15ème législature

Question N° 3752
de Mme Marielle de Sarnez (Mouvement Démocrate et apparentés - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > Internet

Titre > Usurpation d'identité

Question publiée au JO le : 12/12/2017 page : 6263
Réponse publiée au JO le : 27/02/2018 page : 1733
Date de signalement: 13/02/2018

Texte de la question

Mme Marielle de Sarnez attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des personnes victimes d'usurpation d'identité. Le coût de cette criminalité et de cette cybercriminalité est estimé à plusieurs milliards d'euros par an. Chaque année, ce sont des centaines de milliers de personnes qui sont ainsi victimes de ce délit, avec des conséquences parfois dramatiques. Lorsque l'usurpation a pour objet le crédit à consommation, un très grand nombre de ces victimes se retrouvent dans une situation d'endettement intenable, et engagés malgré eux dans des procédures judiciaires longues pour faire reconnaître leur innocence. La loi du 14 mars 2011 a créé un nouveau délit d'usurpation d'identité. C'est évidemment une avancée. Il semble toutefois, à en croire de très nombreux témoignages, que se faire reconnaître victime relève du parcours du combattant. Pourrait-on prévoir, comme le préconisent plusieurs associations de victimes, une plateforme de recueil de plaintes et augmenter les campagnes de sensibilisation comme c'est le cas au Royaume-Uni ? Lorsque l'usurpation d'identité a pour objet le prêt à la consommation, ne peut-on pas responsabiliser les organismes de prêt et les obliger par exemple à recourir au contrôle via la visioconférence comme c'est le cas dans les pays anglo-saxons ? Plus généralement, elle lui demande si une réflexion est en cours, visant à renforcer l'arsenal de protection des victimes d'usurpation d'identité.

Texte de la réponse

Il est souvent recouru à l'usurpation d'identité pour commettre des actes illicites. De ce fait, ce comportement délictueux peut relever de plusieurs qualifications pénales, notamment de l'escroquerie ou de l'usage de faux. Toutefois, l'usurpation d'identité pouvant également être une fin en soi, elle fait l'objet de deux incriminations spécifiques. D'une part, l'article 434-23 du code pénal punit le fait de prendre le nom d'un tiers, dans des circonstances qui ont déterminé ou auraient pu déterminer contre celui-ci des poursuites pénales de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000€ d'amende. D'autre part, la loi no 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure a inséré un article 226-4-1 dans le code pénal, par lequel est créée une nouvelle infraction d'usurpation d'identité incluant le champ des communications électroniques et ne se limitant pas aux seules circonstances susceptibles de déterminer des poursuites pénales. L'article 226-4-1 du code pénal punit en effet d'un an d'emprisonnement et de 15 000€ d'amende le fait d'usurper l'identité d'un tiers ou de faire usage d'une ou plusieurs données de toute nature permettant de l'identifier, en vue de troubler sa tranquillité ou celle d'autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération. S'il est souvent difficile d'identifier et d'appréhender l'auteur d'une usurpation d'identité, la fraude à l'identité fait l'objet, à raison notamment des conséquences particulièrement préjudiciables pour les victimes, d'une attention constante de la part des parquets, tant dans les modalités de traitement de ces procédures que dans le choix des qualifications retenues et de la réponse pénale. Le ministère public participe également au rétablissement des victimes dans leurs droits et identité, par le recours à la procédure administrative de régularisation du casier judiciaire sur signalement du procureur de la République ou sur le fondement de l'article 778 du code de procédure pénale en sollicitant, par requête adressée à la juridiction qui a prononcé la condamnation, la rectification des mentions du casier judiciaire. Le droit civil offre également des possibilités de réparation fondée sur l'article 9 du code civil relatif au droit au respect de la vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée. En cas d'urgence, ces mesures peuvent être ordonnées en référé. En outre, il peut être précisé qu'afin de faciliter le signalement de ces faits, les victimes d'usurpation d'identité sont éligibles au dispositif de la pré-plainte en ligne, qui a pour objet de leur permettre d'effectuer une pré-déclaration sur un site internet accessible à tous les citoyens (https://www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr/). La victime peut ainsi obtenir un rendez-vous auprès d'un fonctionnaire de police ou d'un militaire de la gendarmerie afin de signer la plainte, après fourniture d'éventuels compléments. Par ailleurs, deux plateformes de recueil de plaintes et de signalements, visant à lutter contre les escroqueries commises sur internet, vont être expérimentées au cours de l'année 2018. La plateforme PERCEVAL, mise en œuvre par la Direction générale de la gendarmerie nationale, a pour objet d'enregistrer les signalements d'usagers victimes d'escroqueries à la carte bancaire, trompés le plus souvent par l'usurpation de l'identité d'un tiers. La plateforme THESEE, mise en œuvre par la Direction générale de la police nationale, a pour objet d'enregistrer les plaintes et signalements des usagers victimes de « cyber escroqueries », notamment d'usurpations de boîte mail. Au regard de l'ensemble de ces éléments, il n'est pas envisagé de nouvelles modifications législatives, l'arsenal juridique existant étant suffisant pour réprimer ce type de comportement.