Taux de mercure sur le littoral guyanais
Publication de la réponse au Journal Officiel du 17 avril 2018, page 3317
Question de :
M. Jean-Luc Mélenchon
Bouches-du-Rhône (4e circonscription) - La France insoumise
M. Jean-Luc Mélenchon attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les taux de mercure sur le littoral guyanais. La presse relevait le 11 décembre 2017 le cas d'une famille de Cayenne présentant de forts taux de mercure dans le sang ; contamination visiblement liée à l'eau potable et aux poissons. La pollution des cours d'eau au mercure n'est pas nouvelle. Déjà en 1998, des associations, des scientifiques et des médecins dénonçaient l'activité aurifère illégale source d'insécurité et de pollution des cours d'eau et nappes phréatiques. Le mercure est utilisé par les chercheurs d'or (garimpeiros) pour amalgamer l'or. En 2001, Bérengère Blin, aujourd'hui directrice adjointe du Parc amazonien de Guyane avertissait : « À terme, la pollution des fleuves risque également d'affecter la population du littoral ». Aucune étude scientifique officiellement mandatée n'a été réalisée depuis 2005 concernant cette pollution particulière, aucune n'a été réalisée sur le littoral, ce qui est d'autant plus alarmant que la Guyane comprend 320 km de littoral, la grande majorité de la population y vit, la nourriture principale est composée de poisson et que le mercure est extrêmement toxique. Nous rappelons que le mercure peut entraîner des malformations fœtales, des retards de développement neurologiques et de nombreux troubles digestifs et immunitaires. Malgré l'opération Harpie, lancée en 2008, qui a fait chuter de 70 % les sites illégaux, les garimpeiros se réorganisent, vont là où les risques sont moins importants. Le nombre de chantiers illégaux augmentent à nouveau et dépassent des nombres jamais atteints. Le parc amazonien dénonce un manque de moyens humains et une faible connaissance du territoire. Un rapport de l'ARS de 2016 explique que sur les 280 analyses de mercure réalisées entre 2013 et 2015 sur les eaux d'alimentation humaine, aucune n'a révélé de dépassement de la norme. Comment est-ce possible quand la concentration en mercure du sol guyanais est huit fois supérieure à celle de la métropole ? A contrario, des études du CNRS de 2011 sur des espèces marines prouvent des contaminations au mercure. Il s'interroge sur le manque d'études scientifiques sur ce sujet sur le littoral guyanais. Il se demande dans quelle mesure l'État français met les moyens nécessaires pour lutter contre l'orpaillage illégal.
Réponse publiée le 17 avril 2018
En Guyane, la contamination environnementale par le mercure provient du fond géochimique, ainsi que des activités d'orpaillage, bien que l'utilisation du mercure pour l'exploitation aurifère ait été interdite depuis 2006. L'exposition de la population au mercure, selon les doses auxquelles la population est exposée peut avoir des effets toxiques sur les systèmes nerveux, digestif et immunitaire, sur les poumons, les reins, la peau et les yeux. Le mercure est considéré par l'organisation mondiale de la santé (OMS) comme l'un des produits chimiques extrêmement préoccupants pour la santé publique. Il constitue une menace pour le développement de l'enfant in utero et à un âge précoce. La découverte de forts taux de mercure capillaire chez des femmes enceintes peut nécessiter une prise en charge médicale, pour la mère et l'enfant. Afin de prévenir les risques induits chez les enfants à naître ou allaité, l'agence régionale de santé (ARS) de Guyane, la collectivité territoriale de Guyane (PMI) et le centre hospitalier Andrée Rosemon ont mis en place un programme de repérage des femmes enceintes à haut risque d'intoxication depuis 2012 sur le Haut Maroni et depuis 2014 sur le haut Oyapock. Ces femmes bénéficient d'un dosage du mercure capillaire en début de grossesse et d'un second lors de l'accouchement de manière à vérifier l'efficacité des recommandations prodiguées et à évaluer le risque pour l'enfant. En effet, la consommation de poissons est reconnue comme source principale de contamination des populations, aussi des conseils alimentaires sont-ils donnés à toutes les femmes enceintes ou allaitantes. La société de toxicologie clinique (STC), vient de faire paraître à la suite d'une saisine du ministère des solidarités et de la santé des recommandations de bonnes pratiques pour le suivi et la prise en charge des femmes enceintes présentant des taux de mercure capillaire anormaux ainsi que de leurs enfants. L'ARS de Guyane en lien avec le ministère chargé de la santé et l'agence nationale de santé publique travaillent actuellement à la mise en œuvre de cet avis de la STC qui devrait se traduire par une extension du dépistage aux femmes en âge de procréer, aux femmes enceintes et aux enfants de moins de 7 ans dans l'ensemble des zones à risque en Guyane. S'agissant de l'apparente contradiction entre la présence du mercure dans le sol en Guyane et son absence dans l'eau du robinet des consommateurs, elle s'explique par le fait que les ressources en eau utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation humaine sont situées à longue distance des sites d'orpaillage. De plus, la majorité du mercure libéré par l'érosion des sols se retrouve plus facilement dans les sédiments d'un cours d'eau que dans la colonne d'eau elle-même. Enfin, les eaux de surface utilisées pour la production d'eau potable subissent systématiquement un traitement de clarification avant leur distribution aux consommateurs. Au-delà, de ces actions, le Gouvernement renforce en 2018 les mesures et moyens matériels et humains pour dissuader les orpailleurs clandestins, dans le but d'assurer les conditions d'une activité permettant le développement économique du territoire, dans l'intérêt des populations et de la préservation de l'environnement. .
Auteur : M. Jean-Luc Mélenchon
Type de question : Question écrite
Rubrique : Mer et littoral
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Solidarités et santé
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 9 avril 2018
Dates :
Question publiée le 26 décembre 2017
Réponse publiée le 17 avril 2018