15ème législature

Question N° 4606
de M. Fabien Gouttefarde (La République en Marche - Eure )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > biodiversité

Titre > Protection des zones marines situées au-delà des juridictions nationales

Question publiée au JO le : 23/01/2018 page : 479
Réponse publiée au JO le : 03/04/2018 page : 2813

Texte de la question

M. Fabien Gouttefarde attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la résolution 72/249, adoptée le 24 décembre 2017 par l'Assemblée générale des Nations unies, sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales. En 2018, des négociations seront ouvertes pour l'élaboration d'un instrument juridique contraignant visant à conserver et gérer durablement la biodiversité marine dans ces espaces qui couvrent près de la moitié de la planète. Elles ont pour objectif de répondre à la multiplication des menaces affectant les zones marines situées au-delà des juridictions nationales (ZAJN). Les négociations s'articuleront autour de quatre thématiques : les ressources génétiques marines ; les outils de gestion par zone ; les évaluations d'impact sur l'environnement ; le renforcement des capacités et le transfert de technologies maritimes. Des dispositions institutionnelles s'ajouteront à ces éléments (création d'instances, liens avec les organisations internationales et régionales existantes, etc.). Ces négociations sont essentielles pour protéger la biodiversité, l'intégrité des espèces en haute mer mais aussi, plus largement, pour le développement durable. De fait, il souhaite savoir quels objectifs de négociation la France compte défendre et quelle sera sa stratégie pour préserver ces zones maritimes de façon efficace.

Texte de la réponse

La négociation de l'accord dit "BBNJ" constitue une des priorités de la diplomatie environnementale française. Elle s'inscrit dans la poursuite des engagements pris par la France pour la protection du milieu marin au niveau international et leur mise en œuvre, dont l'ODD14 et la COP21. Elle a déjà fait l'objet de quatre réunions du comité préparatoire qui ont eu lieu en 2016 et 2017 à l'issue desquelles des recommandations substantielles sur les éléments d'un projet d'accord ont été adoptées, le 21 juillet 2017. En raison de la compétence mixte de l'UE et de ses Etats membres, les positions sont arrêtées au niveau européen. Un mandat de négociation sera donné à la commission européenne par le Conseil pour négocier le futur instrument au nom de l'Union dans le cadre de la conférence intergouvernementale. Il comprendra en annexe des directives de négociation. La France a défini des objectifs sur les quatre grandes thématiques de la négociation mentionnées ainsi que sur les questions transversales : - ressources génétiques marines (RGM), dont le partage des bénéfices tirés de leur utilisation. Il s'agira de promouvoir une position pragmatique et équilibrée sur le régime juridique applicable à l'accès et l'utilisation de ces ressources situées dans les zones au-delà des juridictions nationales. Les Etats en développement du G77 demandent à ce que le statut juridique du "patrimoine commun de l'humanité" appliqué par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer aux ressources minérales des fonds marins leur soit appliqué, ce qui impliquerait de confier leur gestion à un organisme international et de mettre en place un mécanisme international de partage des bénéfices économiques tirés de leur exploitation, ce que refusent certains pays développés dont l'UE. La France et l'UE sont en faveur d'un régime d'accès aux RGM respectueux de la liberté de la recherche scientifique en haute mer et de la préservation de l'environnement marin. S'agissant du mécanisme de partage des avantages, nous privilégions un partage non monétaire tel que la mise à disposition de données relatives aux résultats des utilisations dans le respect du droit de la propriété industrielle ; - outils de gestion par zone, dont les aires marines protégées (AMP). L'objectif est de créer un cadre international et des critères communs pour la création d'AMP en haute mer dans le respect du mandat des organisations compétentes pour la haute mer (organisations régionales de pêche, commissions de mers régionales, organisation maritime internationale). Cela implique l'élaboration d'un mécanisme permettant la reconnaissance par la communauté internationale des AMP adoptées au niveau régional. Cela suppose également la mise en place de mécanismes de coopération avec les organisations internationales disposant d'une compétence en haute mer ; - évaluations d'impact environnemental. Les activités qui risquent d'entraîner une pollution importante ou des modifications nuisibles à la biodiversité marine en haute mer feront l'objet d'évaluations d'impact environnemental. Nous considérons qu'il est indispensable de tenir compte de ces évaluations des effets des impacts cumulés de différentes activités ayant lieu dans un même espace. Il incombe également aux Etats parties de prendre en compte les effets du changement climatique avec des "évaluations stratégiques environnementales". L'effectivité du contrôle de la mise en oeuvre des obligations d'évaluation au titre de l'accord devra en premier lieu relever de la responsabilité de l'Etat du pavillon du navire. Toutefois, il sera nécessaire de retenir des mécanismes de contrôle et de suivi pour s'assurer du respect par les Etats de leurs obligations en la matière et éviter ainsi des évaluations de complaisance ; - renforcement des capacités et transfert des technologies marines. La coopération entre Etats développés et Etats en développement sera renforcée afin de permettre à ces derniers d'être en mesure de remplir les objectifs de conservation du futur accord. Des procédures de coordination et de partage d'information, notamment sur le plan scientifique, devront être mises en place. Le transfert de technologies marines devra se faire sur une base volontaire afin de ne pas porter atteinte au droit de la propriété industrielle ; - questions transversales. Le futur accord devra prévoir des mécanismes institutionnels légers et efficaces afin de permettre aux parties de tenir des réunions régulières pour s'assurer de la bonne application du futur instrument. Celui-ci devra contribuer à renforcer la coordination internationale entre les organisations internationales pertinentes dans les zones au-delà des juridictions nationales. La France continuera à plaider pour le maintien d'un niveau d'ambition élevé afin de parvenir à un accord cohérent qui apporte des réponses efficaces et comportant une véritable plus-value par rapport au cadre international existant.