Rubrique > dépendance
Titre > Renforcer l'accès des personnes dépendantes aux soins dentaires
M. Jean-Marc Zulesi attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les difficultés préoccupantes rencontrées par un grand nombre de personnes dépendantes, en matière d'accès aux soins et en particulier aux soins dentaires. Les personnes dépendantes, que ce soit en raison du grand âge ou d'un handicap, qu'elles soient maintenues à domicile ou résidant en institution (maisons de retraite, EHPAD ou institutions pour handicapés) sont en grande partie exclues des soins dentaires. En effet, ces personnes se trouvent dans l'incapacité de se rendre de manière autonome dans un cabinet dentaire. Il faut donc que le cabinet dentaire soit accessible (ce qui est loin d'être le cas partout, notamment en zones rurales), il faut prévoir un transport sanitaire (en principe pas remboursé), mobiliser un aidant (parfois peu disponible) accepter les retards et surtout être capable de revenir plusieurs fois si nécessaire. Ces difficultés génèrent, au sein de cette population, un renoncement majeur et grave aux soins dentaires. Une étude de la DREES en 2013 démontrait que 75 % des résidents en EHPAD n'ont pas une dentition compatible avec une alimentation normale. L'ARS Aquitaine a conduit, en 2015, une étude portant sur 475 EHPAD : 50 à 70 % des résidents auraient besoin de soins dentaires, dont la moitié en urgence. On connaît par ailleurs les conséquences cruelles de la négligence bucco-dentaire chez des personnes déjà fragilisées par l'âge ou les maladies : infections, fonte musculaire responsable d'une dénutrition, puis de chutes et de fractures. Les conséquences sur le psychique ne sont pas moins graves : isolement progressif et abandonnisme, avec désinvestissement rapide conduisant au décès. Pour remédier à ce problème de santé publique, des initiatives ont été prises. Des associations ont lancé des projets intéressants pour rapprocher les dentistes des publics les plus éloignés, qui ne se rendent plus en cabinet. Mais ces structures, quand elles n'ont pas un rayon d'action largement insuffisant au vu des besoins, pâtissent d'une dépendance aux financements publics qui fragilise considérablement leurs activités. D'autres initiatives, privées cette fois, ont également vu le jour. Mais elles sont malheureusement en butte à l'hostilité du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes. En effet, l'une de ces sociétés, contrainte de déposer son bilan dans les prochains jours, s'est lancée il y a plusieurs années dans la conception de cabinets dentaires mobiles, miniaturisés et transportables, permettant en quelques minutes de reconstituer, au sein d'une institution, un environnement de cabinet dentaire complet. Elle fournit aux chirurgiens-dentistes qui acceptent d'être partenaires, l'ensemble des moyens humains, logistiques et techniques leur permettant d'exercer hors les murs de leur cabinet. Il s'agit donc de soigner les résidents sur leur lieu de vie, sans transport, sans retard, sans accompagnement par un aidant ou un membre du personnel. Plusieurs centaines de dentistes libéraux ont ainsi pu se rapprocher d'une patientèle de plusieurs milliers de personnes, à l'occasion de journées de soins organisées au sein d'EHPAD ou d'institutions pour adultes et enfants polyhandicapés. Ces activités, bien que salutaires, sont malheureusement considérablement freinées voire anéanties par l'application stricte du code de déontologie de l'ordre des chirurgiens-dentistes (profession réglementée), qui prévoit une obligation, pour le praticien libéral, de demander et d'obtenir une autorisation ordinale pour chaque acte médical pratiqué « hors les murs ». Datant de l'après-guerre, à une époque où l'espérance de vie était bien plus faible qu'aujourd'hui et où les enjeux liés à la dépendance n'existaient presque pas, ces textes ne prévoient pas suffisamment explicitement la possibilité, pour les praticiens libéraux, de déroger à cette obligation d'autorisation. Si bien que bon nombre d'entre eux, adeptes de la médecine dentaire « ambulante », ont été intimidés par les instances ordinales, qui les ont menacés de sanctions pouvant aller jusqu'à la radiation. Il lui demande quelles mesures elle entend mettre en œuvre pour remédier à ce grave problème de santé publique et s'il est envisagé de favoriser l'activité de ces acteurs privés, à la fois générateurs d'emplois et de richesse mais aussi acteurs de la solidarité.