Rubrique > sociétés
Titre > Avoir fiscal, procédure en manquement, risque et coût contentieux
M. Romain Grau attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les incidences de la procédure en cours devant les juridictions européennes concernant les recours en manquement à l'encontre de la France concernant l'avoir fiscal pour les sociétés en fonction de leur lieu de résidence. Dans son arrêt « Manninen », la Cour de justice des communautés européennes a implicitement condamné un dispositif finlandais d'avoir fiscal. Cette législation, autorisant l'imputation d'un avoir fiscal lorsque la société distributrice est résidente nationale mais s'y opposant lorsque cette société n'est pas résidente, constitue selon la Cour une entrave à la liberté de circulation des capitaux garantie par le traité CE à ses articles 56 et 58. Il en a été tenu compte en France concernant le dispositif d'avoir fiscal français ainsi que celui du précompte, considérant les nombreuses similitudes du dispositif national avec celui qui avait cours en Finlande jusqu'à l'arrêt « Manninen ». Le régime fiscal des distributions a ainsi été modifié et l'avoir fiscal et le précompte adossé à ce dernier pour les personnes morales ont ainsi été supprimés à compter du 1er janvier 2005. Par la suite, une vingtaine de sociétés mères françaises ont alors introduit des recours contentieux, afin de bénéficier d'un avoir fiscal à raison des dividendes reçus de leurs filiales résidentes d'un État membre de l'Union européenne et d'ainsi obtenir le remboursement du précompte mobilier payé lors de la redistribution de ces dividendes invoquant la libre circulation des capitaux et la liberté d'établissement. Les premières décisions rendues sur ce contentieux l'ont été par le tribunal administratif et la Cour administrative d'appel de Versailles respectivement en décembre 2006 et en mai 2008, concernant les sociétés Accor et Rhodia, dossiers devenus « pilotes ». Les deux juridictions ont jugé que le dispositif de l'avoir fiscal et du précompte mobilier désavantageait les sociétés mères françaises ayant des filiales établies dans un autre État membre de l'Union européenne par rapport à celles qui avaient des filiales établies en France et était donc constitutif d'une restriction à la liberté de circulation des capitaux prohibée par l'article 56 du traité CE. Le Conseil d'État, saisi de deux pourvois en cassation de l'administration dirigés contre les arrêts de la Cour administrative d'appel de Versailles de mai 2008, a adressé plusieurs questions préjudicielles à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) par une première décision Accor. Le Conseil d'État a demandé dans le même temps aux juridictions saisies d'affaires de ce type d'en geler l'instruction dans l'attente de la réponse de la Cour de justice puis de ses propres décisions. L'arrêt de la Cour de justice a été prononcé le 15 septembre 2011. Dans celui-ci, la Cour a invalidé dans sa décision le régime français ancien des distributions, dès lors qu'il réservait le bénéfice de l'avoir fiscal aux seuls dividendes de source française. Elle a cependant posé le principe selon lequel la France n'était pas tenue d'accorder un avoir fiscal sans tenir compte du niveau d'imposition réel des bénéfices de source communautaire appréhendés par les sociétés mères françaises, et a laissé au Conseil d'État le soin de trancher un certain nombre de questions relatives au quantum du litige. Les décisions de principe du Conseil d'État suivant l'arrêt de la Cour de justice ont été rendues publiques le 10 décembre 2012. Cependant, à sa connaissance, six sociétés ont déposé une plainte en juillet 2013 devant la Commission européenne à l'encontre des décisions du Conseil d'État du 10 décembre 2012, en vue d'obtenir une nouvelle saisine de la Cour de justice. L'instruction de cette procédure par les services de la Commission européenne est toujours en cours. Celle-ci a donné suite à ladite plainte et a engagé une procédure de recours en manquement à l'encontre de la France. Si une saisine de la Cour de justice de l'Union européenne aurait pour effet, selon le ministère de reporter l'issue définitive de l'ensemble du litige à un horizon beaucoup plus lointain. L'issue définitive de ce contentieux demeure donc incertaine. Dans ce contexte, il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur ce contentieux et les modalités de calcul de la provision pour litige afférente à la dernière partie de ce contentieux datant de plus de 13 ans.