15ème législature

Question N° 7131
de M. Jean-Luc Reitzer (Les Républicains - Haut-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > sécurité routière

Titre > « Ubérisation » des autoécoles

Question publiée au JO le : 03/04/2018 page : 2728
Réponse publiée au JO le : 22/05/2018 page : 4265

Texte de la question

M. Jean-Luc Reitzer attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la concurrence déloyale existant entre les établissements d'enseignement de la conduite et les plateformes numériques mettant en relation des jeunes et des enseignants indépendants de la conduite. En effet, afin d'éviter de s'acquitter des cotisations sociales et patronales, de nouveaux entrants sur le secteur ont créé des plateformes numériques sur lesquelles s'inscrivent des élèves et des enseignants de la conduite supposés autoentrepreneurs. L'enseignement de la conduite à titre onéreux est une activité réglementée dans des conditions définies par le code de la route. Une réglementation stricte a été établie afin de garantir une qualité minimale dans l'enseignement de la conduite. Il apparaît ainsi notamment que l'enseignement à titre onéreux ne peut être organisé que dans le cadre d'un établissement agréé par le préfet du département d'implantation, sous la responsabilité d'un exploitant, responsable de la conformité du fonctionnement de l'établissement, d'une part, et de celle de l'enseignement au programme fixé par l'autorité administrative, d'autre part. Or ces enseignants qui échappent à tout contrôle de l'État ne bénéficient pas de l'autorisation d'enseigner délivrée par la préfecture. Il lui demande si le Gouvernement a l'intention de réglementer ces plateformes numériques afin de préserver les établissements d'enseignements de la conduite et de garantir une formation de qualité aux citoyens.

Texte de la réponse

L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur ne peut être organisé que « dans le cadre d'un établissement agréé » (article L. 213-1 du code de la route), l'école de conduite. Cet agrément est délivré par le préfet de département du lieu d'établissement. Au sein de cet établissement, l'enseignement est dispensé par un enseignant titulaire d'une autorisation délivrée également par le préfet de département. L'article R. 212-1 précise que cette autorisation d'enseigner est valable sur l'ensemble du territoire national. L'établissement est défini par l'arrêté du 8 janvier 2001 comme étant constitué par deux éléments : un exploitant et un local. Jusqu'à l'adoption de la loi no 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, l'inscription au permis de conduire ne pouvait se faire que dans le local, ce qui interdisait la conclusion des contrats en ligne. Cette obligation de s'inscrire dans le local qui était également inscrite dans l'arrêté du 8 janvier 2001, n'existe plus depuis la loi du 6 août 2015 précitée qui a inscrit dans l'article L. 213-2 du code de la route la possibilité de conclure des contrats à distance. Ainsi, sous la seule réserve qu'une évaluation préalable ait été réalisée dans le local ou dans le véhicule, un établissement agréé peut proposer la vente à distance de prestations de formation à la conduite. Par ailleurs, les nouveaux acteurs de l'enseignement de la conduite se distinguent également des établissements traditionnels en ne présentant pas leurs candidats à l'examen. Leurs élèves sont des candidats libres, qui accomplissent eux-mêmes leurs démarches de demande de places d'examen auprès de la préfecture (bureau en charge des examens) de leur lieu de résidence. En outre, les enseignants attachés à l'établissement travaillent en général sous couvert d'un contrat de prestation de services et peuvent donc être basés dans un autre département. Ainsi, en l'état actuel du droit, très récemment précisé par la jurisprudence, rien ne s'oppose à ce qu'un établissement agréé dans un département dispense des cours sur tout ou partie du territoire national. La réglementation du code de la route ne doit pas être un obstacle à l'émergence de nouveaux modèles économiques, dès lors que l'enseignement dispensé permet aux apprentis conducteurs d'apprendre à conduire en toute sécurité et de se présenter avec les meilleures chances de réussite à l'examen. Toutefois, le Gouvernement est très attentif à l'amélioration de la transparence et au respect des autres règles fixées dans le code de la route mais aussi en matière de concurrence et de droit du travail. L'exercice illégal de l'enseignement de la conduite en dehors d'un établissement agréé constitue un délit. A ce titre, deux instructions ont été adressées le 25 mars 2016 et le 6 mai 2017 aux préfets afin que soient diligentées des opérations de contrôles en s'appuyant sur le comité opérationnel départemental anti-fraude (CODAF) présidé conjointement par le préfet et le procureur de la République. Ces dernières rappellent notamment la nature des sanctions administratives et pénales au titre des infractions prévues par le code de la route mais également au regard du droit du travail. Ainsi, les services déconcentrés de l'Etat ont conduit des opérations de contrôle des moyens utilisés pour l'enseignement de la conduite, notamment les véhicules d'apprentissage qui doivent obligatoirement appartenir à l'établissement agréé, ou être loués par lui ou faire l'objet d'une mise en commun avec un autre établissement agréé. Les contrôles ont également porté sur l'enseignement devant être dispensé par un enseignant de la conduite et de la sécurité routière titulaire d'une autorisation d'enseigner délivrée par le préfet de département. A l'issue de ces campagnes de contrôles, certains préfets ont saisi le procureur de la République conformément aux dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale afin de l'aviser de certaines pratiques frauduleuses. Enfin, la mise en œuvre du label « qualité des formations au sein des écoles de conduite », qui est entré en vigueur le 2 mars 2018, redonnera notamment toute son importance à un enseignement théorique collectif de qualité, ce qui n'exclut en rien l'utilisation de moyens modernes de simulation et de mise en situation.