15ème législature

Question N° 31871
de M. François-Michel Lambert (Libertés et Territoires - Bouches-du-Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > déchets

Titre > Projet Cigéo d'enfouissement de déchets radioactifs

Question publiée au JO le : 18/08/2020 page : 5546
Réponse publiée au JO le : 15/12/2020 page : 9313

Texte de la question

M. François-Michel Lambert alerte Mme la ministre de la transition écologique sur le projet Cigéo d'enfouissement de déchets radioactifs de haute et moyenne activité à Bure (Meuse), porté par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA). Pourtant à l'étude depuis une quinzaine d'années, le projet Cigéo n'apporte toujours pas les garanties de sûreté nécessaires à son autorisation définitive. En effet, au-delà des inquiétudes liées à l'ampleur du projet (pour stocker 99,9 % de la radioactivité totale des déchets nucléaires produits par les centrales françaises, un réseau de galeries de 270 kilomètres de long est nécessaire) et à la durée de vie de certains déchets une fois enfouis (près de 100 000 ans), la géologie du site choisi pose question. Selon France Nature Environnement (FNE), la couche d'argile qui entourerait les galeries ne serait ni assez homogène, ni assez épaisse pour contenir la radioactivité des déchets enfouis : les propriétés d'imperméabilité du sous-sol choisi seraient donc moindres et le stockage pourrait sortir des zones dites « favorables » s'il avait lieu. Par ailleurs, en 2017 et 2018, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avaient demandé à l'ANDRA de revoir un certain nombre d'aspects concernant la sécurité du projet, faisant notamment écho aux accidents graves survenus après l'enfouissement en profondeur de déchets dangereux aux Etats-Unis (WIPP) ou en Alsace (StocaMine) : à ce jour, l'ANDRA n'a pas su apporter toutes les preuves de la sûreté d'un tel stockage. Alors que certains acteurs plaident pour l'abandon du projet Cigéo et que l'ANDRA s'apprête à déposer une demande de « déclaration d'utilité publique », il lui demande de bien vouloir lui préciser quelles sont les garanties claires et fiables que le Gouvernement exigera pour la poursuite du projet.

Texte de la réponse

Aujourd'hui, 90 % des déchets radioactifs disposent d'une filière de gestion à long terme en exploitation. Parmi les déchets pour lesquels les solutions de gestion restent à concrétiser, les déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue représentent 99 % de la radioactivité pour 3 % du volume et sont destinés, s'il est autorisé, au projet de stockage géologique profond Cigéo (Centre industriel de stockage géologique). Cette solution est mise en œuvre progressivement par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra). À ce jour, le projet Cigéo poursuit sa phase de conception et de préparation des autorisations administratives, tout en s'articulant avec la démarche de poursuite des recherches sur les alternatives au stockage géologique profond qui sera précisée dans le prochain plan national de gestion des matières et déchets radioactifs actuellement en cours d'élaboration. L'élaboration de ce plan fait d'ailleurs actuellement l'objet d'une concertation publique ouverte jusqu'en mars 2021. Dans ce contexte, l'Andra a transmis le 3 août dernier un dossier de demande de déclaration d'utilité publique (DUP) du projet Cigéo, qui vise également à permettre la mise en compatibilité des documents d'urbanisme locaux pour ce qui concerne les emprises afférentes à Cigéo. Pour mémoire, la DUP ne permet pas d'engager les travaux de construction du projet de centre de stockage. Seule une autorisation de création peut autoriser la construction du centre, demande que l'Andra prévoit de déposer courant 2021. Le dossier de DUP est accessible sur le site Internet de l'Andra afin de permettre à toutes les personnes intéressées d'en prendre connaissance. Il fait également l'objet actuellement d'une instruction par l'autorité environnementale. D'une manière générale, les travaux menés par l'Andra ont donné lieu à plusieurs revues de conception, menées par des experts externes, qui ont permis de confirmer globalement les choix effectués. Pour mémoire, la conception du stockage tient compte des retours d'expérience d'accidents survenus sur des installations similaires. Ces choix ont été validés par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) en janvier 2018, par l'avis qu'elle a rendu sur le dossier d'options de sûreté (DOS) de Cigéo déposé par l'Andra en 2016. À cette occasion, l'ASN a également émis un certain nombre de recommandations. S'agissant plus spécifiquement du milieu géologique destiné à recevoir Cigéo, il a fait l'objet de travaux de caractérisation depuis plus de 20 ans au fur et à mesure du développement du projet. Cette bonne connaissance de la géologie du site de Cigéo a été reconnue par l'Autorité de sûreté nucléaire dans son avis de janvier 2018 qui indique que l'Andra a acquis une connaissance détaillée du site de Meuse/Haute-Marne, qui lui permet de confirmer la pertinence de la zone retenue pour l'implémentation du stockage. Dans le cadre de la demande d'autorisation de création de Cigéo, l'Andra devra apporter des éléments de réponse et de solution aux recommandations de l'ASN. L'autorisation de création ne pourra être délivrée qu'après une instruction de l'ASN de 3 à 5 ans. Si elle est délivrée, le projet entrera dans une phase « pilote », au cours de laquelle la démonstration de la sûreté de l'exploitation devra être pleinement apportée par l'Andra. Les résultats de la phase industrielle pilote feront l'objet d'un rapport de l'Andra, assorti d'un avis de la commission nationale d'évaluation et d'un avis de l'ASN, qui seront transmis pour examen à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). Les recommandations de l'OPECST devront être prises en compte dans un projet de loi qui pourra adapter également le cas échéant les conditions d'exercice de la réversibilité du stockage. C'est au terme de l'analyse des résultats de la phase industrielle pilote que l'ASN pourra, le cas échéant, délivrer l'autorisation de mise en service complète de l'installation.