15ème législature

Question N° 5560
de M. Éric Alauzet (La République en Marche - Doubs )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > consommation

Titre > Démarchage téléphonique

Question publiée au JO le : 20/02/2018 page : 1297
Réponse publiée au JO le : 12/06/2018 page : 5034

Texte de la question

M. Éric Alauzet alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la faible efficacité des mesures mises en œuvre afin de lutter contre le démarchage téléphonique. En effet, alors que le dispositif Bloctel issu de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation est censé lutter contre le démarchage téléphonique, 9 Français sur 10 se disent aujourd'hui excédés par celui-ci. Pour rappel, la prospection téléphonique est le seul système de démarchage où le consentement par défaut du consommateur et - système opt-out - est admis. Autrement dit, le consommateur doit expressément refuser la réception de ces appels afin de ne plus les recevoir, à la différence des mails ou SMS où il doit expressément avoir accepté de recevoir les sollicitations. Par ailleurs, les secteurs ayant recours au démarchage téléphonique sont aussi ceux que l'on retrouve le plus souvent dans les litiges de consommation (travaux de rénovation énergétique, énergie renouvelable, ). Aujourd'hui, les consommateurs reçoivent en moyenne plus de 4 appels téléphoniques de ce type par semaine. À l'appui de ce chiffre, force est de constater que les dispositifs existants ne sont d'une efficacité que trop limitée contre le phénomène. Aussi, le verrou mis en place par l'État pour freiner le démarchage téléphonique est loin de satisfaire les particuliers notamment parce que ce système comporte des failles dans lesquelles s'engouffrent les professionnels. En effet, la loi fixe des « exceptions » pour lesquelles le texte ne s'applique pas. Notamment « les appels non commerciaux émanant d'un service public, d'institut d'études et de sondage, d'association à but non lucratif ». Cette astuce est couramment utilisée par les professionnels pour contourner leurs obligations. Ainsi, ils abusent de la crédulité ou de l'inexpérience de leurs interlocuteurs en se présentant comme des partenaires de services de l'État ou entreprises publiques voulant mettre à jour des fichiers ou chargés de transmettre des informations aux particuliers. Dès lors, il lui demande de bien vouloir préciser les intentions du Gouvernement afin de limiter le démarchage téléphonique, notamment concernant l'éventualité d'une augmentation des amendes pour les opérateurs récalcitrants, d'une intensification des contrôles sur le respect de Bloctel, ou encore de la mise en place d'un indicatif permettant aux consommateurs de reconnaître facilement ce type de démarchage avant de décrocher.

Texte de la réponse

C'est dans le souci de protéger les consommateurs, notamment, les plus fragiles d'entre eux, d'un démarchage téléphonique intempestif et intrusif, que l'article L. 223-1 du code de la consommation, issu de l'article 9 de la loi no 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, interdit à un professionnel, sous peine de sanction administrative (amende de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale), de démarcher par téléphone des consommateurs inscrits sur une liste d'opposition au démarchage téléphonique. En effet, pour beaucoup de nos concitoyens, les appels commerciaux répétés et à tous moments de la journée, dans l'objectif de leur vendre un produit ou un service, sont considérés comme une véritable nuisance. Aussi, ce dispositif suscite un réel engouement des consommateurs qui ne veulent plus être dérangés par des appels non souhaités. Ainsi, au 1er mai 2018, près de 4 millions de personnes s'étaient inscrites, afin de ne plus faire l'objet de démarchage téléphonique. Il appartient aux entreprises, qui ont recours à ce mode de prospection commerciale, de s'assurer que leurs fichiers clients ne contiennent pas de numéros de téléphone inscrits sur le registre « BLOCTEL ». Elles doivent, en conséquence, saisir de manière régulière la société OPPOSETEL, qui gère le site « BLOCTEL », aux fins de s'assurer de la conformité de leurs fichiers clients, avec la liste d'opposition au démarchage téléphonique et de faire retirer par le gestionnaire de ce site, les numéros de téléphone qui y sont inscrits. A ce jour, la société OPPOSETEL a traité plus de 180 000 fichiers clients et a évité 6 appels, par semaine en moyenne, à chaque consommateur inscrit. Cependant, plusieurs éléments démontrent que le dispositif n'est pas pleinement respecté à ce jour. Plus de 1 100 entreprises ont adhéré au nouveau dispositif afin de faire retirer, de leurs fichiers de prospection, les numéros protégés par « BLOCTEL », ce qui semble très en deçà du nombre de professionnels tenus de recourir à ce dispositif préalablement à leur campagne de démarchage téléphonique. Par ailleurs, depuis fin 2016, à partir des signalements déposés par les consommateurs sur le site « BLOCTEL », la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a diligenté de nombreux contrôles d'entreprises suspectées de ne pas respecter les dispositions légales précitées. A l'issue de ces enquêtes, près de 150 entreprises ont été poursuivies pour non-respect du dispositif « BLOCTEL ». Les entreprises identifiées se sont vues infliger une amende atteignant, pour les manquements les plus importants, le plafond de 75 000 euros. Les signalements déposés par les consommateurs, via le formulaire en ligne sur www.bloctel.gouv.fr ou par courrier, sont essentiels à la poursuite des investigations menées par les services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. C'est pourquoi, il est demandé aux consommateurs d'être particulièrement vigilants, lors de la réception d'un appel litigieux, sur le numéro appelant, l'horaire et la date de l'appel, ainsi qu'à l'égard du discours tenu par l'interlocuteur, s'agissant notamment des éléments permettant l'identification de la société appelante. S'agissant de la possibilité d'augmenter le montant des sanctions administratives, cette option pourrait être envisagée si les entreprises continuaient à prospecter des consommateurs inscrits sur « BLOCTEL ». Aujourd'hui, il est, néanmoins, déjà possible de les sanctionner pénalement, dès lors que les agissements en cause peuvent être qualifiées de pratiques commerciales agressives (appels répétés de la même personne malgré le refus explicite de l'intéressé…). Le fait de mettre en œuvre une pratique commerciale agressive est puni d'un emprisonnement, de deux ans au plus, et d'une amende de 300 000 € au plus. Le montant de l'amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 10 % du chiffre d'affaires. Le professionnel encourt également une interdiction d'exercer une activité commerciale. Par ailleurs, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et les opérateurs téléphoniques réfléchissent aux solutions, à mettre en place, pour empêcher les pratiques d'utilisation frauduleuse de numéros de téléphone et tout particulièrement leur usurpation. En tout état de cause, les agents de la DGCCRF poursuivront leur action de contrôle en vue de s'assurer du respect, par les professionnels ayant recours au démarchage téléphonique, de leurs obligations légales qu'aujourd'hui ils ne peuvent plus ignorer. Les opérateurs téléphoniques ont, par ailleurs, été sollicités afin de rendre plus efficient le dispositif d'opposition au démarchage téléphonique et des travaux sont en cours pour explorer toutes les pistes d'amélioration de celui-ci.