, alors que les opérateurs font déjà face à un taux d'absentéisme croissant. De plus, la confusion générée par les différentes consignes émises par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) n'est pas de nature à faciliter leur mobilisation. En effet, si dans son avis du 18 février 2020 relatif à la prise en charge du corps d'un patient infecté par le virus SARS-CoV-2, le HCSP recommandait que « le corps soit déposé en cercueil simple [...] et qu'il soit procédé sans délai à la fermeture définitive du cercueil », cette recommandation n'est plus préconisée dans son second avis relatif à la prise en charge du corps d'un patient cas probable ou confirmé covid-19 du 24 mars 2020, alors même que les contraintes se renforcent dans toute la société pour lutter contre la pandémie. Ce changement suscite l'incompréhension des professionnels du secteur, d'autant plus que le HCSP souligne dans ce second avis que « la manipulation d'un corps peut exposer le personnel le manipulant à des germes de transmission aérienne ». Ces professionnels souhaitent donc poursuivre la mise en bière immédiate en cercueil simple de ces défunts, afin de prévenir toute saturation des infrastructures funéraires en perspective d'un accroissement rapide du nombre de décès. En outre, l'avis du 24 mars 2020 autorise le transport de corps vers une chambre funéraire avant mise en bière, la réalisation de toilettes funéraires ou rituelles ou encore la présentation du visage du défunt, en contradiction avec les règles de prévention visant à empêcher la propagation du virus. Or, s'il n'est pas question ici de manquer de respect à la « diversité des pratiques culturelles et sociales » mentionnées dans ce second avis, les professionnels du secteur s'inquiètent du potentiel de contamination par ces pratiques dans le contexte actuel de crise sanitaire. Réalisées en milieu humide, ces toilettes présentent un risque tout particulier dans la mesure où la salle mise à disposition peut se retrouver abondamment éclaboussée, et les gestes barrières non respectés. Aussi, elle lui demande de lui indiquer les mesures qui pourront être prises afin de garantir la continuité de la mission de service public funéraire et la sécurité afférente des personnels du secteur, dont l'action est absolument essentielle pour assurer la prise en charge des défunts positifs probables ou avérés au covid-19.

Réponse publiée le 9 juin 2020

Depuis le début de la crise sanitaire liée au covid-19, le Gouvernement accompagne les différents acteurs de la chaîne funéraire dans une mise en œuvre adaptée de la règlementation au contexte exceptionnel que connaît notre pays, en particulier avec l'appui des membres du Conseil national des opérations funéraires (CNOF), et sur la base des recommandations du Haut conseil de la santé publique. Les dispositions prises en matière de droit funéraire dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ont visé à concilier le respect de la dignité du défunt et de ses proches, les exigences sanitaires spécifiques à cette situation de crise, le droit applicable aux professionnels des secteurs sanitaires et funéraires et une certaine maitrise des contraintes matérielles. C'est ainsi que la mise en bière immédiate des défunts atteints ou probablement atteints du covid-19 au moment de leur décès, a été prévue par le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020, son article 12-5 ayant été actualisé par un décret publié le 1er mai. Cette mise en bière immédiate a été assortie dans un premier temps d'une interdiction de soins de thanatopraxie sur tous les défunts, quelle que soit la cause du décès, mais aussi par une interdiction des toilettes funéraires sur les défunts atteints ou probablement atteints du covid-19 au moment de leur décès. L'obligation de mise en bière immédiate et les interdictions afférentes se sont imposées tant aux équipes médicales, qu'à l'opérateur funéraire et aux familles. Elle est concrétisée par le fait que le médecin qui constate le décès coche la case « mise en bière immédiate » sur le certificat de décès, dès lors qu'il est en présence d'un défunt cas confirmé ou cas probable du covid-19. Le défunt atteint par le covid-19 ne peut donc pas faire l'objet d'une présentation en chambre funéraire en cercueil ouvert, toutefois, et en accord avec les recommandations du HCSP du 24 mars 2020, la famille peut se voir présenter, à sa demande, le visage de son proche par une ouverture de 5 à 10 centimètres de la housse mortuaire, avant la mise en bière et la fermeture du cercueil. Les autorités ont pleinement mesuré la sensibilité de cette situation pour les proches et les familles, et la nécessité d'assurer un service public funéraire répondant à leurs attentes tout en garantissant la sécurité des professionnels. C'est pourquoi, fin avril, alors que la situation de crise commençait à être mieux maitrisée, le décret n° 2020-497 du 30 avril 2020 est venu assouplir les pratiques, en disposant que, eu égard à la situation sanitaire : - les soins de conservation, également appelés soins de thanatopraxie, sont donc redevenus possibles pour les défunts ni probables, ni avérés porteurs du covid-19 ; - les défunts atteints ou probablement atteints du covid-19 au moment de leur décès continuent de faire l'objet d'une mise en bière immédiate ; - la pratique de la toilette mortuaire reste interdite pour ces défunts mais des soins peuvent être réalisés post mortem par des professionnels de santé ou des thanatopracteurs ; - les soins de conservation sur les défunts non covid-19 et les toilettes quelle que soit la cause du décès, sont pratiqués dans des conditions sanitaires appropriées : cette précision appelle au respect systématique des conditions sanitaires nécessaires à la réalisation de ces actes et au respect de toutes les mesures de protection en vigueur. Ces nouvelles dispositions sont de nature à répondre aux souhaits des familles afin que leur défunt puisse bénéficier de soins post mortem, et qu'elles puissent les voir dans des conditions respectant au mieux leur dignité.

Données clés

Auteur : Mme Sereine Mauborgne

Type de question : Question écrite

Rubrique : Mort et décès

Ministère interrogé : Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Ministère répondant : Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Dates :
Question publiée le 7 avril 2020
Réponse publiée le 9 juin 2020

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