15ème législature

Question N° 431
de Mme Clémentine Autain (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
Ministère attributaire > Transports

Rubrique > transports urbains

Titre > Charles-de-Gaulle Express

Question publiée au JO le : 04/12/2018
Réponse publiée au JO le : 12/12/2018 page : 13482
Date de changement d'attribution: 18/12/2018

Texte de la question

Mme Clémentine Autain attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la réalisation du Charles-de-Gaulle Express, un train qui doit relier Paris à l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle pour la modique somme de 24 euros les 20 minutes de trajet. Dans la France entière, au moment où les gilets jaunes font rage, une question majeure s'impose dans le débat public : la transition énergétique ne doit pas se traduire par une vie plus dure, plus chère pour celles et ceux qui n'arrivent pas à finir les fins de mois, une vie plus difficile encore pour les territoires en périphérie urbaine. Sa question porte sur un exemple concret de choix qui peuvent améliorer ou aggraver la situation sociale et écologique. Les habitants des villes que Mme la députée représente font partie des 870 000 usagers quotidiens du RER B, 870 000 personnes qui vivent les retards, les trains annulés, qui doivent justifier de leurs absences auprès de leurs employeurs. Elle a vu des mères pleurer dans un wagon parce que le train à l'arrêt, elles n'arriveraient pas à l'heure à la crèche. Ce sont 870 000 personnes qui appréhendent matin et soir de longues heures dans des transports bondés. Depuis des années, des collectifs d'habitants et d'élus réclament des moyens supplémentaires pour améliorer une situation devenue invivable. Et qu'apprennent-ils aujourd'hui ? 1,7 milliard d'argent public sont mobilisés par l'État dans le Charles-de-Gaulle Express, pour ce train qui réduira les temps de trajet de 17 000 voyageurs aisés. Le CDG express doit relier Paris à l'aéroport Charles-De-Gaulle Express pour la somme de 24 euros ! L'obsession de la compétitivité et du confort pour les plus riches prend le pas sur l'amélioration du quotidien du grand nombre. Car, pendant ce temps-là, les habitants de grande banlieue regardent encore une fois passer le train. La rénovation du RER B, mais aussi la réalisation des lignes 16 et 17 du super métro prennent du retard. Ces lignes étaient attendues pour 2024. Finalement, pas une station ne verra le jour avant les jeux Olympiques. Et la livraison de ces lignes a été reportée à 2030. Rien d'étonnant à ce que les habitants continuent de prendre leur voiture pour se sortir de la galère. Rien d'étonnant que des bouchons aux heures de pointe continuent de polluer gravement l'atmosphère et le quotidien. Il y a une urgence. L'investissement dans les transports publics ne peut plus attendre. La transition énergétique n'aura pas lieu si l'État ne choisit pas de mettre les moyens, à la hauteur des besoins, pour accompagner les personnes et les territoires les plus fragiles dans ce changement de mobilité. Le désengorgement des villes du nord-est de la Seine-Saint-Denis est un enjeu d'égalité. Elle lui demande de lui dire quelles sont les priorités du Gouvernement pour lutter contre cette inégalité territoriale de mobilité et rendre les transports quotidiens des habitants de la Seine-Saint-Denis tout simplement vivables.

Texte de la réponse

CHARLES-DE-GAULLE EXPRESS


M. le président. La parole est à Mme Clémentine Autain, pour exposer sa question, n°  431, relative au Charles-de-Gaulle Express.

Mme Clémentine Autain. Ma question s'adresse à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Elle porte, comme celle de mon collègue Stéphane Peu, sur la réalisation du Charles-de-Gaulle Express. Il s'agit là d'un exemple concret de décision pouvant améliorer ou aggraver la situation sociale et écologique.

Les habitants des villes que je représente font partie des 870 000 usagers quotidiens du RER B, ces 870 000 personnes qui vivent les retards, les trains annulés et qui doivent justifier leurs absences auprès de leurs employeurs. J'ai vu des mères pleurer dans un wagon parce que le train étant à l'arrêt, elles n'arriveraient pas à l'heure à la crèche. Ces 870 000 personnes appréhendent matin et soir les longues heures passées dans les transports bondés.

Depuis des années, des collectifs d'habitants et d'élus se battent pour obtenir des moyens supplémentaires afin d'améliorer une situation qui, sincèrement, est devenue invivable. Or qu'apprennent-ils aujourd'hui ? Que l'État a fait le choix d'investir 1,7 milliard d'euros en argent public dans le Charles-de-Gaulle Express, un train qui réduira les temps de trajet pour 17 000 voyageurs aisés, puisqu'il doit relier Paris à l'aéroport Charles-de-Gaulle pour la somme de 24 euros. Votre obsession de la compétitivité et du confort pour les plus riches a pris le pas sur l'amélioration du quotidien pour le grand nombre. Pour reprendre une expression chère aux gilets jaunes, une fois encore, et de façon très concrète, vous avez fait du « d'abord ».

