Projet d'enfouissement de déchets nucléaires à Bure
Publication de la réponse au Journal Officiel du 3 juillet 2018, page 5827
Question de :
M. Jean-Luc Mélenchon
Bouches-du-Rhône (4e circonscription) - La France insoumise
M. Jean-Luc Mélenchon interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur le projet de Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) prévu à Bure, dans la Meuse. Le 15 janvier 2018, l'Autorité de sureté nucléaire (ASN) a publié un rapport concernant le projet d'enfouissement des déchets nucléaires à Bure, dans la Meuse. Ce projet prévoit d'enterrer 85 000 mètres cubes de déchets hautement radioactifs et à vie longue, sous une zone habitée. Le rapport de l'ASN soulève plusieurs inquiétudes quant à la sécurité du projet. Il relève notamment le manque de précisions de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) sur la gestion du problème spécifique des déchets bituminés. Ces boues radioactives conditionnées dans des matrices en bitumes posent des risques d'incendies. Le bitume utilisé peut, dans certaines conditions, s'enflammer. Les déchets eux-mêmes peuvent monter en température dans certains cas. Le départ d'un incendie qui pourrait se propager aux autres déchets stockés sur le site est donc possible, juge l'ASN. Cette possibilité s'est déjà réalisée dans le monde. Aux États-Unis, le site de stockage de déchets radioactifs du Waste Isolation Pilot Plant, dans le Nouveau-Mexique a subi un incendie en 2014. En cette occasion, un relâchement de radioactivité a été constaté. De façon plus générale, le rapport de l'ASN pointe le fait que la sécurité du site n'est pas garantie dans le projet en cas d'aléas naturels. Enfin, la question de potentiels actes de malveillance est aussi posée. L'association Greenpeace a récemment montré dans un rapport les failles de certaines installations nucléaires dans ce domaine. Il souhaiterait savoir si le Gouvernement, à la lumière du rapport de l'ASN, envisage de suspendre le projet de Centre industriel de stockage géologique de Bure.
Réponse publiée le 3 juillet 2018
La sûreté nucléaire est une priorité pour le Gouvernement. Le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, suit avec beaucoup d'attention le projet de Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) prévu à Bure, dans la Meuse et la Haute-Marne. Conformément à la loi du 28 juin 2006 du programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, le projet Cigéo est conçu et dimensionné par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) pour stocker les déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue. Les modalités de création d'une tel projet ont été précisées la loi du 25 juillet 2016 qui a notamment défini la notion de réversibilité. L'ANDRA a transmis, selon une démarche volontaire, à l'Autorité de sureté nucléaire (ASN), en avril 2016, le dossier d'options de sûreté (DOS) du projet Cigéo de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde afin de solliciter son avis sur les options de sûreté du projet qu'elle prévoit. Le décret du 2 novembre 2007 dit « décret procédures » permet en effet à toute personne qui prévoit d'exploiter une installation nucléaire de base de demander à l'ASN, préalablement à l'engagement de la procédure de demande d'autorisation de création, un avis sur tout ou partie des options qu'elle a retenues pour assurer la sûreté de cette installation. Ce dossier d'options de sûreté a été instruit par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), appui technique de l'ASN. Il a fait l'objet les 18 et 19 mai 2017 d'une réunion des groupes permanents d'experts pour les déchets et pour les laboratoires et usines. À la demande de l'ASN, le dossier de l'ANDRA a également été soumis à une revue internationale par des experts appartenant à des autorités de sûreté étrangères, coordonnée par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). L'ASN estime que le projet a atteint globalement une maturité technique satisfaisante au stade du dossier d'options de sûreté. Elle estime aussi que le dossier d'options de sûreté est documenté et étayé et constitue un progrès significatif par rapport aux précédents dossiers ayant fait l'objet d'avis de l'ASN. Toutefois, certaines options retenues à ce stade nécessitent des justifications complémentaires. Une réserve a également été formulée par l'ASN concernant la gestion des déchets radioactifs bitumineux qui représentent 18 % du nombre de colis de l'inventaire de référence de l'installation. L'ASN estime que la recherche de la neutralisation de la réactivité chimique des colis de ces déchets bitumineux avant leur stockage doit être privilégiée. Les demandes de compléments que l'ASN a formulées et que l'ANDRA devra prendre en compte dans son dossier de demande d'autorisation portent sur la justification de l'architecture du stockage, le dimensionnement de l'installation face aux agressions, la surveillance de l'installation et la gestion des situations post-accidentelles. L'ASN souligne dans son avis que ces demandes complémentaires pourraient conduire à des évolutions de conception de l'installation. Le ministre de la transition écologique et solidaire sera particulièrement vigilant sur ces points lorsque l'ANDRA lui remettra sa demande d'autorisation de création. Une revue scientifique internationale sera par ailleurs prochainement organisée par des experts indépendants sur la gestion des déchets radioactifs bituminés, susceptibles d'être stockés au sein du centre de stockage géologique Cigéo afin de partager les connaissances scientifiques et techniques sur ce sujet et d'éclairer l'ensemble des parties prenantes sur les décisions à venir.
Auteur : M. Jean-Luc Mélenchon
Type de question : Question écrite
Rubrique : Déchets
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 14 mai 2018
Dates :
Question publiée le 6 février 2018
Réponse publiée le 3 juillet 2018