15ème législature

Question N° 6061
de M. Jean-Louis Touraine (La République en Marche - Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Égalité femmes hommes
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > droits fondamentaux

Titre > Interdiction des « thérapies de conversion »

Question publiée au JO le : 06/03/2018 page : 1834
Réponse publiée au JO le : 10/07/2018 page : 6111
Date de changement d'attribution: 03/07/2018
Date de renouvellement: 19/06/2018

Texte de la question

M. Jean-Louis Touraine appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur les « thérapies de conversion ». Il s'agit de méthodes ayant pour objectif qu'une personne LGBT change d'orientation sexuelle ou d'identité de genre, partant par-là du principe que l'homosexualité et la transidentité seraient des maladies que l'on pourrait guérir. Ces thérapies prennent la forme d'entretiens, de stages, voire de traitements par électrochocs. Il y a quelques jours, le Parlement européen a adopté un amendement, au cours de l'examen de son rapport annuel sur les droits fondamentaux dans l'Union européenne, appelant les pays membres à interdire ces thérapies de conversion. À ce jour, cette pratique est interdite par quelques régions autonomes espagnoles, ainsi qu'à Malte et au Royaume-Uni. En France, une telle interdiction aurait par ailleurs valeur de symbole, alors que les « LGBTphobies » persistent. Il lui demande si le Gouvernement compte rapidement prendre des mesures en ce sens afin de renforcer les protections à l'attention des personnes LGBT.

Texte de la réponse

Les thérapies de conversion, ou thérapies de réorientation sexuelle, sont un ensemble de pratiques visant à changer l'orientation sexuelle d'une personne. Ces pratiques seraient communes dans certains pays où elles seraient employées sur des adolescents homosexuels ou transgenres contre leur gré. Ces thérapies peuvent passer par l'injection massive de testostérone ou par l'aversion, qui consiste à faire subir des électrochocs au sujet tout en lui montrant des images d'actes homosexuels afin de l'en dégoûter. Le Parlement européen s'est récemment emparé du sujet en votant en mars dernier une « motion » appelant les Etats membres à interdire les thérapies de conversion.  Le Gouvernement lutte quotidiennement contre les discriminations qui continuent de frapper les personnes homosexuelles, transsexuelles ou LGBT. Un délégué interministériel est en charge de ce sujet et veille à la mise en œuvre des mesures prises en la matière.  S'agissant plus précisément des thérapies de conversion, le droit existant permet déjà de réprimer les comportements les plus graves visés ci-avant. En effet, les infractions de violences volontaires, qui permettent la répression de toutes les atteintes à l'intégrité physique et psychique, peuvent s'appliquer, et ce d'autant plus que la répression visée par la proposition de loi se réfère à la notion d'incapacité totale de travail. Par ailleurs, si des pratiques de « conversion » consistent en des pressions graves ou réitérées ou des techniques propres à altérer le jugement d'une personne et conduisent la victime à des actes qui lui sont préjudiciables, il peut être fait application du délit d'abus de faiblesse (article 223-15-2 du code pénal). Enfin, il n'est pas exclu qu'une personne qui prétendrait pouvoir « soigner » l'orientation sexuelle d'une personne, au prétexte qu'il s'agirait d'une « maladie », puisse être sanctionnée pénalement pour exercice illégal de la médecine, dès lors que l'article L.4161-1 du code de la santé publique emploie le terme de maladies « réelles ou supposées » (la jurisprudence a déjà retenu cette qualification pour un « mage » prétendant traiter, par ses pouvoirs divinatoires et magiques, les maladies physiques ou morales, et notamment les envoûtements, Crim., 28 janvier 2004, no 03-80.930).  A ce jour, les services de la Chancellerie n'ont pas à ce jour été informés de l'existence de tels phénomènes sur le territoire français. Ceci étant, et en réponse aux appels des organisations internationales, le ministère de la justice et le ministère de la santé et des solidarités travaillent ensemble à donner une qualification pénale plus précise à ces pratiques. A ce titre, deux pistes sont aujourd'hui étudiées : soit la création d'une circonstance aggravante des délits de violences, lorsque celles-ci visent à modifier l'orientation sexuelle de la victime, soit créer un délit spécifiqueassimilé à l'exercice illégal de la médecine, afin de sanctionner ces pratiques indépendamment des conséquences subies par les victimes.