Protection de la faune sauvage
Question de :
M. Stéphane Demilly
Somme (5e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants
M. Stéphane Demilly interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques. Ce dernier établit, en effet, les nouvelles règles de détention des espèces animales de la faune sauvage (faune non domestique détenue en captivité). Un collectif d'associations expertes de la protection de la biodiversité, dont le travail est largement respecté (One Voice, Sea Shepherd France, Le Biome, Centre Athenas, Wildlife Angel), et impliqué dans la lutte contre le trafic de la faune sauvage, se mobilise depuis de longs mois afin de tirer la sonnette d'alarme sur les conséquences de cette nouvelle réglementation et tente, en vain, de sensibiliser le Gouvernement sur le sujet. Ils ont d'ailleurs contesté cet arrêté devant le Conseil d'État. Désormais, de nombreuses espèces très rares, représentées dans la nature parfois par quelques dizaines d'individus, pourraient être détenues sur simple télé-déclaration au prétexte de simplification administrative. Pour certaines d'entre elles, il n'existe aucun cheptel captif. Ces nouvelles règles risquent ainsi de créer un appel d'air et de relancer le marché de l'animal exotique à l'origine du trafic, qui est, la deuxième cause d'érosion de la biodiversité. De plus, les nouvelles modifications règlementaires suppriment plusieurs mesures obligatoires que doivent respecter les établissements détenant des animaux de la faune sauvage en captivité. D'après ces associations, cette modification rendrait les contrôles impossibles et favoriserait le blanchiment d'animaux illégalement détenus, blanchiment qui est, depuis une dizaine d'années, le nouveau visage du trafic de la faune sauvage en Europe. Enfin, cette nouvelle règlementation ne respecte pas le principe de non régression édicté à l'article 2 de la récente loi pour la reconquête de la biodiversité et n'est pas compatible avec les accords internationaux ratifiés par la France. La France est un des principaux pays consommateur d'espèces issues du trafic. De nombreuses affaires l'ont mis en évidence dernièrement. Il lui demande donc de recevoir ces associations sans tarder. Elles n'ont eu de cesse de solliciter un entretien avec son prédécesseur, sans succès. Il lui demande également les corrections qu'il envisage d'apporter à cet arrêté, afin de le mettre en cohérence avec l'impérieuse exigence de protection de la biodiversité.
Réponse en séance, et publiée le 17 janvier 2019
DÉTENTION D'ANIMAUX D'ESPÈCES NON DOMESTIQUES
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour exposer sa question, n° 526, relative à la détention d'animaux d'espèces non domestiques.
M. Stéphane Demilly. Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques établit les nouvelles règles de détention des animaux faisant partie de la faune sauvage détenue en captivité. Un collectif d'associations expertes de la protection de la biodiversité, dont le travail est largement respecté – One Voice, Sea Shepherd France, Le Biome, Centre Athénas –, s'est impliqué dans la lutte contre le trafic de la faune sauvage et tire régulièrement la sonnette d'alarme, depuis de longs mois, sur les conséquences de cette nouvelle réglementation, tentant en vain d'y sensibiliser le Gouvernement. Il a d'ailleurs contesté cet arrêté devant le Conseil d'État.
Désormais, de nombreuses espèces très rares, représentées dans la nature parfois par quelques dizaines d'individus, pourraient être détenues sur simple télédéclaration au prétexte de simplification administrative. Pour certaines d'entre elles, il n'existe aucun cheptel captif. Ces nouvelles règles risquent ainsi de créer un appel d'air et de relancer le marché de l'animal exotique à l'origine du trafic, qui représente la deuxième cause d'érosion de la biodiversité.
De plus, les nouvelles modifications réglementaires suppriment également plusieurs mesures obligatoires que doivent respecter les établissements détenant des animaux de la faune sauvage en captivité. D'après les associations, cette modification rendrait les contrôles impossibles et favoriserait le blanchiment d'animaux illégalement détenus – qui représente, depuis une dizaine d'années, le nouveau visage du trafic de la faune sauvage en Europe.
Enfin, cette nouvelle réglementation ne respecte pas le principe de non-régression édicté à l'article 2 de la récente loi pour la reconquête de la biodiversité, et est incompatible avec les accords internationaux ratifiés par la France.
De nombreuses affaires ont dernièrement montré que la France était l'un des principaux pays « consommateurs » d'espèces issues du trafic. Il me semble donc impératif que vous receviez rapidement et en personne ces associations qui regroupent experts et passionnés, afin d'écouter leurs arguments. Elles ne cessent, depuis de nombreuses années, de solliciter un entretien avec le ministère, sans succès. Pouvez-vous nous préciser si vous êtes prête à accéder à cette requête et à détailler les corrections que vous envisagez d'apporter à cet arrêté, afin de le mettre en cohérence avec l'impérieuse exigence de protection de la biodiversité ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur Demilly, l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques découle, vous l'avez souligné, de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et de ses décrets d'application du 23 février et du 17 novembre 2017.
Il introduit un nouveau régime de déclaration de détention, qui remplace celui de l'autorisation de détention, qui par ailleurs pouvait être tacite. La procédure de déclaration concerne uniquement les cas d'élevage d'agrément, où la détention des animaux n'a pas de but lucratif ou de négoce.
Au regard de la réglementation qui préexistait depuis août 2004, le régime de détention n'a été assoupli que pour huit espèces ni menacées, ni dangereuses, ni difficiles d'élevage – sept oiseaux et un reptile. La détention d'animaux de la majorité des espèces protégées et des espèces les plus menacées visées par la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, CITES, reste réservée à des établissements disposant d'une autorisation préfectorale d'ouverture, dont le responsable est titulaire d'un certificat de capacité. L'exposition d'animaux de telles espèces à des fins de vente reste interdite, notamment dans les animaleries.
L'arrêté du 8 octobre 2018 s'inscrit dans le mouvement général de simplification des procédures administratives pour les usagers, qui ne retire rien aux possibilités de contrôle des services de l'État. Ainsi, lorsque les prescriptions fixées ne sont pas respectées, l'administration conserve ses possibilités d'intervention et de sanction résultant des dispositions du code de l'environnement.
L'arrêté précise aussi les conditions d'identification des animaux, en étendant l'obligation de marquage individuel à de nouvelles espèces et en instaurant un enregistrement dans un fichier national d'identification. S'il apporte des simplifications pour les détenteurs d'espèces non menacées ou dangereuses, l'objectif de cet arrêté est donc bien d'améliorer l'encadrement de la détention et de lutter contre le trafic d'espèces sauvages en renforçant la traçabilité des spécimens et leur régime de détention, et surtout en facilitant les contrôles.
La France est très engagée à l'échelle nationale comme internationale en faveur de la préservation de la biodiversité, qui représente une de nos priorités. Ainsi, nous accueillerons en 2020 le congrès mondial de la nature. Nous tenons à la cohérence entre notre action intérieure et nos initiatives au niveau international et européen. Croyez-moi, nous sommes très impliqués et faisons très attention à la préservation des espèces. Je serais ravie d'en discuter plus en détail avec vous pour comprendre les besoins et les demandes des associations.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly.
M. Stéphane Demilly. Merci pour cette réponse qui montre votre volonté de réaction. Je vous donnerai le numéro de téléphone du collectif d'associations, et je compte sur vous pour entrer en contact avec lui. Même si vous ne l'avez pas dit, j'ai lu sur votre visage que vous étiez prête à le recevoir, et j'en suis ravi.
Auteur : M. Stéphane Demilly
Type de question : Question orale
Rubrique : Animaux
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 janvier 2019