15ème législature

Question N° 37352
de Mme Laurence Trastour-Isnart (Les Républicains - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > anciens combattants et victimes de guerre

Titre > Réconciliation franco-algérienne

Question publiée au JO le : 23/03/2021 page : 2449
Réponse publiée au JO le : 07/09/2021 page : 6636

Texte de la question

Mme Laurence Trastour-Isnart interroge M. le Premier ministre sur son avis concernant certaines préconisations relatives à la réconciliation franco-algérienne. Le Président de la République a confié, en juillet 2020, à l'historien Benjamin Stora le soin de préparer un rapport sur « les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d'Algérie » en vue de « dresser un état des lieux juste et précis » pour permettre « la réconciliation entre les peuples français et algérien ». En janvier 2021, son rapport a été remis avec une trentaine de préconisations telles que « l'entrée au Panthéon de Gisèle Halimi, grande figure féminine d'opposition à la guerre d'Algérie » ou encore « faire des quatre camps d'internement situés sur le territoire français des lieux de mémoire ». Sur ce rapport, l'association Le souvenir français a fait part de son étonnement concernant l'attention portée aux « Morts pour la France » en craignant que la réconciliation visée ne prenne pas suffisamment en compte certaines mémoires des différentes parties. La réconciliation ne peut pas se faire dans un seul sens, une vision hémiplégique ne saurait être acceptable. À cette fin, l'association a publié onze préconisations qui seraient à même de contribuer à la réconciliation franco-algérienne. Parmi celles-ci se trouvent par exemple « la sauvegarde des tombes familiales dans les cimetières communaux en France dans lesquelles sont inhumés des combattants "Morts pour la France" en Algérie » ou encore « le regroupement en Algérie de tous les corps de combattants "Morts pour la France" restitués aux familles et inhumés dans des cimetières communaux algériens aujourd'hui à l'abandon et la création en Algérie d'un Mémorial national français géré par l'État français ». Aussi souhaite-t-elle connaître sa position sur les exemples précités et plus largement sur les onze préconisations de l'association Le souvenir français.

Texte de la réponse

Le Président de la République, comme le Gouvernement, ont pour priorité le rapprochement et la compréhension mutuels des mémoires de la guerre d'Algérie dans le respect de chacune d'entre-elles et la vérité historique. C'est dans cette optique que sont étudiées les préconisations du rapport sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d'Algérie remis en janvier 2021 par Benjamin Stora au Président de la République. Lors des journées nationales commémoratives consacrées à la guerre d'Algérie, le 19 mars, le 25 septembre et le 5 décembre, ces mémoires sont rappelées. Elles ciblent autant les souffrances des rapatriés, des anciens supplétifs de l'armée française et de leurs proches, que l'engagement des soldats de métier et des appelés. Les expositions du ministère des Armées et les opérations mémorielles organisées ou soutenues par le Gouvernement permettent un vrai dialogue entre ces différentes mémoires. Concernant les tombes des soldats morts pour la France, elles font l'objet d'un entretien perpétuel par l'Etat. Ainsi en Algérie, les cimetières du Petit Lac et de Mers el-Kébir, placés sous la responsabilité de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, ont fait l'objet de mesures d'entretien et de rénovation pour plus d'1,5 millions d'euros entre 2008 et 2020. L'entretien des carrés militaires non-regroupés relève des autorités locales algériennes. Cependant, lorsque leurs corps ont été restitués aux familles en vertu des articles L. 521-1 à L. 523-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), l'entretien incombe aux proches. L'ensemble des noms des soldats « morts pour la France » sont présents sur le site internet « Mémoire des hommes » ainsi que sur les colonnes du Mémorial de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, haut lieu de la mémoire nationale, pour ce qui concerne les « morts pour la France » durant la guerre d'Algérie. L'association SOLDIS, présidée par général Henry-Jean FOURNIER et soutenue par le ministère des armées, a élaborée une liste des soldats français disparus lors de la guerre d'Algérie. Se voulant aussi complète que possible, cette liste des militaires français disparus a réuni toutes les informations disponibles afin de permettre d'entreprendre, le moment venu, la recherche des corps, leur identification et leur inhumation. Elle est actuellement examinée par le service historique de la Défense (SHD). Concernant l'attribution des mentions « morts pour la France » durant la guerre d'Algérie, elles s'effectuent suivant les règles décrites aux articles L. 511-1 et suivants du CPMIVG. Sur le sujet des personnes civiles non-fonctionnaires victimes de l'OAS, le Conseil d'Etat a estimé qu'elles n'étaient pas décédées du fait de violences constituant une suite directe de faits de guerre, l'OAS ne pouvant être considérée comme belligérant (avis n° 367.315 du 13 février 2003). Le ministère des Armées mène de nombreuses actions soutenant la transmission des mémoires des Algériens, quelle que soit leur origine, mais également des anciens harkis et de leurs proches. Ainsi, les anciens sites des camps de transit et hameaux de forestage ayant hébergé des anciens supplétifs et leurs familles sont désormais pourvus de plaques et panneaux pédagogiques installés par l'ONACVG. Ce dernier a également mené des recherches visant à localiser les cimetières situés au niveau des anciens camps, notamment Rivesaltes. Les expositions de l'ONACVG « Parcours de harkis et de leurs familles », « La guerre d'Algérie, histoire commune, mémoires partagées ? » ainsi que celle du SHD consacrée à l'engagement militaire des anciens supplétifs sont ou seront largement diffusées sur l'ensemble du territoire. Elles facilitent également les opérations de témoignage en milieu scolaire. Plus généralement, la contribution à la défense et à la libération de la France de ceux nés en Algérie de toutes origines tient une grande place dans les actions du Gouvernement. C'est le cas par exemple du recueil biographique des combattants africains, élaboré et publié par le ministère des Armées à destination des élus locaux afin qu'ils puissent s'y référer pour le choix des noms des rues ou autres infrastructures. Les hauts lieux de la mémoire nationale et les cycles mémoriels organisés par le ministère des Armées, récemment celui du centenaire de la Grande Guerre, permettent également de rappeler ce que notre pays doit aux Algériens de toutes origines.