Contrôle des IDE - seuil de filtrage
Question de :
M. Jean-Louis Thiériot
Seine-et-Marne (3e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Louis Thiériot appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la question du contrôle des investissements directs étrangers (IDE) en France. Il lui indique que si les IDE sont évidemment une source potentielle d'enrichissement pour le pays cible, ces derniers sont cependant toujours réalisés dans l'intérêt de l'entité étrangère qui acquiert par ce biais un pouvoir sur le territoire et dans l'économie nationale. Lorsque les participations étrangères sont réalisées dans les entreprises et secteurs stratégiques de la France, elles présentent alors un risque réel pour la sécurité du pays. M. le député rappelle donc à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance l'impérieuse nécessité de contrôler ces investissements. Il lui signale à cet égard que l'Union européenne, pourtant peu incline à entraver la libre circulation des capitaux, a elle-même admis, en raison des menaces de prises de participations excessives dans les entreprises européennes de la part de la Chine, de la Russie et du Brésil, la nécessité de permettre aux États membres d'exercer un filtrage sur les IDE. Le règlement (UE) 2019/452 du Parlement et du Conseil du 19 mars 2019 établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs étrangers est ainsi entré en vigueur le 11 avril 2020, laissant les États membres libres de décider des critères de ce filtrage. Alors que l'Allemagne a fixé à 10 % le seuil de détention de droits de vote au-delà duquel le filtrage doit se faire, en France l'article R. 151-2 du code monétaire et financier issu du décret n° 2019-1590 du 31 décembre 2019 a fixé ce seuil à 25 %. M. le député s'inquiète de cette différence notable préjudiciable à la qualité du contrôle des IDE réalisés dans les entreprises françaises. Alors qu'il existe un consensus européen sur ce seuil de 10 %, il s'étonne que le texte français fasse encore état d'un seuil de 25 %, d'autant que M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance s'était lui-même engagé lors de l'Assemblée franco-allemande du 17 juin 2020 à abaisser ce seuil au 1er juillet 2020. M. le député demande donc à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance si la protection de l'économie française face aux investissements directs étrangers ne fait plus partie des priorités du Gouvernement ou s'il ne s'agit que d'un retard technique de ses services. En tout état de cause, il lui propose d'effectuer sans délai la modification à laquelle il s'était engagé. Il souhaite connaîre son avis sur ce sujet.
Réponse publiée le 3 août 2021
Le contrôle des investissements étrangers réalisés dans les entreprises sensibles constitue une préoccupation constante du ministère de l'économie, des finances et de la relance, notamment en cette période de crise sanitaire qui peut faire peser des risques accrus sur nos entreprises. L'abaissement à 10 % du seuil déclenchant la procédure de contrôle des investissements étrangers a été annoncé par le ministre lors de l'Assemblée franco-allemande du 17 juin 2020. Cette mesure est entrée en vigueur par décret le 23 juillet 2020, et vise à prendre en compte le risque d'opérations étrangères prédatrices à la suite de la crise sanitaire. Depuis le 23 juillet 2020, le seuil de détention déclenchant le contrôle de certaines opérations étrangères au sein des sociétés admises sur les marchés réglementés et ayant des activités dans l'un des secteurs essentiels à la sécurité nationale (santé, défense, énergie, réseaux de communication, média, sécurité alimentaire, etc.) a donc été abaissé temporairement, jusqu'au 31 décembre 2021, de 25 % à 10 %. La limitation du champ de cette mesure aux sociétés cotées est fondée sur le fait que le risque induit par une prise de participation minoritaire sur nos intérêts nationaux concerne principalement les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, et qui ont donc un capital par nature dispersé et difficilement contrôlable. Dans ces sociétés, une prise de participation par un actionnaire, bien que minoritaire, pourrait lui accorder une influence déterminante sur l'entreprise et ses activités sensibles. Cette dispersion de capital est beaucoup plus faible dans les sociétés non cotées et réduit ainsi l'influence qu'un actionnaire minoritaire pourrait exercer sur les décisions pouvant être prises au titre des activités sensibles de l'entreprise. Les prises de participations dans les sociétés non cotées restent donc soumises à la procédure d'autorisation de droit commun en cas de franchissement du seuil de détention de 25 % des droits de vote ou de prise de contrôle, visés à l'article R. 151-2 du code monétaire et financier. Au sein de l'Union européenne, il revient à chaque État membre de définir ses propres critères de déclenchement du contrôle des investissements étrangers, la règlementation européenne étant silencieuse à cet égard pour laisser à chaque État membre la possibilité de prendre en compte les spécificités de son tissu économique et des risques auxquels il s'estime exposé. Le dispositif français repose ainsi sur trois critères cumulatifs qui tiennent à la provenance de l'investissement, à la nature de l'opération envisagée et à la nature de l'activité de la société cible de l'investissement. Le déclenchement de la procédure de contrôle, en ce qui concerne la nature de l'opération, ne repose pas uniquement sur le franchissement d'un seuil de détention des droits de vote de la société. Il intervient également lorsqu'une prise de contrôle de la société a lieu ou lorsque tout ou partie d'une branche d'activité fait l'objet de l'acquisition. Le dispositif français permet donc de couvrir un large spectre d'opérations d'investissements étrangers conduisant ainsi à ce que pas moins de 216 opérations d'investissement soient contrôlées en 2019.
Auteur : M. Jean-Louis Thiériot
Type de question : Question écrite
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Dates :
Question publiée le 29 septembre 2020
Réponse publiée le 3 août 2021