15ème législature

Question N° 28240
de M. Fabrice Brun (Les Républicains - Ardèche )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Soutien de la filière viti-vinicole dans le cadre de la crise du COVID

Question publiée au JO le : 14/04/2020 page : 2719
Réponse publiée au JO le : 13/10/2020 page : 7043
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de renouvellement: 21/07/2020

Texte de la question

M. Fabrice Brun attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la nécessité de soutenir la filière viti-vinicole dans le cadre de la crise sanitaire et économique. La filière viticole souffre des conséquences de l'épidémie de covid-19 : marchés et salons annulés, restaurants fermés, exportations au ralenti, difficultés pour trouver de la main d'œuvre saisonnière et problèmes de trésorerie. Ces éléments mettent en danger de nombreuses exploitations viticoles. Ils s'ajoutent à une situation déjà particulièrement tendue en raison du conflit commercial avec les États-Unis, des incertitudes entourant le Brexit et de l'instabilité des différents marchés internationaux. Cette situation, difficilement soutenable pour les professionnels appelle la mise en œuvre rapide de mesures de soutien. En premier lieu, il conviendrait d'élargir les moyens du médiateur désigné par le Gouvernement pour assurer le respect des engagements pris par les partenaires commerciaux, en particulier le règlement des factures déjà établies avant le début de la crise. Par ailleurs, le Gouvernement a demandé aux établissements bancaires de faciliter le rééchelonnement des crédits bancaires pour soulager les entreprises en tension. Néanmoins, ces rééchelonnements ne font que déplacer le problème dans le temps. Or, à la sortie de la crise, les entreprises viticoles, exsangues, ne seront pas plus aptes à rembourser leurs crédits en cours. C'est pourquoi, afin d'alléger un peu la charge pesant sur ces exploitations, il conviendrait a minima d'annuler pour l'année 2020 les frais liés aux crédits bancaires, notamment à leur rééchelonnement. En outre, afin de ne pas se contenter de reporter dans le temps des échéances qui pourraient se révéler fatales à ces entreprises constituant le tissu économique des territoires, il serait nécessaire, pour l'année 2020, d'annuler la totalité des prélèvements directs pesant sur les entreprises agricoles. Cette annulation ferait une réelle différence pour l'avenir de ces entreprises, diminuant les problèmes de trésorerie qui s'abattraient sur eux à la fin du report de ces échéances. Enfin, toujours dans le but de soulager la trésorerie de ces exploitations, diminuant par la même occasion leur besoin de se faire prêter de l'argent par les banques, il serait très pertinent d'étendre la défiscalisation de la réintégration d'urgence de la dotation pour épargne de précaution (DEP). Pour que la DEP puisse continuer à servir « d'assurance personnelle », cette réintégration défiscalisée doit être encadrée. Par exemple, il pourrait être décidé de la permettre pendant l'état d'urgence sanitaire, dans la limite de 50 % de l'épargne constituée, en la conditionnant à un objectif prioritaire, le paiement des salaires des employés des exploitations agricoles. C'est pourquoi il lui demande si le Gouvernement entend donner une suite favorable à ces mesures de soutien attendues par les professionnels de la vigne et du vin. Il lui demande également quelles mesures complémentaires d'annulation des charges sociales et fiscales sont envisagées, étant entendu qu'en cas de défaillance des acteurs économiques de la filière viti-vinicole, les conséquences sur l'activité et l'emploi au cœur des territoires seraient considérables, et que l'ardoise pour les finances publiques serait bien supérieure aux coûts d'une exonération temporaire totale des charges.

