15ème législature

Question N° 32584
de Mme Clémentine Autain (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Outre-mer
Ministère attributaire > Outre-mer

Rubrique > outre-mer

Titre > Accès à l'eau en Guadeloupe et outre-mer

Question publiée au JO le : 29/09/2020 page : 6598
Réponse publiée au JO le : 10/11/2020 page : 8039

Texte de la question

Mme Clémentine Autain attire l'attention de M. le ministre des outre-mer sur les problèmes d'accès à l'eau en Guadeloupe et en outre-mer. Alors que la rentrée est perturbée sur l'ensemble du territoire par les conséquences de la pandémie de coronavirus, la Guadeloupe a vu pas moins de quarante écoles, deux lycées et un collège fermés car n'étant pas approvisionnés en eau. Si cette pénurie entraîne immédiatement l'impossibilité d'accomplir les gestes barrière, c'est en réalité le droit d'accès à l'eau potable qui se trouve dénié. Cette situation dramatique trouve sa source à la fois dans un réseau d'acheminement vétuste et dans la grande difficulté financière à laquelle est confronté le syndicat intercommunal d'alimentation en eau et assainissement, qui bénéficie d'une délégation de service public. La dissolution de cet organisme, voulu par l'État, a conduit les salariés à se mettre en grève. Mme la députée rappelle à M. le ministre que le droit d'accès à l'eau potable doit être garanti à l'ensemble des habitants du pays, peu importe le territoire où ils résident. Une ressource de cette importance doit être gérée dans le sens de l'intérêt général et ne saurait être, alors que la crise climatique actuelle rend encore plus difficile son accès pour le plus grand nombre, laissée aux mains d'un opérateur privé. Mme la députée invite donc M. le ministre à investir massivement afin de rénover le réseau d'acheminement d'eau en Guadeloupe, ainsi qu'à engager un dialogue immédiat avec les salariés du SIAEAG afin de trouver une solution convenable pour tous et permettre au plus vite la redistribution de l'eau sur ce territoire. Au-delà de cette situation, Mme la députée constate que le défaut d'accès à l'eau potable est un problème persistant en outre-mer, connu depuis de nombreuses années. Ceci constitue une vraie rupture d'égalité concernant pourtant un droit fondamental. Elle lui demande s'il compte traiter sérieusement le problème, en débloquant les fonds suffisants pour la rénovation des réseaux d'acheminement et en favorisant systématiquement la mise en place de régies publiques sur ces territoires.

Texte de la réponse

L'ensemble des départements et régions d'outre-mer (DROM) sont confrontés, à différents degrés, à des difficultés structurelles d'accès à l'eau. La Guadeloupe ne fait pas exception et connait depuis 2013 des épisodes récurrents de crise d'alimentation en eau potable. Les causes des difficultés d'alimentation en eau potable en Guadeloupe sont connues. Les difficultés de gouvernance persistantes depuis de nombreuses années du principal acteur de l'eau et de l'assainissement du territoire, le Syndicat intercommunal d'alimentation en eau et d'assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) ont entraîné un défaut considérable d'entretien et de renouvellement des infrastructures, conduisant à des rendements très bas (40%, voire 20% dans certains cas, de l'eau prélevée dans le milieu arrive au robinet des usagers) et une grande fragilité des réseaux. Les pertes d'eau élevées non facturées, les charges élevées et les recettes limitées en raison de taux moyens d'impayés particulièrement élevés (37% en 2018, 50% en 2019) ne permettent pas aux opérateurs de disposer de capacités d'autofinancement suffisantes. Ces difficultés structurelles ont nécessité l'organisation régulière de tours d'eau de manière programmée depuis plusieurs années. Le contexte récent de la crise sanitaire, a nécessité la mise en place par les services de l'Etat d'un plan d'urgence et la réquisition d'opérateurs pour réparer plus de 2 000 fuites identifiées sur le réseau de distribution d'eau potable : plus de 11 millions d'euros ont ainsi été débloqués par le ministère des outre-mer pour permettre la réparation des fuites et la distribution d'eau potable à l'ensemble des usagers. Au-delà de l'urgence, des travaux doivent être engagés sur le long terme pour assurer de manière pérenne un service public de l'eau et de l'assainissement fiable et performant. C'est dans cette perspective que l'Etat a lancé, en mai 2016, le plan Eau Dom afin d'accompagner l'ensemble des DROM dans l'amélioration du service rendu aux usagers en matière d'eau potable et d'assainissement, travailler au renforcement des capacités techniques et financières des collectivités et opérateurs par le biais de contrats de progrès et la planification des investissements à travers une programmation pluriannuelle. A ce titre, la Guadeloupe, entre 2016 et 2020, a bénéficié de subventions d'investissements considérables : 15 millions d'euros du Fonds exceptionnel d'investissement, et dans le cadre de la contractualisation, 60 millions d'euros du Fonds européen de développement régional, 4 millions d'euros du Contrat de plan Etat-Région et du Contrat de convergence et de transformation. Le plan de relance prévoit également 50 millions d'euros d'investissement dans le domaine de l'eau pour les territoires d'outre-mer, dont 10 millions d'euros pour la Guadeloupe. La gestion de la crise de l'eau et la mise en œuvre de mesures de long terme ne peuvent être dissociées de la situation du SIAEAG, opérateur de production majoritaire qui exerce la compétence eau et assainissement sur le périmètre de trois EPCI. A ce jour, le SIAEAG n'est plus en mesure de faire les investissements nécessaires pour entretenir le réseau, de payer le salaire de ses agents et n'a pas été en mesure d'accompagner la signature des contrats de progrès (seules 2 des 6 collectivités gestionnaires ont signé leur contrat). L'Etat a donc pris ses responsabilités et est intervenu très directement afin d'assurer la continuité du service public de l'eau, la situation du syndicat n'offrant pas d'autre alternative que la dissolution. Cette dernière interviendra le 1er décembre 2020, après une procédure menée auprès du Conseil d'Etat, par décret en vertu de l'article L. 5212-33 du CGCT. Toutefois, il ne s'agit là que d'une étape qui doit permettre la mise en place de la structure unique à l'échelle de la Guadeloupe pour le bénéfice des usagers.