15ème législature

Question N° 4712
de Mme Sereine Mauborgne (La République en Marche - Var )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > pharmacie et médicaments

Titre > Traitement de la dégénérescence maculaire liée à l'âge

Question publiée au JO le : 23/01/2018 page : 524
Réponse publiée au JO le : 22/05/2018 page : 4286

Texte de la question

Mme Sereine Mauborgne appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la recommandation temporaire d'utilisation (RTU) du médicament Avastin dans le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA), dont l'échéance est fixée au 1er septembre 2018. La dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) est une maladie de l'œil qui résulte d'une détérioration graduelle de la macula, petite zone située au centre de la rétine qui permet de voir avec précision les détails et les couleurs. Le DMLA reste la première cause de malvoyance des plus de 50 ans dans les pays dits industrialisés et toucherait, sous toutes ses formes, plus de 800 000 français. Deux médicaments, produits par le même laboratoire pharmaceutique, permettent de traiter cette pathologie : le Lucentis et l'Avastin. Le Lucentis, mis sur le marché en 2007, est utilisé spécifiquement contre la perte de vision due à la DMLA, en ciblant la forme humide de cette maladie, la plus grave et la plus courante. Il était jusqu'en 2014 le seul médicament à disposer d'une autorisation de prescription dans le traitement de la DMLA. En parallèle, plusieurs études internationales ont permis de démontrer que l'Avastin, conçu initialement comme anticancéreux, pouvait également permettre de traiter certains effets de la DMLA, pour un coût à l'injection trente fois inférieur à celui du Lucentis. Le laboratoire propriétaire de l'Avastin a durant des années refusé d'en solliciter une extension d'autorisation. Il en a résulté un surcoût annuel de l'ordre de plusieurs centaines de millions d'euros pour l'assurance maladie, comme cela a pu être abondamment relayé. En avril 2013, la Cour européenne des droits de l'Homme a autorisé le reconditionnement de l'Avastin pour le traitement de la DMLA, déboutant ainsi le laboratoire propriétaire du Lucentis. Au plan national, un arrêté du 27 août 2015 a officiellement consacré l'utilisation de l'Avastin dans le traitement de la DMLA, dans le cadre d'une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) d'une durée de 3 ans, à usage spécifique des centres hospitaliers. La RTU est une procédure dérogatoire et exceptionnelle qui permet d'utiliser un médicament en dehors de son usage primaire (et donc de son autorisation de mise sur le marché - AMM - initiale). La RTU dont bénéficie l'Avastin prendra fin au 1er septembre 2018. En dépit d'une augmentation du montant de la seringue d'Avastin, fixé en avril 2016 à 100 euros TTC, cette spécialité pharmaceutique dispose manifestement, à bénéfices égaux dans le traitement de la DMLA, d'un avantage considérable dans une perspective de réduction du déficit du budget de la sécurité sociale. Ainsi, elle lui demande si les données aujourd'hui à la disposition du ministère en matière d'efficacité et de sécurité issues du suivi des patients, permettent ou non de présumer d'une éventuelle reconduite de la RTU accordée à l'Avastin. Elle lui demande également de lui faire état des négociations menées avec le laboratoire disposant des droits d'exploitation de l'Avastin à propos de l'extension de son AMM. Cette seconde solution permettrait de s'inscrire dans une optique plus pérenne que celle d'une RTU, accordée pour un période maximale de 3 ans.

Texte de la réponse

La spécialité Avastin 25mg/ml, solution à diluer pour perfusion, dispose d'une autorisation de mise sur le marché (AMM), délivrée au Laboratoire ROCHE REGISTRATION LTD (Royaume-Uni) au terme d'une procédure centralisée d'autorisation. Dans le cadre de cette procédure, l'évaluation scientifique est menée sous l'égide de l'agence européenne des médicaments et une autorisation de mise sur le marché (AMM) valable dans l'ensemble de l'Union est délivrée par la Commission. Cette dernière est également seule compétente pour modifier, suspendre ou retirer l'AMM. L'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ne peut donc modifier les indications thérapeutiques de la spécialité Avastin, comme elle ne peut contraindre le titulaire d'AMM à déposer une demande en ce sens. En l'espèce, la spécialité Avastin, qui a pour substance active le bevacizumab, est indiquée en cancérologie (traitement en première ligne du cancer colorectal métastatique et de plusieurs autres pathologies cancéreuses), sachant que l'autorité sanitaire ne saurait autoriser une indication non revendiquée par le demandeur, ce qui ne préjuge pas pour autant du rapport bénéfice/risque dans une indication hors du périmètre de l'AMM, c'est-à-dire du rapport entre les effets thérapeutiques positifs du médicament au regard des risques pour la santé du patient ou la santé publique liés à sa qualité, à sa sécurité ou à son efficacité. Le mode d'action de la spécialité Avastin, identique à celui d'autres médicaments autorisés en ophtalmologie, a conduit des ophtalmologistes à l'utiliser en injections intra vitréennes dans le traitement des atteintes oculaires avec néo vascularisation, telles que la dégénérescence maculaire liée à l'âge néo vasculaire (DMLA). Compte tenu de cette utilisation et des données scientifiques alors disponibles, l'ANSM a élaboré une recommandation temporaire d'utilisation (RTU), en dépit de l'opposition du titulaire de l'AMM, lequel a formé un recours en annulation contre cette décision, rejeté par le Conseil d'Etat le 24 février 2017. La RTU d'Avastin dans le traitement de la DMLA a été prise le 24 juin 2015 et elle est entrée en vigueur le 1er septembre 2015, pour une durée de 3 ans. Précisément, l'article L. 5121-12-1 du Code de la santé publique prévoit deux hypothèses de prescription non conforme à l'AMM, dont celle où il existe une RTU ; la RTU a pour objet d'encadrer la prescription par un médecin d'un médicament, selon la forme galénique et la posologie qu'il estime appropriées et qui ne sont pas celles de l'AMM, pour répondre aux besoins spéciaux du patient, appréciés à l'issue d'un examen effectif de ce dernier et en se fondant sur les considérations thérapeutiques qui lui sont propres. En outre, elle garantit la mise en place d'un suivi des patients traités dans ce cadre dérogatoire à l'AMM. Cet article prévoit également que la RTU est établie pour une durée maximale de 3 ans et qu'elle est renouvelable. Le renouvellement est subordonné à une nouvelle évaluation et, en premier lieu, au fait que le rapport bénéfice/risque du médicament dans l'utilisation en question demeure présumé positif, au vu notamment des données d'efficacité et de sécurité qui seront issues du suivi des patients traités. C'est dans ce contexte que l'ANSM examinera dans les mois prochains le renouvellement de la RTU d'Avastin.