15ème législature

Question N° 649
de M. Gérard Menuel (Les Républicains - Aube )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Accompagnement des agriculteurs pour les défis environnementaux

Question publiée au JO le : 19/03/2019
Réponse publiée au JO le : 27/03/2019 page : 3065

Texte de la question

M. Gérard Menuel attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'accompagnement des agriculteurs face aux défis environnementaux. Les agriculteurs participent activement à la protection de l'environnement et doivent adapter leurs méthodes culturales. La qualité de l'eau, la préservation des sols, le maintien de la biodiversité passent par de nouvelles pratiques culturales qui feront appel à des investissements lourds dans des technologies avancées (robots, drones, etc.) et aussi, c'est indispensable, à des variétés de plantes qui seront résistantes, en particulier aux bio-agresseurs, afin d'éviter, pour protéger l'environnement, l'emploi de produits phytopharmaceutiques. Pour cela, la recherche doit avancer et proposer des solutions qui le permettent, en particulier par la mutagenèse. Il lui demande quelles orientations son ministère entend impulser afin de donner aux agriculteurs des solutions aux défis environnementaux.

Texte de la réponse

DÉFIS ENVIRONNEMENTAUX POUR LES AGRICULTEURS


M. le président. La parole est à M. Gérard Menuel, pour exposer sa question, n°  649, relative aux défis environnementaux pour les agriculteurs.

M. Gérard Menuel. Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je veux vous interroger sur la politique nationale à mener dans le secteur agricole au regard des défis et des enjeux environnementaux qui sont devant nous.

La qualité de l'eau, la préservation des sols, le maintien de la biodiversité sont autant d'éléments incontournables qui doivent guider les politiques culturales dans les exploitations agricoles. Je ne veux pas, par ailleurs, ignorer le réchauffement climatique qui va perturber les façons de faire dans l'agriculture, secteur qui devra lui aussi répondre aux exigences en matière de CO2 mais également mieux maîtriser ses besoins en eau.

De nombreuses pratiques agricoles devront donc évoluer. Ce mouvement est déjà engagé, avec le bio, le développement de l'agriculture de conservation ou encore la réduction voire, à terme, l'arrêt de l'emploi de la phytopharmacie en agriculture et l'arrivée de nouvelles méthodes de protection comme le biocontrôle.

Cette nécessaire adaptation de l'agriculture passe, qu'on le veuille ou non, par des investissements lourds dans des technologies avancées faisant appel aux robots, aux drones et à du matériel spécifique pouvant par exemple remplacer le désherbage chimique. Cela passe aussi par la recherche, qui devra être en mesure de proposer aux agriculteurs des variétés de végétaux résistantes aux bioagresseurs, en faisant appel, par exemple, à la mutagenèse, limitant ainsi l'apport de produits chimiques.

Monsieur le ministre, face à ces défis, êtes-vous prêt à accompagner par des engagements appropriés la nécessaire mutation agricole et à soutenir la recherche afin de proposer des alternatives durables à l'emploi de la phytopharmacie en agriculture ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur Menuel, votre question, sur laquelle l'ensemble des parlementaires et l'exécutif travaillent, est à la fois une question agricole et une question de société : quelle agriculture voulons-nous pour demain ?

L'exigence de nos concitoyens est toujours la même : nous voulons manger à notre faim, bénéficier de la meilleure indépendance alimentaire possible et de la sûreté sanitaire la plus efficace, et, en même temps, sortir de la dépendance totale aux produits phytosanitaires – vous avez raison de dire que c'est indispensable. Il faut faire tout cela à la fois.

Pour y parvenir, il faut se fonder sur deux grandes orientations.

Il faut d'abord investir dans la recherche. Que sera l'agriculture demain ? Quel est son avenir ? Comment cultiverons-nous ? Le Gouvernement et l'immense majorité des parlementaires apportent une réponse : la transition agroécologique, que nous devons fonder sur l'agronomie, à partir d'une autre façon de cultiver les terres, d'une meilleure rotation des sols, etc. – vous connaissez tout cela aussi bien que moi. Il faut ensuite s'appuyer sur la recherche privée. Lorsque j'ai inauguré le salon international du machinisme agricole, je me suis rendu compte que la filière française des agroéquipements est en tout point remarquable : elle développe des systèmes mécaniques qui permettront d'économiser jusqu'à 80 % de produits, ce qui est absolument remarquable ! Il faut maintenant faire en sorte que ces agroéquipements puissent être mis en fonctionnement sur les surfaces agricoles françaises.

Évidemment, il faut aussi se fonder sur d'autres évolutions. Vous évoquez les nouvelles pratiques de sélection, les NBT – New Breeding Techniques, ou nouvelles techniques de sélection végétale –, qui doivent se conformer à la réglementation relative aux OGM. Un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne de juillet 2018 considère que ces nouvelles pratiques doivent répondre à la réglementation des OGM issus de la transgénèse. L'interprétation de cet avis soulève des interrogations, la réglementation européenne sur les OGM n'étant pas adaptée à ces nouvelles techniques ; la détection des NBT, en particulier, pose des difficultés. Des discussions sont donc en cours avec la Commission européenne et un rapport du laboratoire de référence de l'Union européenne est attendu sur cette question.

Dans son avis de mars 2018 sur les nouvelles techniques d'amélioration des plantes, le comité d'éthique de l'INRA – Institut national de la recherche agronomique –, du CIRAD – Centre de coopération internationale en recherche agronomique – et de l'IFREMER – Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer – recommande à la fois d'être vigilant quant aux formes d'agriculture d'économie et de société que prépare l'édition des génomes végétaux, et de réserver une ouverture dans les approches et les thématiques de recherche, de manière à explorer aussi les ressources offertes par des techniques alternatives. À cet égard, je peux aller dans votre sens, monsieur le député.

Plus globalement, se pose la question de notre agriculture de demain : sommes-nous prêts collectivement à accepter certaines de ces techniques pour contribuer à la réduction des produits phytosanitaires et ainsi promouvoir une agriculture plus durable ? Ce débat devra avoir lieu prochainement, en intégrant les enjeux scientifiques, techniques, environnementaux, sociétaux et éthiques. Votre question est vraiment une question d'actualité ; je vous en remercie.

M. le président. La parole est à M. Gérard Menuel.

M. Gérard Menuel. Monsieur le ministre, je partage plusieurs observations que vous venez de formuler, notamment concernant la recherche privée à travers la mécanisation, qui doit être soutenue. Je me permets toutefois d'insister sur la recherche variétale, qui permettra de limiter fortement l'usage de la phytopharmacie en agriculture. Cette recherche a besoin de soutien. Or l'actualité nous a montré que des faucheurs allaient briser la recherche nationale de grands groupes coopératifs ou privés ; il faudra mettre fin à ces comportements.

Quant au débat sur les OGM, nous l'avons eu par le passé, et je crois qu'il est maintenant totalement dépassé. Il est derrière nous, mais devant nous se lève la problématique de la mutagénèse. La recherche doit également s'engager sur ce secteur.

M. Didier Guillaume, ministre. Tout à fait !

M. Gérard Menuel. Je rappelle que la mutagénèse n'a rien à voir avec les OGM, car aucun apport en matériel génétique extérieur ne vient modifier les nouvelles plantes.