15ème législature

Question N° 30911
de M. Hubert Wulfranc (Gauche démocrate et républicaine - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > chasse et pêche

Titre > Vénerie du blaireau : suppression article R. 424 - 5 du code de l'environnement

Question publiée au JO le : 07/07/2020 page : 4696
Réponse publiée au JO le : 15/03/2022 page : 1752
Date de changement d'attribution: 07/07/2020
Date de signalement: 08/02/2022

Texte de la question

M. Hubert Wulfranc attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la réglementation relative à l'extension des périodes de chasse au blaireau découlant de l'article R. 424-5 du code de l'environnement. La chasse au blaireau est autorisée du 15 septembre au 15 janvier, par tir ou par vénerie sous terre. Cependant, l'article R. 424-5 permet aux chasseurs d'obtenir une dérogation à partir du 15 mai, jusqu'à la réouverture générale en septembre. Le blaireau peut donc, dans les faits, être chassé 9 mois et demi dans l'année, y compris pendant les périodes de reproduction, où il est le plus vulnérable. Or selon les études de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (l'ANSES), le blaireau dispose d'un faible dynamisme de population. L'animal se reproduit très lentement. L'élargissement des périodes de chasses représente donc une menace pour la survie de cette espèce. M. le député n'ignore pas les problématiques susceptibles d'être engendrées par la présence des blaireaux. Certaines de leurs galeries peuvent présenter un risque d'effondrement au passage de véhicule agricole, d'affaissement des chaussées ou des voies ferrées, ou encore, fragiliser des digues. Le blaireau peut marginalement, être porteur de la bactérie Mycobacterium bovis, communément appelée « tuberculose bovine », qui est transmissible à l'homme. Pour faire face à ces situations, l'article L. 427-6 du code de l'environnement, permet au préfet « d'ordonner des opérations de destruction qui prennent la forme de battues générales ou d'opérations de piégeages ». En tout état de cause, il est précisé que le blaireau n'est pas classé parmi les espèces nuisibles. En cas de contamination par la tuberculose bovine, l'ANSES préconise à défaut de solution alternative, de limiter l'élimination des blaireaux uniquement sur un rayon de 1 km2 autour des terriers contaminés. La France étant considérée comme un pays officiellement indemne de la tuberculose bovine depuis 2001 les problèmes liés à la contamination des blaireaux sont donc marginaux. Or, l'article R. 424-5 du code de l'environnement permet au préfet d'élargir de cinq mois la pratique de la vénerie du blaireau sans qu'il y ait de justification sanitaire, ni ne constitue un danger avéré pour les infrastructures publiques ou la sécurité des personnes. Le préfet peut, en application de cet article, délivrer des dérogations, uniquement sur proposition du directeur départemental des territoires et après un avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage ainsi que de la fédération départementale des chasseurs. Dans les faits, une immense majorité de préfets accorde aujourd'hui des dérogations pour pratiquer la vénerie du blaireau. Le poids prépondérant accordé par les services déconcentrés de l'État aux représentants des chasseurs n'est pas sans poser d'interrogations légitimes sur le bien-fondé des dérogations préfectorales accordées pour la vénerie du blaireau sur le fondement de l'article R. 424-5 du code de l'environnement. Il apparaît donc nécessaire d'encadrer davantage la pratique de la chasse au blaireau par vénerie sous terre en dehors de la période d'ouverture générale de la chasse. Une nécessité que se fait de plus en plus forte au regard des actes de sadisme gratuit infligés sur des blaireaux qui ont encore été constatés récemment par des militants écologistes infiltrés au sein d'équipes de vénerie. Des équipes de vénerie qui par ailleurs, saccagent les sols pendant des heures pour extraire les animaux de leurs terriers lesquels font davantage de dégâts que les galeries creusées par les animaux. Enfin, la pratique même de la vénerie du blaireau, dans le cadre d'une activité de loisir, pose en soit une question éthique. En effet, les animaux tués dans ce cadre ne sont pas consommés par les chasseurs aussi, la pratique de cette chasse en tant qu'activité de loisir sert donc uniquement à satisfaire une pulsion de tuer à des fins récréatives. L'extension de la période de pratique autorisée de la vénerie du blaireau accordée par les autorités préfectorales sur le fondement de l'article R. 424-5 du code de l'environnement sert donc uniquement, pour ses individus, à satisfaire une pulsion morbide, qui s'accompagne parfois d'actes de sadisme pur dans le cadre de la mise à mort d'animaux qui ne posent pas de problèmes avérés et ce, 9 mois par an. Aussi, il lui demande si son ministère entend supprimer l'article R. 424-5 du code de l'environnement. De même, il lui demande de préciser si son ministère entend reformer la composition des commissions départementales de la chasse et de la faune pour assurer une égale représentativité des associations de chasseurs et des associations de protection de l'environnement, le lobby de la chasse (chasseurs, piégeurs, exploitants agricoles souvent eux même chasseurs) étant actuellement prédominant au sein de cette instance.

