Question écrite n° 6176 :
Permettre aux entreprises du BTP de respecter les obligations de désamiantage

15e Législature

Question de : Mme Typhanie Degois
Savoie (1re circonscription) - La République en Marche

Mme Typhanie Degois alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les conditions du désamiantage en France et sur la nécessité de renforcer les dispositifs de contrôle dans ce domaine pour permettre aux entreprises du secteur du bâtiment et des travaux public de respecter la loi. L'amiante constitue toujours un enjeu majeur de santé publique. Au niveau européen, toute extraction, fabrication, transformation de fibres d'amiante a été interdite depuis 1999 par la directive 99/77/CE. Pourtant, si sa prohibition ne fait plus débat aujourd'hui, les conditions dans lesquelles se déroulent le désamiantage suscitent encore de profondes interrogations tant elles apparaissent lacunaires. Tel que le prévoit le décret n° 2012-639 du 4 mai 2012, les travaux de désamiantage doivent être réalisés par des entreprises d'encapsulage certifiées. Les conditions et procédures d'accréditation des organismes certificateurs mentionnés à l'article R. 4412-129 du code du travail, sur la base du référentiel technique de l'organisme chargé de l'accréditation, sont déterminées par le ministère du travail. En dépit des avancées poursuivies par le décret, un rapport d'information du Sénat datant de 2014 intitulé « Amiante : des enjeux toujours actuels, relever le défi du désamiantage » montre les limites de celles-ci. Il énonce que les corps de contrôle de l'État et de prévention de la sécurité sociale sont notoirement en nombre insuffisants, et n'interviennent pas de façon suffisamment coordonnée. En outre, les organismes accrédités ne réalisent pas assez de contrôle auprès des entreprises de désamiantage sur les chantiers en situation réelle. Si l'ordonnance n° 2016-413 du 7 avril 2016 a renforcé les pouvoirs de l'Inspection du travail dans ce domaine, son manque de moyens rend illusoire l'accomplissement de ses nouvelles prérogatives. D'une part, la faiblesse des contrôles conduit à une distorsion de concurrence entre les entreprises qui se conforment aux obligations légales et celles qui ne les respectent pas. D'autre part, le non-respect de la procédure de désamiantage est inquiétant pour l'environnement dans la mesure où les déchetteries sauvages se multiplient. Afin d'éviter de nouveaux drames quant aux conséquences de l'amiante, il est indispensable de permettre aux entreprises du bâtiment et des travaux publics de respecter la loi. Suite aux recommandations du rapport d'information susmentionné, elle lui demande de renforcer les pouvoirs dévolus aux organismes accrédités, les moyens humains et financiers de l'Inspection du travail ainsi que la mise en place de contrôles plus nombreux, réguliers et rigoureux.

Réponse publiée le 12 février 2019

L'attention du Gouvernement a été appelée sur les conditions du désamiantage en France, sur la nécessité de renforcer les dispositifs de contrôle dans ce domaine afin de permettre aux entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics de respecter la loi et le renforcement des pouvoirs dévolus aux organismes accrédités, les moyens humains et financiers de l'inspection du travail, ainsi que la mise en place de contrôles plus nombreux, réguliers et rigoureux. Le rapport sénatorial de juillet 2014, en matière d'amélioration du repérage de l'amiante et de renforcement de la protection des travailleurs exposés à l'amiante, a préconisé plusieurs recommandations notamment : - l'introduction dans le code du travail d'une obligation de repérage avant travaux de l'amiante ; - l'élargissement à tous les secteurs d'activité du pouvoir d'arrêt de chantier par décision de l'inspecteur du travail ; - la professionnalisation des acteurs de la filière de l'amiante ; - l'appui à la recherche et au développement notamment en matière de détection de l'amiante et de techniques de désamiantage. L'amiante demeure un sujet prioritaire pour la direction générale du travail (DGT) qui a mis en place un plan pluriannuel et stratégique (PPS) 2017-2020 en matière d'amiante selon les axes suivants : - améliorer la connaissance scientifique et technique ; - faciliter le repérage de l'amiante ; - protéger les travailleurs et l'environnement ; - qualifier et former ; - reconnaître la technicité des entreprises et de leurs travailleurs ; - contrôler et accompagner à l'appropriation de la réglementation. Ce PPS organise et priorise la contribution du ministère du travail au plan interministériel amiante (PAIA) défini en décembre 2015, lequel décline l'action de l'Etat dans le domaine de l'amiante en 5 axes et 23 actions, dont plusieurs ont été inscrites dans le plan santé travail n° 3 (PST3). Le PAIA permet ainsi d'amplifier les initiatives de tous les acteurs concernés sur des objectifs stratégiques communs, de dégager des priorités au regard des moyens mobilisables et d'impliquer l'ensemble de la filière dans une démarche collective qui allie tout à la fois la montée en compétence et la standardisation des pratiques afin de garantir, sur l'ensemble du territoire national une égalité de traitement des travailleurs. Dans cette optique, un portail d'information interministériel est ouvert depuis juillet 2017 sur le site internet du commissariat général à l'environnement et au développement durable (CGEDD) qui permet aux usagers, qu'ils soient particuliers ou professionnels, de disposer d'une information de qualité, gratuite et actualisée, selon les différents champs de compétence des administrations et organismes référencés. https://www.toutsurlenvironnement.fr/Informations/tout-sur-lenvironnement Environ 25 000 opérations de désamiantage sont menées chaque année sur le territoire national et 40 années seront a minima nécessaires pour éradiquer l'amiante utilisé avant 1997, cette problématique n'étant pas exclusive du seul secteur du bâtiment mais concernant également les infrastructures de transport, le matériel roulant ferroviaire, les navires, les aéronefs ou les installations et équipements de production. Aussi, la création du repérage avant travaux (RAT) dans le code du travail constitue le chantier prioritaire du ministère du travail, qui s'est engagé dans un processus lourd de normalisation afin de structurer le RAT selon les 6 domaines d'activité définis à l'article R. 4412-97/II du code du travail, issu du décret n° 2017-899 du 9 mai 2017 relatif au repérage de l'amiante avant certaines opérations. La standardisation des procédés concourt également à la limitation des aléas par des gestes professionnels adaptés et maîtrisés qui intègrent la prévention et l'organisation, ce qui a conduit la DGT à œuvrer étroitement depuis 2015 avec la délégation générale à l'emploi et la formation professionnelle (DGEFP) afin de créer en 2019, 3 titres professionnels du désamiantage. Les jeunes générations d'opérateurs, d'encadrants de chantier, d'encadrants techniques ainsi formés auront les moyens de maîtriser les innovations techniques que le plan recherche et développement amiante (PRDA), piloté par le ministère du logement fait actuellement émerger. Par ailleurs, la DGT accompagne les branches professionnelles, afin d'assurer la montée en compétence des acteurs et permettra in fine de réguler les pratiques concurrentielles. Les donneurs d'ordre pourront ainsi identifier, les entreprises leur apportant une sécurité sanitaire et juridique maximale grâce à leur maîtrise technique et leur professionnalisme. Tel est le cas de la campagne CARTO engagée par les organisations professionnelles du BTP qui a pour objectif d'établir une cartographie des empoussièrements mesurés lors d'interventions courantes de courte durée, relevant de la sous-section 4, dont les enseignements vont permettre d'élaborer des règles de l'art avec l'appui des organisations professionnelles et le concours financier du PRDA. Au 1er septembre 2017, on dénombrait 1 083 entreprises certifiées pour réaliser les travaux de désamiantage (contre 350 avant 2012), employant environ 30 000 travailleurs, tandis que 2 millions de travailleurs environ effectuent des interventions sur matériaux amiantés relevant de la sous-section 4, y compris dans les services techniques relevant des 3 fonctions publiques. Dans ce contexte en forte évolution technique, les actions de contrôle des services d'inspection du travail concourent également à assurer l'effectivité de la réglementation, y compris par l'élargissement au 1er juillet 2016 du champ de la décision administrative d'arrêt de travaux. Des contrôles sont ainsi ciblés dans le budget d'opération de programme du ministère du travail (BOP 111) au regard des points de vigilance identifiés, sur la base notamment des signalements reçus des services d'inspection du travail. Les manquements constatés peuvent, le cas échéant, entraîner le retrait ou la suspension des certifications et accréditations des intervenants défaillants (entreprises de désamiantage, OA, organismes de formation à la prévention). Le système d'inspection du travail s'est structuré depuis la mise en œuvre de la réforme des services d'inspection par la création de Réseaux des Risques Particuliers (RRP) comprenant obligatoirement la thématique de l'amiante. Ceux-ci appuient les autres agents de l'inspection du travail dans leurs contrôles des chantiers, des sièges d'entreprises certifiés et des organismes concernés par l'amiante. Ils participent également à des actions de communication et d'information des usagers (guides, plaquettes, colloques…). Du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, environ 16 500 interventions de l'inspection du travail ont porté sur l'action prioritaire amiante, dont près de 1 400 sur les organismes assurant la formation à la prévention des travailleurs réalisant les interventions sur matériaux amiantés (sous-section 4). Dans ce cadre, l'inspection du travail soustrait les travailleurs au risque lorsque les mesures de protection sont insuffisamment mises en œuvre. Ainsi, depuis l'entrée en vigueur le 1er juillet 2016 de l'ordonnance sur les nouveaux pouvoirs de l'inspection du travail qui a étendu les possibilités d'arrêts de travaux en matière de risque d'amiante, 226 décisions visant à retirer les salariés de situations dangereuses ont été notifiées.

Données clés

Auteur : Mme Typhanie Degois

Type de question : Question écrite

Rubrique : Produits dangereux

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Travail

Dates :
Question publiée le 6 mars 2018
Réponse publiée le 12 février 2019

partager