Position du gouvernement sur la circulaire dite "Alliot-Marie"
Question de :
Mme Anne-France Brunet
Loire-Atlantique (3e circonscription) - La République en Marche
Mme Anne-France Brunet interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la circulaire CRIM-AP n° 09-9006-A4, prise le 12 février 2010, autrement appelée « circulaire Alliot-Marie ». Cette circulaire demande aux parquets d'engager des poursuites contre les personnes appelant ou participant à des actions de boycott sur des produits déclarés israéliens et issus des colonies israéliennes en Palestine au motif que ce type d'action peut être assimilée à de la provocation à la discrimination ou à la haine raciale. Les mouvements de boycott, émergeant principalement de structures associatives ou politiques, sont dans leur grande majorité pacifistes. Ils fondent leurs actions sur la reconnaissance par les Nations unies de l'illégalité de l'implantation des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens, implantation également condamnées par la France. Considérant que l'exportation et l'importation en France de produits issus de ces territoires colonisés constituent une atteinte au droit international, leurs campagnes ne sauraient caractériser dans leur grande majorité une incitation à la haine, mais un appel au respect des règles internationales. Elle souhaite à ce titre l'interroger sur la position du Gouvernement concernant cette disposition et sur l'éventualité de son abrogation.
Réponse publiée le 24 avril 2018
Les opérations appelant au boycott de produits israéliens sont susceptibles de caractériser le délit de provocation publique à la discrimination à l'égard d'un groupe de personnes à raison de leur appartenance à une nation, prévu et réprimé par l'article 24 alinéa 7 de la loi du 29 juillet 1881. L'application decette incrimination aux procédures d'appel au boycott de produits israéliens a été validée par la chambre criminelle de la Cour de cassation, notamment dans un arrêt du 20 octobre 2015, qui précise que l'exercice de la liberté d'expression peut être soumis à des restrictions ou sanctions qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la défense de l'ordre et à la protection des droits d'autrui. Cette qualification pénale n'interdit en effet pas la libre critique de la politique d'un État ou l'expression publique d'un choix personnel, mais vient réprimer les messages et comportements appelant à la discrimination d'une ou plusieurs personnes, uniquement au regard de leur nationalité, particulièrement, comme le prévoit l'article 225-2 du code pénal, lorsque la discrimination consiste à entraver l'exercice d'une activité économique. Au regard de la multiplication des opérations d'appel au boycott en divers points du territoire national, il a paru nécessaire d'assurer une réponse cohérente de la part du ministère public. Deux dépêches ont ainsi été adressées, le 12 février 2010 et le 15 mai 2012, aux parquets généraux afin de rappeler les difficultés procédurales liées à l'application de la loi du 29 juillet 1881 et, plus précisément, s'agissant de la mise en œuvre de son article 24 alinéa 7. Il appartient au procureur de la République d'apprécier les éléments constitutifs de l'infraction, dans son contexte particulier, et de choisir la réponse pénale la plus adaptée.
Auteur : Mme Anne-France Brunet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 27 mars 2018
Réponse publiée le 24 avril 2018