15ème législature

Question N° 626
de M. Meyer Habib (UDI, Agir et Indépendants - Français établis hors de France )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > animaux

Titre > Risques liés à la vente libre de colliers dits de dressage

Question publiée au JO le : 26/02/2019
Réponse publiée au JO le : 06/03/2019 page : 1748

Texte de la question

M. Meyer Habib appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les risques liés à la vente libre de colliers dits de « dressage », tels que les colliers à pointes ou par stimulation électrique. En 2019, les animaux de compagnies peuvent être impunément torturés par ces colliers, qui brûlent ou percent la peau jusqu'au sang. Une étude menée par 2 600 vétérinaires belges a démontré que 26 % des chiens victimes présentent des comportements décuplés de peur, dont 17 % sont traumatisés, et 14 % présentent de graves brûlures niveau de l'encolure. Ce constat est intolérable et consternant. Il a donc déposé une proposition de loi en juillet 2018, cosignée par une cinquantaine de députés de tous bords politiques. Le bien-être animal constitue une préoccupation grandissante des Français et transcende les lignes partisanes. Selon un sondage Ifop publié le 28 mai 2018, 80 % des Français considèrent qu'il est du devoir de son député de voter des amendements défendant la condition animale. Un mois plus tard, un autre sondage du même institut révèle que 95 % des Français souhaitent « que les actes de cruauté commis envers un animal soient condamnés sur l'ensemble du territoire français ». Dans ce contexte, l'emploi des colliers dits de « dressage » est une pratique contraire à l'éthique animale. Leur vente doit être interdite ou, a minima, strictement encadrée, par exemple en réservant leur usage à des professionnels du dressage. Plusieurs pays voisins européens ont d'ores et déjà interdit leurs ventes, notamment l'Allemagne, la Suisse, l'Autriche, le Danemark ou la Slovénie. L'Australie a également prohibé les colliers de dressage. Par ailleurs, il lui rappelle que l'article 7 du décret n° 2004-416 du 11 mai 2004 portant publication de la convention européenne pour la protection des animaux de compagnie, du 13 novembre 1987, signée par la France le 18 décembre 1996 et ratifiée le 8 juillet 2003 dispose « qu'aucun animal de compagnie ne doit être dressé d'une façon qui porte préjudice à sa santé et à son bien-être, notamment en le forçant à dépasser ses capacités ou sa force naturelles ou en utilisant des moyens artificiels qui provoquent des blessures ou d'inutiles douleurs, souffrances ou angoisses ». Dans ce cadre, il souhaite savoir si le Gouvernement entend mettre fin à ces tortures animales en interdisant l'emploi et la vente libre des colliers de dressage, a minima, en encadrant strictement leur commercialisation.

Texte de la réponse

RÉGLEMENTATION DE LA VENTE DES COLLIERS DE DRESSAGE


M. le président. La parole est à M. Meyer Habib, pour exposer sa question, n°  626, relative à réglementation de la vente des colliers de dressage.

M. Meyer Habib. Je veux associer à ma question les cinquante cosignataires de ma proposition de loi du 25 juillet dernier, qui vise à interdire la vente libre de colliers de dressage.

De quoi s'agit-il ? Imaginez-vous qu'en 2019, des colliers à pointes ou à stimulation électrique sont utilisés par des maîtres en vue du dressage ou, plus largement, d'exercer un contrôle sur leur chien. Le collier à pointes est une chaîne en métal, composée de pointes qui pénètrent dans la peau du chien, le blessant jusqu'au sang s'il tire sur la laisse du maître. Avec votre permission, monsieur le président, je montrerai brièvement cet objet. (M. Meyer Habib montre un collier à pointes.) C'est tout simplement intolérable. Quant au collier électrique, c'est pire. Il s'agit d'un kit composé d'un collier et d'une télécommande pour l'actionner à distance. La plupart des télécommandes proposent plusieurs fonctions : un bouton pour l'avertisseur sonore – première sommation –, un pour le vibreur – deuxième sommation –, un autre encore pour des décharges électriques d'intensité variable. Oui, des décharges électriques !

Je veux vous rapporter une anecdote qui a motivé ma proposition de loi. En juin dernier, promenant Kooper, le shiba inu de ma fille, dans le parc situé en bas de chez moi, j'ai croisé un petit chien de race beagle, totalement inoffensif, qui désirait simplement jouer avec mon chien. Le maître, occupé à déjeuner sur l'herbe, a actionné par télécommande le collier de dressage par stimulation électrique attaché au cou de l'animal. Le chien s'est mis à geindre, puis à hurler de douleur sur des dizaines de mètres en courant vers son maître le plus vite possible, pour que cela s'arrête. Je ne puis oublier ces cris de détresse d'un animal.