Texte de la réponse

La propagation du covid-19 place le monde entier dans une situation inédite, à laquelle il convient de faire face collectivement avec un triple défi, sanitaire, économique et social. Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour soutenir le secteur de la viticulture, particulièrement dépendant de secteurs qui ont été fermés administrativement du 17 mars au 2 juin 2020 et des marchés à l'exportation. La filière était déjà touchée par l'instauration des sanctions américaines sur les importations de vin en octobre 2019. Ce sont plus de 85 000 entreprises (exploitations, caves coopératives, négociants vinificateurs) qui sont concernées. Le Gouvernement a demandé et obtenu au niveau européen des flexibilités dans la mise en œuvre des mesures des programmes sectoriels de l'Union européenne pour la viticulture et qui ouvrent la possibilité dans ces programmes de financer un dispositif de distillation de crise. Dans ce contexte, le Gouvernement a rencontré l'ensemble des représentants de la filière à de nombreuses reprises pour faire le point de la situation. À l'issue de ces échanges, le Gouvernement a annoncé un dispositif de soutien exceptionnel et spécifique au secteur pour assurer la stabilité du marché et la poursuite de son activité : - un dispositif de distillation de crise à hauteur de 211 millions d'euros (M€), financé par des crédits nationaux et des crédits européens du programme national d'aides viticole ; - une aide au stockage privé à hauteur de 35 M€ ; - une relance de la demande d'un fonds de compensation au niveau européen. Ce plan de soutien spécifique à la filière viticole s'élève donc à 246 M€. Les mesures spécifiques aux filières agricoles viennent compléter les dispositifs transversaux mis en place par le Gouvernement. Depuis le début de la crise sanitaire, le Gouvernement s'est fixé comme principale priorité sur le plan économique, de préserver les entreprises et maintenir les emplois. Ainsi, les moyens humains du médiateur des entreprises ont été renforcés. Celui-ci peut notamment être saisi en cas de clauses contractuelles déséquilibrées, de modification unilatérale ou de rupture brutale de contrat, de non-respect d'un accord verbal, ou de conditions de paiement non respectées. En réponse aux difficultés des entreprises pour assumer leurs charges et notamment leurs crédits bancaires en cours, il convient de rappeler que l'ensemble des réseaux bancaires professionnels, en collaboration avec le groupe public Bpifrance, déploient un dispositif inédit permettant à l'État de garantir des prêts consentis pour soulager la trésorerie des entreprises et des professionnels qui subissent le choc lié à l'urgence sanitaire. Jusqu'au 31 décembre 2020, les entreprises de toutes tailles, quelle que soit leur forme juridique, à l'exception des sociétés civiles immobilières, des établissements de crédit et des sociétés de financement, peuvent demander à leur banque habituelle un prêt garanti par l'État pour soutenir leur trésorerie. Les exploitations agricoles, et notamment la filière viti-vinicole, peuvent bénéficier de ce dispositif. Le prêt garanti par l'État peut représenter jusqu'à trois mois de chiffre d'affaires, ou deux années de masse salariale pour les entreprises nouvelles ou innovantes. Aucun remboursement ne sera exigé la première année et au terme de cette année, l'entreprise pourra décider d'amortir le prêt sur une à cinq années supplémentaires. Conscient de la nécessité d'une réponse globale le Gouvernement a par ailleurs, dans la continuité des mesures d'urgence adoptées en plein cœur de la crise (fonds de solidarité, activité partielle, report massif de cotisations sociales…), conçu de nouveaux dispositifs exceptionnels de soutien aux entreprises prévus par la troisième loi de finances rectificative pour 2020, définitivement adoptée par le Parlement le 23 juillet 2020. Ces mesures complémentaires permettront de répondre aux difficultés rencontrées par certains secteurs particulièrement touchés par la crise. Les filières agricoles, et notamment la viticulture, pourront bénéficier, sous conditions de mesures d'exonération, de réductions et de remise partielle de créances fiscales et sociales, ainsi que d'un dispositif novateur d'aide au paiement des cotisations pour 2020. En particulier, les entreprises les plus touchées pourront exceptionnellement demander à ce que le calcul des cotisations dues en 2020 repose sur les revenus perçus en 2020, et non sur les revenus des années précédentes. Au-delà de ces dispositifs exceptionnels, les entreprises peuvent également saisir la commission des chefs de service financier pour bénéficier des délais de paiement lorsqu'elles rencontrent des difficultés de paiement pour s'acquitter de leurs dettes fiscales et sociales. S'agissant du dispositif de déduction pour épargne de précaution (DEP) actuel, introduit en loi de finances pour 2019, celui-ci permet aux producteurs comme les viticulteurs, lorsqu'ils sont soumis à un régime réel d'imposition, de consigner une épargne pour réintégration ultérieure. Les impositions afférentes à l'impôt sur le revenu s'en retrouvent reportées en avant. Un récent amendement voté en loi de finances rectificative pour 2020 a permis d'aligner les conditions de réintégration, relativement contraignantes, de l'ex-dispositif de déduction pour aléas, sur celles, beaucoup plus souples, de l'actuel dispositif (DEP), afin d'offrir aux professionnels la plus grande latitude dans l'utilisation des fonds concernés face à la situation exceptionnelle à laquelle ils sont confrontés. Toutefois, l'avantage fiscal attaché au décalage dans le temps de l'effet de trésorerie, sur la base d'une assiette représentative de 100 à 200 % des sommes effectivement consignées, relève de l'encadrement des aides dites de minimis dans le secteur agricole. Toute introduction d'une défiscalisation définitive, même conditionnée, d'une partie de ladite assiette constituerait une aide d'État, tout à fait distincte du dispositif de déduction pour épargne de précaution lui-même. Pour ces raisons, la défiscalisation de la réintégration des sommes épargnées au titre de la DEP n'est pas envisageable. La stratégie de déconfinement progressif déployée par le Gouvernement à partir du 11 mai 2020 a permis de constater une évolution favorable de la situation sanitaire et de décider la réouverture des cafés et restaurants, à partir du 2 juin 2020. Dans ce contexte, la filière vitivinicole devrait pouvoir relancer ses activités et retrouver progressivement ses débouchés. L'ensemble du Gouvernement reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation.