Question écrite n° 3811 :
Laïcité sur l'ensemble des territoires de la République

15e Législature

Question de : Mme Marie-Noëlle Battistel
Isère (4e circonscription) - Nouvelle Gauche

Mme Marie-Noëlle Battistel interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les exceptions aux droits des cultes issus de la loi de 1905 dans différents territoires de la République française. La Constitution de 1958, reconnaît la France comme une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. S'appuyant sur son texte fondamental mais aussi sur la loi de 1905, séparant l'Église et l'État, le législateur a fondé une démocratie laïque assurant des droits aux citoyens et retirant à l'État - qui ne reconnaît et ne salarie aucun culte - la possibilité de régir le fonctionnement interne des organisations religieuses. L'histoire a toutefois exclu un certain nombre de territoires de la République de l'application de ces règles. Ainsi l'Alsace-Moselle vit sous le régime du Concordat, la Guyane reste sous celui de l'ordonnance royale du 27 août 1828 et les collectivités d'outre-mer que sont la Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que la Nouvelle-Calédonie et Mayotte sont régies par les décrets-loi de 1939 dits « Mandel ». Elle souhaiterait connaître le nombre officiel de ministres du culte et les moyens publics dévolus globalement par l'État à la vie de ces religions sur l'ensemble de ces territoires. Elle l'interroge également sur sa volonté, ou non, de remettre en cause ce fonctionnement et d'appliquer la laïcité sur l'ensemble du territoire de la République française.

Réponse publiée le 10 juillet 2018

L'application du régime des cultes en vigueur en Alsace-Moselle a généré en 2017 un coût financier pour l'Etat de l'ordre de 39 millions d'euros pour la rémunération, charges comprises, de 1 254 emplois cultuels occupés au 31 décembre 2017 et 1,3 million d'euros pour la pérennisation du patrimoine immobilier religieux et le soutien aux frais d'administration des cultes. Dans sa décision no 2012-297 QPC du 21 février 2013, le Conseil constitutionnel a jugé que ce financement n'était pas contraire à la Constitution. Par ailleurs, sept territoires d'outre-mer - Guyane, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Nouvelle-Calédonie et Terres australes et antarctiques françaises - ne sont pas soumis à la loi du 9 décembre 1905 portant séparation des Eglises et de l'Etat et sont régies par le décret Mandel du 16 janvier 1939, modifié par le décret du 6 décembre 1939. Ce décret permet aux cultes de s'organiser en mission religieuse représentée par un conseil d'administration, lui-même placé sous la tutelle du préfet. Les cultes peuvent également s'organiser sous la forme d'association simplement déclarée régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Le culte catholique en Guyane et le culte protestant en Polynésie française sont, en outre, régis respectivement par l'ordonnance royale du 27 août 1828 concernant le Gouvernement de la Guyane française et par le décret du 23 janvier 1884 organisant les églises protestantes dans les établissements français d'Océanie, modifié par le décret du 5 juillet 1927. Dans ces territoires d'outre-mer, la rémunération des ministres du culte est à la charge des cultes eux-mêmes (missions religieuses ou associations), sauf en Guyane où, en vertu de l'ordonnance royale du 27 août 1828 et de la loi du 13 avril 1900 portant fixation du budget général des dépenses et recettes de l'exercice 1900, la rémunération des ministres du culte catholique agréés par arrêté du préfet est à la charge de la collectivité territoriale de Guyane. À Saint-Pierre-et-Miquelon, la rémunération du clergé catholique est subventionnée par le conseil général depuis 1940. L'entretien et la réparation des édifices du culte de ces territoires d'outre-mer sont également à la charge des cultes. Il existe des exceptions comme sur le reste du territoire français. La plupart des édifices catholiques construits en Guyane avant 1939 appartiennent au domaine public de la collectivité territoriale de Guyane ou des communes. À Saint-Pierre-et-Miquelon, les édifices du culte catholique appartiennent aux communes qui, bien que ne possédant pas de titre de propriété, assurent les réparations extérieures et le chauffage, tandis que les travaux plus importants sont à la charge de la mission religieuse catholique et des paroissiens. Dans les Terres australes et antarctiques françaises, les lieux de culte, à savoir trois chapelles et un oratoire, et leur mobilier appartiennent au domaine public de l'Etat. En outre, le Conseil constitutionnel a estimé que la consécration du principe de laicité dans la Constitution ne conduisait pas à remettre en cause les dispositions législatives ou réglementaires particulières applicables dans plusieurs parties du territoire de la République, relatives notamment au droit des cultes. Celles-ci peuvent rester en vigueur « tant qu'elles n'ont pas été remplacées par les dispositions de droit commun ou harmonisées avec elles » ( Conseil constitutionnel, 5 août 2011, n° 2011-157 QPC, Société SOMODIA, considérant 4). Le Gouvernement n'entend donc pas remettre en cause ces régimes juridiques particuliers. Le Conseil constitutionnel a toutefois indiqué que le champ d'application de ces dispositions ne saurait être élargi et que leur aménagement ne peut se faire qu'à la condition que « les différences de traitement qui en résultent ne sont pas accrues ».

Données clés

Auteur : Mme Marie-Noëlle Battistel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Religions et cultes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 12 décembre 2017
Réponse publiée le 10 juillet 2018

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