15ème législature

Question N° 29697
de M. Jean-Carles Grelier (Les Républicains - Sarthe )
Question écrite
Ministère interrogé > Action et comptes publics
Ministère attributaire > Économie, finances et relance

Rubrique > retraites : régimes autonomes et spéciaux

Titre > Fragilisation CARPA et CNBF

Question publiée au JO le : 19/05/2020 page : 3419
Réponse publiée au JO le : 22/12/2020 page : 9542
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. Jean-Carles Grelier attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'article 3 du projet de loi portant diverses dispositions urgentes pour faire face aux conséquences de l'épidémie de covid-19 déposé le 7 mai 2020 au Parlement, notamment sur ses conséquences concernant les caisses autonomes des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) et la caisse nationale des barreaux français (CNBF). Élevées au rang d'institution intra-professionnelle, les CARPA ont pour mission de sécuriser les opérations de maniements de fonds opérées par les avocats au nom de leurs clients, et ce depuis plus de soixante ans. Bénéficiant du statut associatif, ces caisses spécifiques œuvrent sous l'autorité des différents ordres des avocats. Sur les 164 barreaux que compte la justice française, l'on dénombre près de 122 CARPA. Entre autres choses, ce sont ces CARPA qui permettent aux avocats de percevoir les versements de l'aide juridictionnelle auxquels ils ont droit. Cette caisse finance également diverses aides en lien avec les interventions des avocats. L'article 3 de ce projet de loi prévoit « le dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et d'organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public », l'objectif poursuivi par le Gouvernement étant de renflouer un trésor public mis à mal, il est vrai, par de graves errances budgétaires. En l'espèce, au regard du droit et de la jurisprudence constante, les CARPA sont bel et bien considérées comme des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public. Dans un avis rendu public le 11 mai 2020, le Conseil d'État, s'il a bien proposé une reformulation, n'a pas entendu limiter l'étendue des termes précités ci-dessus. Ce projet de loi ouvre ainsi la voie à une possible séquestration des « disponibilités » de la CARPA, dans le but de les consigner à la Caisse des dépôts et consignations. Si la formulation actuelle de la législation est maintenue, les CARPA tomberont donc sous le giron de cet article. Une telle décision pourrait signifier la fin de toute aide juridictionnelle, pourtant destinée aux avocats venant en aide aux justiciables les plus démunis. Avec le recul, cette loi pourrait également compromettre la pérennité même des CARPA ainsi que la viabilité des ordres des avocats. Dans une commune mesure et ampleur similaire, la CNBF pourrait également être une victime directe de cette disposition législative. Répondant tout autant aux critères de qualification juridique énoncés par l'article 3, la CNBF devrait elle aussi mettre ses « disponibilités » à disposition du Trésor public. Il lui demande donc comment les CARPA et les aides juridictionnelles qu'elles sous- entendent, ainsi que la CNBF, pourront être préservées d'une fragilisation inévitable.

Texte de la réponse

La centralisation des trésoreries publiques participe à réduire l'endettement et l'appel au marché de l'État dans un contexte de mobilisation sans précédent des ressources publiques. La mutualisation des trésoreries publiques est une politique constante menée par la France depuis le XIXème siècle. Elle consiste à centraliser sur un seul compte, le compte unique du Trésor, tenu par la Banque de France, la majeure partie des trésoreries publiques (État, collectivités locales et établissements publics). Le conseil constitutionnel a estimé que cette politique « particip [ait] au bon usage des deniers publics, qui est une exigence de valeur constitutionnelle » (Décision n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003). Cette politique de centralisation ne saurait en aucune manière être assimilée à une « séquestration des disponibilités » des correspondants du Trésor, ceux-ci conservant la pleine et entière propriété de leurs fonds. Ce n'est pas plus une « appropriation » de ces fonds, l'État jouant uniquement le rôle de teneur de compte vis-à-vis de ces correspondants. Plus spécifiquement le Gouvernement a eu l'occasion de préciser à différentes reprises au cours des débats les organismes qu'il entendait exclure de facto du champ de la centralisation, et a cité en particulier les caisses autonomes des règlements pécuniaires des avocats (CARPA). L'article 58 de la Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 issu de la discussion parlementaire contient ainsi une disposition excluant spécifiquement ces entités du périmètre de la centralisation auprès du Trésor (« […] à l'exclusion (…) des caisses créées en application du 9° de l'article 53 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques »).