Question écrite n° 6210 :
Conséquences de l'abrogation de l'article 1er du décret n° 83-1025 du 28/11/1983

15e Législature

Question de : M. Franck Marlin
Essonne (2e circonscription) - Les Républicains

M. Franck Marlin appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur l'abrogation de l'article premier du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers par l'article 20 du décret n° 2006-672 du 8 juin 2006. En effet, cet article offrait des garanties importantes aux citoyens puisqu'il disposait que « tout intéressé est fondé à se prévaloir, à l'encontre de l'administration, des instructions, directives et circulaires publiées dans les conditions prévues par l'article 9 de la loi susvisée du 17 juillet 1978, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux lois et règlements ». Or contrairement aux autres articles du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983, il semble qu'il n'ait pas été codifié ou repris dans un autre texte législatif ou réglementaire. L'abrogation de l'article premier du décret du 28 novembre 1983 constitue, sur ce point, un recul plus que notable. En effet, la suppression de cet article s'inscrit a contrario d'une double évolution, d'une part, la tendance législative à entériner des mécanismes ciblés d'invocabilité, d'autre part, la volonté affichée du Conseil d'État dans son rapport annuel 2006 d'établir « un nouveau statut pour le droit souterrain ». Ce rapport n'hésite pas en effet à invoquer l'article précité, non abrogé à la date de publication du rapport, à l'appui de la nécessité de publier les circulaires pour une information complète du citoyen parce que « dans la pratique administrative, les circulaires revêtent une grande importance, à tel point que les services s'y réfèrent parfois plus qu'aux lois et aux décrets qu'elles entendent interpréter ». Aujourd'hui, le droit est devenu de plus en plus complexe et la protection du citoyen doit être organisée face à cette complexité croissante. Comme l'indique encore ce rapport annuel du Conseil d'État, « une telle évolution accroît la « fracture juridique », une partie de la population se trouve marginalisée par un droit devenu trop complexe, tandis que d'autres acteurs s'accommodent de la complexité, voire l'exploitent à leur profit. La complexité du droit engendre donc à la fois un « coût psychologique » et un « coût démocratique » [...] ». Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer comment le Gouvernement entend rétablir cette garantie essentielle pour les justiciables.

Réponse publiée le 8 mai 2018

Le Gouvernement partage les préoccupations exprimées par M. le député en ce qui concerne l'accès au droit en général et l'accès aux instructions et circulaires adressées par les ministres à leurs administrations. Le décret du 8 décembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires, désormais codifié à l'article R. 312-8 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que ces circulaires sont tenues à la disposition du public sur un site internet relevant du Premier ministre. Il précise en outre qu'une circulaire ou une instruction qui ne figure pas sur ce site n'est pas applicable et que les services ne peuvent en aucun cas s'en prévaloir à l'égard des administrés. Le gouvernement a engagé un important travail de mise à jour de la base des circulaires accessibles sur le site « circulaires.legifrance.gouv.fr/ » afin de procéder au retrait des circulaires obsolètes et de convertir les documents anciens dans un format ouvert et réutilisable. Ces mesures apportent une contribution notable à l'accessibilité des circulaires. Le Gouvernement a par ailleurs proposé, dans le projet de loi pour un Etat au service d'une société de confiance, en cours d'examen au Parlement, de prévoir que toute personne peut se prévaloir des circulaires et instructions émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'État et publiées sur des sites internet ayant vocation à réunir les documents opposables à l'administration. Les dispositions votées dans les mêmes termes par les deux assemblées prévoient que les citoyens pourront se prévaloir de ces circulaires et instructions sans que l'administration puisse leur opposer la loi ou le règlement, sous réserve de l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement. En inscrivant dans la loi le principe énoncé à l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 et en l'encadrant pour assurer sa conciliation avec d'autres objectifs d'intérêt général, ces nouvelles dispositions permettront de lui donner une portée utile allant bien au-delà de celle qui pouvait résulter d'un décret. 

Données clés

Auteur : M. Franck Marlin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Administration

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Premier ministre

Dates :
Question publiée le 13 mars 2018
Réponse publiée le 8 mai 2018

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