15ème législature

Question N° 35557
de M. Dimitri Houbron (Agir ensemble - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, emploi et insertion
Ministère attributaire > Travail, emploi et insertion

Rubrique > travail

Titre > Conventions collectives rattachées dans le cadre des rapprochements de branches

Question publiée au JO le : 12/01/2021 page : 177
Réponse publiée au JO le : 26/04/2022 page : 2851

Texte de la question

M. Dimitri Houbron attire l'attention de Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion sur la situation des conventions collectives rattachées dans le cadre des rapprochements de branches. Il rappelle que le cadre des fusions entre conventions collectives a été posé par la réforme de la formation professionnelle de 2014 et par la loi travail de 2016 qui a fixé un objectif de 200 branches à atteindre en trois ans. Le chantier de la restructuration des branches a pour objectif de remédier à l'éparpillement des branches professionnelles, dans le but de renforcer le dialogue social au sein de ces dernières et de leur permettre de disposer de moyens d'action à la hauteur des attributions que la loi leur reconnaît. Ainsi le code du travail laisse aux partenaires sociaux des branches concernées un délai de cinq ans pour harmoniser leur corpus conventionnel respectif (comme les conventions collectives, les annexes, et autres accords thématiques). Plus précisément, les partenaires sociaux doivent remplacer, par des stipulations communes, les stipulations des branches fusionnées « qui régissent des situations équivalentes » (art L. 2261-33). Ainsi, dans l'attente de l'aboutissement des négociations d'harmonisation et pendant ce délai de cinq ans, les conventions collectives préexistantes avant la fusion peuvent être maintenues, et les différences temporaires de traitement entre salariés résultant de la fusion ne peuvent être invoquées pendant ce délai. Le principe d'égalité de traitement recommencera à s'appliquer à l'issue du délai d'harmonisation, l'ensemble des salariés de la nouvelle branche fusionnée ayant vocation à être couverts par un seul et même corpus conventionnel. À l'expiration de ce délai de cinq ans, à défaut d'un accord de remplacement des stipulations des anciennes conventions collectives par des stipulations communes, les stipulations de la convention de la branche rattachée cessent de s'appliquer et l'ensemble des salariés et des employeurs de cette ancienne branche sont désormais couverts par la convention collective de la branche de rattachement. C'est là un point qui pose difficulté, car il n'y a pas de précision claire sur le sort de la convention collective rattachée dès lors qu'un échec des négociations apparait. Il rappelle que dans sa décision rendue le 29 novembre 2019 le Conseil constitutionnel, a posé une réserve d'interprétation à cette règle d'extinction des stipulations conventionnelles de la branche rattachée, dans le sens où si les stipulations de la convention collective de la branche rattachée régissent des situations spécifiques à cette ancienne branche, elles continueront de s'appliquer au-delà des cinq ans. Il pourrait donc y avoir là une crainte que la convention rattachée ne disparaisse jamais, contraignant ainsi les employeurs à cumuler les dispositions des deux conventions, même au terme des cinq ans ce qui pourrait aussi engendrer des impacts financiers importants. De plus une telle situation ne peut qu'être contraire à l'esprit de la réforme dans sa volonté de réduire le nombre de branches. À cet effet, il souhaite avoir des précisions sur ce qu'il adviendrait d'une convention collective rattachée à défaut d'accord dans le délai de 5 ans pour définir des stipulations communes avec la branche de rattachement.

Texte de la réponse

L'article L. 2261-33 du code du travail prévoit un délai de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la fusion pour permettre, par voie d'accord collectif, le remplacement des stipulations des conventions collectives fusionnées par des stipulations communes lorsqu'elles régissent des situations équivalentes. Pendant ce délai de cinq ans, il appartient aux partenaires sociaux représentatifs dans le champ issu de la fusion de procéder à l'harmonisation des corpus conventionnels. Harmoniser ne signifie cependant pas uniformiser, car le code du travail permet l'existence de stipulations spécifiques pour les salariés qui ne sont pas placés dans des situations équivalentes, tout comme cela est d'ores et déjà possible dans toute convention collective, indépendamment d'un contexte de fusion. L'article L. 2261-33 précise que, à défaut d'accord conclu dans le délai de cinq ans, ce sont les stipulations de la convention collective de la branche de rattachement qui s'appliquent à l'ensemble du champ fusionné. Dans sa décision n° 2019-816 QPC du 29 novembre 2019, le Conseil constitutionnel a précisé que cette application concernait les stipulations de la convention collective de la branche de rattachement qui régissent des situations qui sont équivalentes dans chacune des branches fusionnées. En revanche, si une situation est spécifique à la branche rattachée et, par conséquent, non régie par la convention collective de la branche de rattachement, les stipulations qui s'y rapportent dans la convention rattachée continuent de s'appliquer. Ainsi, à l'issue du délai d'harmonisation et en l'absence d'accord, toutes les situations équivalentes sont régies par les stipulations conventionnelles de la branche de rattachement (sauf à enfreindre le principe d'égalité de traitement, dont l'article L. 2261-33 du code du travail suspend l'invocabilité uniquement pendant le délai d'harmonisation de cinq ans), tandis que les situations spécifiques à la branche rattachée demeurent régies par les stipulations conventionnelles de la branche rattachée. Il incombe aux partenaires sociaux représentatifs sur le champ fusionné de mettre en lumière d'éventuelles situations spécifiques au sein de la branche rattachée, non couvertes par les stipulations conventionnelles de la branche de rattachement. À défaut d'harmonisation complète dans le délai de cinq ans, il sera en effet de leur responsabilité d'éclairer les employeurs et salariés de la branche quant au droit applicable, afin de réduire les risques d'insécurité juridique.