15ème législature

Question N° 35
de M. Jean-Paul Lecoq (Gauche démocrate et républicaine - Seine-Maritime )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > maladies

Titre > procès de l'amiante

Question publiée au JO le : 20/07/2017
Réponse publiée au JO le : 20/07/2017 page : 1683

Texte de la question

Texte de la réponse

PROCÈS DE L'AMIANTE


M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Jean-Paul Lecoq. Monsieur le Premier ministre, l'amiante tue 3 000 personnes par an. Depuis 2004, 45 500 personnes sont mortes. Or, vingt ans après l'interdiction de ce matériau, les victimes attendent toujours un procès au pénal.

En effet, il est avéré que les maladies ayant causé le décès de ces ouvriers sont dues à l'amiante. De même, il est attesté que cette relation de cause à effet était connue bien avant l'interdiction de la fabrication et de la vente de l'amiante en 1997, sans qu'aucune disposition n'ait été prise pour remédier à ce danger mortel. Il y a une accumulation de fautes, et qui dit faute dit recherche de responsabilités dans la mort de milliers de salariés et retraités. Il suffit de constater l'ampleur du désamiantage des bâtiments depuis 1997 pour estimer la hauteur de cette faute massive, qui a consisté à ne rien faire pendant si longtemps.

Aujourd'hui, le parquet suggère de cesser les investigations, prétendant que les responsables de cette tragédie ne peuvent être identifiés et n'auraient pas de comptes à rendre, que le patronat qui exposait les ouvriers à ce poison n'y était pour rien, que les entreprises qui l'utilisaient, le fabriquaient et en tiraient profit n'y étaient pour rien, que l'État resté passif avant 1997 alors même que d'autres pays avaient légiféré n'y était pour rien.

Ce rejet de responsabilité serait indigne d'une République qui doit protéger les siens quelle que soit leur condition sociale, d'autant qu'à l'étranger, des poursuites ont été engagées et des condamnations appliquées contre ceux qui ont tué pour s'enrichir. En France, le parquet vient de nous dire que cette catastrophe sanitaire s'est transformée chez nous, tel le nuage de Tchernobyl, en crime sans coupable ! En revanche, les dirigeants italiens de l'une des entreprises faisant actuellement l'objet d'investigations en France ont été condamnés dès 2009 à Turin.

Monsieur le Premier ministre, vous qui avez séjourné longtemps dans une grande ville industrielle et côtoyé ces victimes, je vous demande d'agir pour ne pas enterrer une seconde fois celles et ceux qui ont payé de leur vie une faute mortelle de grande ampleur frappant des générations d'ouvriers. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, NG, FI et sur plusieurs bancs des groupes REM, MODEM, LR et LC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député, je comprends la détresse de vos territoires durement touchés par l'amiante, notamment celle des ouvriers dockers. J'ai eu l'occasion d'échanger à ce sujet avec M. le Premier ministre, qui est également très attentif aux territoires et aux ouvriers touchés par l'amiante.

Je n'ai pas à m'exprimer sur une décision de justice. En revanche, l'État doit prendre ses responsabilités et accompagner au mieux les personnes touchées.

Aujourd'hui, la branche AT-MP – accidents du travail et maladies professionnelles – de la Sécurité sociale accompagne ces ouvriers victimes de maladies professionnelles. L'amiante représente 17 % des dépenses de la branche AT-MP, soit 2 milliards d'euros.

M. Christian Hutin. Pas des milliards, des millions !

Mme Agnès Buzyn, ministre . Vous avez raison.

Deux dispositifs d'indemnisation ont été créés. Le premier est le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante – FIVA –, pour lequel 20 000 demandes ont été enregistrées et traitées jusqu'à présent. Le second est l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante – ACAATA –, que touchent 90 000 salariés. Il faut savoir que 18 000 personnes ont d'ores et déjà été reconnues en maladie professionnelle, dont 3 700 en 2015. Ces dispositifs doivent maintenant être encore améliorés. Ils méritent des ajustements techniques que nous allons mettre en œuvre dans le cadre du nouveau contrat d'objectifs et de performance entre l'État et le FIVA, qui doit être signé en 2017.

L'État continuera de prendre ses responsabilités, puisque nous savons que ces maladies risquent d'augmenter encore dans les prochaines années. Nous veillerons à ce que ces dispositifs répondent aux besoins des personnes. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)