Nous, législateur, ne pouvons laisser perdurer de telles pratiques. Les souffrances et traumatismes engendrés par l'utilisation de ces colliers sont d'ailleurs très bien documentés. Une étude menée en Belgique par 2 600 vétérinaires a ainsi abouti à des conclusions édifiantes : 26 % des chiens victimes de colliers par stimulation électrique présentent des comportements de peur décuplés ; parmi eux, 17 % sont traumatisés et 14 % présentent de graves brûlures au niveau de l'encolure.

Je n'imaginais pas recevoir, après avoir déposé ma proposition de loi, des centaines de messages de soutien et de témoignages. Je vous lis, par exemple, le courriel de Mme Ingrid Mulson, éducatrice canine : « En tant que professionnelle, je ne peux que vous remercier pour cette proposition de loi. Je me permets d'ajouter qu'au-delà de la souffrance physique ressentie par l'animal, ces outils engendrent maintes souffrances émotionnelles, lesquelles occasionnent des troubles comportementaux allant de la détresse acquise à la morsure. »

Une société se juge aussi à l'aune de son rapport à la souffrance animale. C'est d'ailleurs pour cette raison que nombre de nos voisins européens ont déjà interdit la vente libre des colliers dont nous parlons : l'Allemagne, la Suisse, l'Autriche, le Danemark ou encore la Slovénie, pour ne citer que quelques pays. L'article 515-14 du code civil, issu de la loi du 28 janvier 2015, reconnaît, je le rappelle, les animaux comme « des êtres vivants doués de sensibilité ».

Le bien-être animal constitue, pour les Français, une préoccupation croissante. Selon un sondage IFOP publié en juin 2018, 95 % de nos concitoyens souhaitent ainsi que « les actes de cruauté commis envers un animal soient condamnés sur l'ensemble du territoire français ». Il faut donc aujourd'hui passer aux actes, madame la ministre chargée des transports. C'est pourquoi je demande que le Gouvernement interdise sans délai, ou à tout le moins encadre très strictement, la vente de ces outils de torture dont l'utilisation heurte notre sens éthique.

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.

Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, ne pouvant être présent ce matin, il m'a chargée, monsieur le député, de vous répondre.

L'article 7 de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie est effectivement traduit dans le droit français aux articles R. 214-17 et R. 214-24 du code rural et de la pêche maritime. Aux termes de ce dernier article, « l'exercice des activités d'éducation et de dressage d'un animal de compagnie dans des conditions de nature à lui infliger des blessures ou des souffrances inutiles est interdit. »

L'article R. 214-17, lui, interdit « d'utiliser, sauf en cas de nécessité absolue, des dispositifs d'attache ou de contention ainsi que de clôtures, des cages ou plus généralement tout mode de détention inadaptés à l'espèce considérée ou de nature à provoquer des blessures ou des souffrances ».

En outre, l'arrêté du 25 octobre 1982 relatif à l'élevage, à la garde et à la détention des animaux indique qu'« en aucun cas », pour un chien à l'attache, « le collier ne doit être constitué par la chaîne d'attache elle-même ni par un collier de force ou étrangleur ».

Ainsi, sauf cas de nécessité, l'utilisation pour le dressage de colliers à pointes ou, dans une moindre mesure, de colliers électriques, est contraire aux articles réglementaires que je viens de citer. L'utilisation de tels colliers peut néanmoins être tolérée dans quelques cas particuliers, à condition que leur nécessité soit démontrée au vu du comportement inadapté ou dangereux du chien.

Par ailleurs, afin d'accentuer la lutte contre la maltraitance animale, la récente loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, promulguée le 1er novembre 2018, a instauré un doublement des peines, les portant de six mois à un an d'emprisonnement et de 7 500 à 15 000 euros d'amende.

M. le président. La parole est à M. Meyer Habib.

M. Meyer Habib. Le collier que j'ai montré, madame la ministre, a été acheté pas plus tard qu'hier. Je vais d'ailleurs le rendre, car il s'agissait simplement pour moi de démontrer, au-delà de vos explications que j'entends, qu'il est aujourd'hui possible d'acheter librement des colliers à décharges électriques – pour 80 euros – ou à pointes – pour 25 euros. Il y a donc manifestement une contradiction entre vos propos et la réalité.