Texte de la réponse

La vénerie sous terre est une pratique de chasse ancienne, strictement encadrée et contrôlée. Elle concerne notamment le blaireau. Les arrêtés relatifs à cette pratique sont pris par les préfets des départements concernés, après avis des Commissions départementales de la chasse et de la faune sauvage composées pour un tiers de représentants des chasseurs. Le blaireau a un comportement et un mode de vie qui ne permet pas facilement les opérations de contrôle des populations. En effet, il a principalement une activité nocturne et passe l'essentiel de la journée dans son terrier. La chasse n'étant autorisée que de jour (une heure avant le lever du soleil au chef-lieu du département jusqu'à une heure après son coucher), le contrôle des populations de cette espèce n'est réalisable que dans ce laps de temps. Permettre la maîtrise des populations de cette espèce est nécessaire parce que les galeries du blaireau peuvent endommager les infrastructures hydrauliques ou de transports ainsi qu'entraîner des dommages au matériel agricole (effondrement des galeries au passage d'engins). Il peut également présenter un risque sanitaire pour le bétail par la transmission de la tuberculose bovine. Pour autant le blaireau est une espèce fragile avec un faible taux de reproduction, c'est pourquoi la réglementation a évolué pour mieux encadrer cette pratique. Ainsi, l'arrêté du 18 mars 1982 relatif à l'exercice de la vénerie a été modifié en février 2014 pour rendre obligatoire l'utilisation de pinces non vulnérantes destinées à saisir l'animal au cou, à une patte ou au tronc. De plus, afin de limiter ses souffrances, il rend la mise à mort de l'animal capturé immédiate dès lors que celui-ci n'est pas relâché. Il a aussi permis un meilleur encadrement des armes utilisées pour la mise à mort (arme blanche ou arme à feu exclusivement) et prescrit la fin des opérations de déterrage en cas de présence d'une espèce protégée et dans les vingt-quatre heures qui suivent la chasse, la remise en état du site de déterrage. L'interdiction des championnats et compétitions, ainsi que la possibilité pour le préfet de suspendre ou de retirer l'attestation de meute en cas de manquement aux prescriptions réglementaires, ont également été ajoutées. Une nouvelle modification a été réalisée en avril 2019 pour limiter les souffrances infligées à l'animal en interdisant l'exposition de l'animal capturé aux abois ou aux morsures de chiens, avant sa mise à mort. En application de l'arrêté de février 2014, les actes indignes de la part des équipages sont verbalisables et doivent être rapportés aux agents en charge de la chasse, des sanctions étant prévues. Concernant la suppression du second alinéa de l'article R. 424-5 du code de l'environnement, la proposition d'extension de la période de vénerie est à l'initiative du directeur départemental des territoires (et de la mer). Cette proposition s'appuie sur le contexte du département. Le début de la vénerie sous terre au plus tôt le 15 mai prend en compte les connaissances sur la période de naissance et d'élevage des tout jeunes blaireautins. Les naissances ont en effet lieu dès la mi-janvier et surtout en février. Les blaireautins sont donc sevrés au 15 mai. Comme vu précédemment, l'article R. 424-5 prévoit un avis consultatif de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage qui laisse le préfet libre de suivre ou non la proposition du directeur départemental des territoires (et de la mer). La composition de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage est prévue à l'article R. 421-30. Elle est présidée par le préfet et comprend autour de représentants de l'État et de ses établissements publics : le président de la fédération départementale des chasseurs et des représentants des différents modes de chasse proposés par lui, les représentants des piégeurs, mais aussi des représentants de la forêt, le président de la chambre d'agriculture et d'autres représentants des intérêts agricoles dans le département. Des représentants d'associations agréées au titre de la protection de l'environnement et des personnalités qualifiées en matière scientifique et technique dans le domaine de la chasse ou de la faune sauvage complètent la composition de la commission. Aucune limite n'est fixée quant au nombre maximum de membres et l'article R. 421-30 stipule que la commission est composée pour un tiers de représentants des chasseurs. Ces modalités accordent au préfet de la souplesse pour la constitution d'une commission équilibrée.