Pendant ce temps-là, les habitants de grande banlieue regardent une fois encore passer le train. La rénovation du RER B et la réalisation des lignes 16 et 17 du supermétro prennent du retard. On attendait l'ouverture de ces lignes pour 2024. Finalement, pas une station ne verra le jour avant les Jeux olympiques. La livraison des lignes a été reportée à 2030. Rien d'étonnant à ce que les habitants continuent de prendre leur voiture pour essayer de sortir de la galère et qu'aux heures de pointe, des bouchons continuent de polluer gravement l'atmosphère et la qualité de notre vie quotidienne.

Madame la secrétaire d'État, il y a urgence – surtout vu le contexte social et la colère qui s'exprime, précisément par rapport à ces enjeux concernant l'égalité sociale et territoriale. L'investissement dans les transports publics ne peut plus attendre. La transition énergétique – dont le Président de la République n'a pas du tout parlé hier – n'aura pas lieu si l'État ne choisit pas de mettre des moyens, à la hauteur des besoins, pour accompagner les personnes et les territoires les plus fragiles dans ce changement nécessaire de mobilité. Le désengorgement des villes du nord-est de la Seine-Saint-Denis est un enjeu d'égalité. Pourriez-vous nous dire qu'elles sont les priorités du Gouvernement pour lutter contre cette inégalité territoriale de mobilité et rendre les transports quotidiens des habitants de la Seine-Saint-Denis tout simplement vivables ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la députée, vous avez bien voulu interroger Mme Borne ; ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.

Je vous rejoins concernant l'importance des transports du quotidien ; comme vous le savez, c'est la priorité du Gouvernement. L'État investit donc massivement pour améliorer le fonctionnement des transports et les développer. Le contrat de plan État-région Île-de-France prévoit ainsi 7,6 milliards d'euros d'investissements de 2015 à 2020, ce qui représente un effort considérable pour le budget de l'État. Il s'agit notamment de financer les schémas directeurs des RER et des Transilien, le prolongement d'Eole, celui de la ligne 11, les nouveaux tramways, les bus à haut niveau de service ou encore les pôles multimodaux.

Vous citez le cas du RER B, axe nord-sud majeur ; cette ligne a bénéficié d'un investissement de 215 millions d'euros entre 2015 et 2017 et Île-de-France Mobilités travaille actuellement avec la RATP et la SNCF pour préparer l'arrivée de nouveaux trains, plus confortables et de plus grande capacité. D'importants travaux de rénovation des voies et des caténaires sont également programmés par SNCF Réseau sur cet axe.

Par ailleurs, le projet du Charles-de-Gaulle Express ne doit pas être opposé aux transports du quotidien, puisqu'il poursuit un objectif différent : il a vocation à relier la métropole à son principal aéroport. En outre, 180 millions d'euros vont être investis dans le RER B dans le cadre du Charles-de-Gaulle Express. Celui-ci, qui ne fait l'objet d'aucune subvention directe de la part de la collectivité publique, sera mis en service avant les Jeux de 2024.

Enfin, le projet du Grand Paris Express viendra compléter le réseau existant – associant RER, Transilien et métro – grâce à des interconnexions, offrant ainsi aux Franciliens un moyen de transport supplémentaire, principalement en rocade. Il permettra d'importants gains de temps de parcours sur de nombreuses liaisons de banlieue à banlieue et déchargera le réseau existant. À terme, 200 kilomètres de lignes seront construits, c'est-à-dire autant que la longueur de toutes les lignes du réseau actuel du métro parisien ; ils représenteront 35 milliards d'euros d'investissement.

Les habitants de Seine-Saint-Denis seront parmi les premiers à en bénéficier, grâce à la mise en service de la ligne 16 jusqu'à Clichy-Montfermeil à l'horizon 2024. Par ailleurs, les lignes 15 Est et 17 viendront compléter le réseau en Seine-Saint-Denis.

M. le président. La parole est à Mme Clémentine Autain.

Mme Clémentine Autain. Je ne suis pas certaine que vous ayez parfaitement compris la question que je vous posais. Au fond, l'enjeu n'est pas de savoir si, dans un monde idéal, il ne faudrait pas un Charles-de-Gaulle Express : pourquoi pas, après tout ? Mais comprenez que, dans la situation actuelle de saturation pour la population, c'est un symbole : les habitants prennent évidemment très mal le fait que l'on investisse dans un métro de luxe – 24 euros pour circuler ! – pendant que, de notre côté, les investissements prennent du retard. Vous avez cité Clichy, mais je vous signale que le projet d'arrivée jusqu'à chez nous est en retard par rapport aux investissements annoncés concernant les lignes de super-métro, et que le RER B ne fait pas à ce jour l'objet d'engagements clairs touchant les rénovations qui lui permettraient de fonctionner correctement dans un délai raisonnable.