15ème législature

Question N° 6174
de Mme Émilie Guerel (La République en Marche - Var )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > produits dangereux

Titre > Lutte contre la présence excessive de pesticides dans l'alimentation en France

Question publiée au JO le : 06/03/2018 page : 1811
Réponse publiée au JO le : 19/06/2018 page : 5299

Texte de la question

Mme Émilie Guerel alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur une étude publiée le mardi 20 février 2018 par l'ONG Générations futures, concernant la présence accrue de pesticides dans les fruits et légumes de l'alimentation des Français. S'appuyant sur les données de la direction générale de la répression des fraudes (DGCCRF), ce rapport alarmant indique que près de trois quarts des fruits et 41 % des légumes non biologiques portent des traces de pesticides quantifiables. Si ces résultats corroborent de manière générale les quantités de pesticides utilisés en culture, ils révèlent toutefois quelques surprises. Ainsi la pomme, le fruit le plus consommé par les Français en volume, qui se voit appliquer en moyenne 36 traitements de produits phytosanitaires par an, se situe « seulement » en 8e position du classement de Générations futures. De même que la pomme de terre, 7e du classement malgré ses 19 traitements. De manière générale, ce classement montre que la présence des pesticides est encore un vrai souci dans l'alimentation des citoyens français. Le projet « zéro résidu de pesticides » en cours d'élaboration, semble manifestement insuffisant. Favorable au développement de l'agriculture biologique, Mme Emilie Guerel suggère la mise en place d'un affichage obligatoire des pesticides utilisés dans la culture et le stockage des aliments. Après une première série de mesures non probantes, le Gouvernement travaille actuellement sur un plan d'action visant à réduire les produits phytopharmaceutiques dans l'agriculture. Elle souhaite en savoir davantage sur ce projet et aimerait connaître les actions que le Gouvernement compte mener afin de lutter contre les pesticides, pour les cinq années à venir.

Texte de la réponse

Un traitement phytopharmaceutique peut entraîner la présence de résidus sur ou dans les végétaux traités. Afin de protéger la santé du consommateur et s'assurer du respect des bonnes pratiques agricoles, des limites maximales de résidus (LMR) sont définies au niveau européen sur la base des études de l'autorité européenne de sécurité des aliments, voire au niveau international dans le cadre du codex alimentarius. Pour un produit phytopharmaceutique donné, appliqué sur un végétal défini, la LMR correspond au seuil réglementaire maximum au-delà duquel la denrée ne peut pas être commercialisée. Les LMR sont définies pour chaque couple denrée/substance active du produit phytopharmaceutique pour assurer un traitement efficace tout en garantissant une alimentation sûre. Elles sont établies de façon à rester nettement en deçà des valeurs toxicologiques de référence, c'est-à-dire de telle sorte que les quantités de résidus qu'un individu est susceptible d'ingérer dans son alimentation, y compris les personnes les plus vulnérables telles que les enfants et les personnes malades, n'engendrent pas d'exposition inacceptable, ni à court ni à long terme, avec une marge de sécurité importante. La présence quantifiable de résidus de pesticides ne signifie pas que la denrée présente un risque pour les consommateurs. Les services de l'État procèdent à des contrôles officiels aléatoires ou ciblés dans les végétaux en réalisant des prélèvements à tous les stades de la chaîne alimentaire, pour rechercher et mesurer la présence de résidus de produits phytopharmaceutiques. Chaque prélèvement permet de rechercher 400 à 500 substances actives phytopharmaceutiques. Les services du ministère chargé de l'agriculture effectuent chaque année autour de 1 000 prélèvements au niveau des exploitations agricoles. Les services du ministère chargé de l'économie réalisent une moyenne annuelle de 5 000 prélèvements sur des végétaux placés sur le marché, d'origine française ou étrangère. En 2016, les analyses réalisées par les services du ministère de l'agriculture ont mis en évidence un taux de non conformités -dépassement de la LMR ou présence, y compris à un niveau inférieur à la LMR, de substances non autorisées sur la culture- approchant les 7 %. En cas de non conformité, une enquête est menée chez le producteur et des mesures sont prises. Les denrées sont retirées du marché lorsque les seuils de toxicité sont dépassés. Des actions pénales sont aussi engagées lors de constat de fraudes. Par ailleurs, le Gouvernement vient de publier un plan d'actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides. Ce plan s'articule autour de quatre priorités : - diminuer rapidement l'utilisation des substances les plus préoccupantes pour la santé et l'environnement, dans le prolongement des recommandations du rapport inter-inspections de fin 2017 ; - mieux connaître les impacts pour mieux informer et protéger la population et les professionnels et préserver l'environnement ; - amplifier la recherche-développement d'alternatives et la mise en œuvre de ces solutions par les agriculteurs ; - renforcer le plan Ecophyto 2, améliorer sa gouvernance et son fonctionnement. Pour assurer la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, des leviers législatifs et financiers seront mobilisés : le projet de loi issu des états généraux de l'alimentation, actuellement en discussion au Parlement, comprend ainsi des dispositions relatives à la séparation de la vente et du conseil sur les produits phytopharmaceutiques. Par ailleurs, la redevance pour pollutions diffuses sera renforcée. Les recettes supplémentaires contribueront à financer l'accompagnement des agriculteurs, notamment dans le cadre de la conversion à l'agriculture biologique. Enfin le Gouvernement a adopté une ligne claire au niveau européen en se positionnant systématiquement contre la prolongation ou le renouvellement des substances qui remplissent des critères d'exclusion au niveau européen et en avançant avec la Commission et les États membres vers une réforme des agences européennes d'évaluation des risques avec notamment la création d'un mécanisme permettant de financer des études indépendantes et une plus grande transparence dans le processus d'évaluation.