Question écrite n° 4389 :
Protection des salariés en longue maladie contre les discriminations

15e Législature
Question signalée le 21 mai 2018

Question de : M. Christophe Blanchet
Calvados (4e circonscription) - La République en Marche

M. Christophe Blanchet appelle l'attention de Mme la ministre du travail sur la nécessité de protéger les salariés contre les discriminations liées à leur état de santé. Dans la population générale, au cours des 5 dernières années et tous domaines confondus, près de 40 % des personnes déclarent avoir fait l'objet de discriminations. L'emploi, et en particulier le déroulement de carrière, est le premier domaine cité comme vecteur de discrimination, ce que corroborent les saisines reçues par le Défenseur des droits (Enquête sur l'accès aux droits, volume 3, 10ème baromètre de la perception des discriminations dans l'emploi). Le groupe des personnes en situation de handicap ou ayant une maladie chronique ou durable apparaît particulièrement exposé aux discriminations. Ainsi, tous critères confondus (sexe, âge, handicap, origine), près d'une personne sur deux en situation de handicap ou de longue maladie déclare avoir été discriminée dans l'emploi (49 %), contre 31 % des personnes non concernées par le handicap ou la maladie. Les personnes en situation de handicap ou de longue maladie se trouvent donc exposées à de multiples formes de discriminations qui se cumulent et renforcent les obstacles qu'elles rencontrent dans leur parcours social et professionnel. Il est vrai que les discriminations en matière de handicap ont diminué suite au renforcement de la législation et à l'adoption des différents mécanismes favorisant l'insertion. Néanmoins, les personnes en situation de maladie chronique ou durable semblent les oubliés de ces mécanismes de protection, notamment lorsque la maladie frappe subitement. Effectivement, il semblerait que nombre de salariés ayant informé leur employeur sur leur état de santé aient eu à subir des freins quant à leur évolution de carrière ou de salaire, à l'accès aux formations ou ont été licenciés pour un motif discriminatoire. Il s'agit là d'une double peine insoutenable dans un pays tel que la France. L'annonce d'une maladie est le début d'un combat non seulement pour le malade mais également pour son entourage. Le fait d'avoir à s'inquiéter de son futur en cas de survie ajoute au malaise du patient et fait peser sur son moral une chape de plomb alors même que de l'avis de tous les médecins , la part psychologique est primordiale dans la guérison. Ces comportements indignes de la part d'employeurs malveillants ayant perdu toute part d'humanité placent les salariés dans une forme de « presque mort » puisqu'ils sont déjà considérés comme étant « hors-jeux ». Ainsi, il lui demande quelles sont les mesures que le Gouvernement compte développer pour garantir la protection des salariés en situation de longue maladie contre les discriminations dont ils sont couramment victimes.

Réponse publiée le 22 janvier 2019

Le handicap et l'état de santé sont au nombre des critères dont la prise en compte constitue une discrimination, à la fois au regard du droit du travail (article L. 1132-1 code du travail) et du droit pénal (article 225-1 code pénal). Ainsi, le fait de refuser d'embaucher, de sanctionner ou de licencier une personne en raison de son handicap ou de son état de santé est passible d'une peine de de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende (article 225-2 du code pénal). En outre, notre arsenal juridique en matière de lutte contre les discriminations au travail et dans l'accès à l'emploi a été renforcé avec l'introduction, au cours de ces deux dernières années, de nouvelles mesures répressive et préventive. D'abord, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a instauré un dispositif d'action de groupe applicable en matière de lutte contre les discriminations survenant dans le champ du travail. D'un point de vue pratique, l'action de groupe peut être enclenchée par une organisation syndicale et peut tendre à la cessation d'un manquement et, le cas échéant, à la réparation des préjudices subis. Les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans intervenant dans la lutte contre les discriminations ou œuvrant dans le domaine du handicap peuvent également introduire des actions pour la défense des candidats à l'emploi. Ensuite, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté oblige désormais toute entreprise d'au moins 300 salariés et toutes celles assurant des missions de recrutement, à former tous les 5 ans leurs salariés chargés des missions de recrutement aux problématiques liées la non-discrimination à l'embauche (article L. 1131-2 du code du travail). Par ailleurs, la question du maintien en emploi des travailleurs dont la santé est altérée est devenue, depuis plusieurs années, un sujet de préoccupation prioritaire des politiques publiques dédiées tant à la santé publique qu'à la santé au travail. En effet, depuis le lancement, en 2014, du 3ème plan cancer qui a renforcé les actions de l'Etat et des préventeurs autour de la prévention de la désinsertion professionnelle des personnes atteintes de maladies chroniques évolutives, de nombreux plans d'action nationaux ont pris en compte cette thématique, dans le cortège du plan santé au travail 2016-2020 qui en a fait un de ses axes prioritaires. Désormais, la question du maintien en emploi est appréhendée, de manière collégiale et partagée, par l'ensemble des programmes d'action (exemple : COG de la branche accidents du travail-maladies professionnelles de la Caisse nationale d'assurance maladie, Convention nationale pluriannuelle multipartite de mobilisation pour l'emploi des personnes en situation de handicap…). Cette action a par ailleurs pu prendre la forme de diverses expérimentations sur le territoire, dont celle portée par l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail et son réseau régional, visant notamment à permettre aux entreprises de mieux prendre en compte la situation des travailleurs dont la santé est altérée. Cette prise de conscience est devenue très large puisque, au-delà de rapports importants publiés sur cette question (IGAS, « La prévention de la désinsertion professionnelle des salariés malades ou handicapés », décembre 2017 ; Taquet-Serres, « Plus simple la vie : 113 propositions pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap », mai 2018 ; Gillot, « Personnes handicapées : sécuriser les parcours, cultiver les compétences », juin 2018 ; rapport Lecocq, « Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée », août 2018), la Haute autorité de santé s'apprête à publier une recommandation à destination des professionnels de santé portant sur cette question, afin de faciliter la prise en charge des travailleurs.

Données clés

Auteur : M. Christophe Blanchet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail

Ministère répondant : Travail

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 21 mai 2018

Dates :
Question publiée le 2 janvier 2018
Réponse publiée le 22 janvier 2019

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