Vieillissement critique de la population aux Antilles
Publication de la réponse au Journal Officiel du 8 mars 2022, page 1629
Question de :
Mme Manuéla Kéclard-Mondésir
Martinique (2e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Mme Manuéla Kéclard-Mondésir appelle l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur le vieillissement de la population aux Antilles. Un rapport interministériel sur l'adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires à la transition démographique, rendu public le 26 mai 2021, relève la situation alarmante des départements et collectivités des Antilles. En 1990, détaille le rapport, la part des seniors (65 ans et plus) dans la population totale était de 8,4 % en Guadeloupe et 9,5 % en Martinique contre 14 % dans l'hexagone. Vingt ans plus tard, le vieillissement s'est fortement accentué en Guadeloupe et en Martinique qui ont rattrapé dès 2013 le niveau de la métropole. D'ici 2050, le taux des seniors en Guadeloupe sera de 37,7 % faisant passer ce département de la 86ème place au sixième rang des départements, tandis que la collectivité de Martinique atteindra les 42,3 % la faisant accéder de la soixante-treizième place au premier rang des départements les plus vieux de France. Or cette situation, déjà préoccupante en soi, s'inscrit dans un contexte de précarité sociale et de retard de développement aggravés. En Martinique, 30 % des plus de 75 ans ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté contre 8 % en moyenne dans l'Hexagone (alors même que le taux de pauvreté y est d'un tiers inférieur à celui de la France métropolitaine !). De plus, aucune infrastructure n'est prévue: la Martinique ne dispose que de 45 places en lits médicalisés pour personnes âgées pour 1 000 habitants de plus de 75 ans contre 104 % dans l'Hexagone. Il y a donc urgence à ce que l'État et les collectivités territoriales élaborent un véritable plan stratégique Antilles 2050. Elle lui demande en conséquence ce qu'elle compte mettre en œuvre à brève échéance.
Réponse publiée le 8 mars 2022
En Outre-mer, toutes les études prévoient de manière convergente que, d'ici à 2030, la population de Guadeloupe et de Martinique sera la plus âgée de toutes les régions de France. Pour répondre à ce défi, plusieurs actions ont été mises en place. En 2015, la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement apporte les premières réponses en termes de financement (Allocation personnalisée d'autonomie (APA), revalorisation des plafonds d'aides, etc.) et introduit la notion du « bien vieillir ». Le Ségur de la Santé apporte de nouvelles réponses en termes de financement. En effet, l'Etat réinvestit dans le secteur médico-social aux Antilles, dans le cadre d'une collaboration étroite entre les Agences régionales de santé et les collectivités territoriales compétentes pour adapter l'offre aux besoins. A ce titre, en 2021, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a engagé des crédits pour des investissements immobiliers, dans le cadre d'un plan de rattrapage de 20 millions d'euros spécifique à la Corse et aux départements et régions d'outre-mer. Ces financements ont pour objectif la restauration et le développement des infrastructures médico-sociales en Martinique et Guadeloupe. En outre, la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale favorise le développement de l'habitat inclusif dans le parc social. En complément de la dérogation existante aux règles d'attribution de logements sociaux en faveur des personnes en perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap, il permet, pour les seuls logements bénéficiant de cette dérogation, la sous-location comme modalité de montage des projets ainsi que la colocation en sous-location. En plus des logements concernés, pourraient également être loués au porteur de projet d'habitat inclusif les locaux communs nécessaires pour y mettre en œuvre le projet de vie sociale et partagée mentionné à l'article L. 281 1 du code de l'action sociale et des familles. Cette loi clarifie et sécurise également le cadre juridique des logements-foyers habitats inclusifs en les définissant mieux et en permettant leur développement dans les départements et régions d'outre-mer. De plus, le ministère des outre-mer a lancé une étude prospective sur les conséquences du phénomène du vieillissement aux Antilles et leur prise en compte par les politiques publiques. Les travaux, commencés en 2021, de nature systémique et en lien avec les acteurs du territoire et les ministères concernés, ont permis d'établir un diagnostic prospectif de la situation du vieillissement démographique aux Antilles. La poursuite des travaux vise à faire émerger des scénarios d'évolution possibles de prise en charge pluridisciplinaire des seniors aux Antilles puis à identifier la trajectoire souhaitée en termes de politiques publiques. Ainsi, la démarche engagée par le ministère contribue à identifier les opportunités d'une meilleure prise en charge des seniors aux Antilles, notamment par le biais d'une stratégie de développement économique durable pour les deux territoires. Les résultats de cette étude, attendus au 1er trimestre 2022, viendront nourrir le dialogue entre l'Etat et la collectivité territoriale de Martinique et le département de Guadeloupe qui sont des acteurs centraux de la réponse à ce défi de société qu'est le vieillissement et sont chargées, en première ligne et en lien avec les ARS, de définir et de mettre en œuvre l'action sociale et médico-sociale du territoire.
Auteur : Mme Manuéla Kéclard-Mondésir
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
Ministère répondant : Outre-mer
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 11 octobre 2021
Dates :
Question publiée le 8 juin 2021
Réponse publiée le 8 mars 2022